Le cinéma de L.Lumière
Posté par francesca7 le 22 février 2013
Films en relief en 1936 : premières
sensations fortes et lunettes spéciales
(D’après « La Nature » paru en 1936)
En 1936, un chroniqueur de La Nature se fait l’écho de l’enthousiasme soulevé par la présentation des premiers films en relief le 30 avril de cette même année, grâce aux lunettes conçues à cet effet par le célèbre Louis Lumière donnant l’illusion qu’une partie de l’action a lieu dans la salle elle-même, et l’on imaginait déjà pouvoir s’affranchir rapidement de cet encombrant accessoire
L’inventeur du cinématographe, explique le chroniqueur P. Hémardinquer, avait proposé un dispositif pour la projection cinématographique en relief reposant sur un perfectionnement remarquable de la méthode des anaglyphes : on projette sur l’écran deux images stéréoscopiques, de deux couleurs différentes de l’une à l’autre et complémentaires. Les mêmes couleurs servent à teinter différemment les verres d’une lunette à travers laquelle le spectateur regarde l’écran ; aussi chaque œil n’aperçoit-il qu’une image sur l’écran et précisément celle qui lui est destinée.
Louis Lumière et son appareil de projection
en relief. Il porte les lunettes de spectateur
Louis Lumière, en reprenant cette méthode ancienne – dont le principe avait été décrit en 1853 par Rollman, et mis au point par du Hauron en 1891 –, a eu le mérite d’en voir les défauts et d’y remédier par le perfectionnement des écrans et des lunettes. Les couleurs colorant les écrans et les verres des lunettes ne sont pas le vert et le rouge, comme dans la méthode ordinaire, mais un bleu pur et un jaune légèrement verdâtre. On peut ainsi obtenir un équilibre de l’énergie lumineuse totale reçue par chacun des yeux.
Nous apprenons qu’une salle de projection des grands boulevards à Paris, « l’Impérial Pathé », a été équipée pour ces projections. Il avait été question de supprimer les lunettes portées obligatoirement par les spectateurs et de les remplacer par des systèmes optiques disposés sur le dossier des fauteuils, de manière que chaque spectateur puisse avoir devant les yeux les verres colorés nécessaires, sans tenir à la main un appareil quelconque et sans avoir de lunettes à porter. Ce projet a été abandonné pour l’instant, ajoute le chroniqueur. La disposition des appareils sur les dossiers des fauteuils aurait gêné le passage des spectateurs, et constitué un danger en cas d’accident nécessitant l’évacuation de la salle. La position fixe de ces systèmes optiques aurait, d’autre part, obligé le spectateur à maintenir constamment la tête dans une position déterminée, d’où une gêne et même une fatigue au cours d’une projection assez longue.
La présentation des premiers films en relief a eu lieu le 30 avril 1936, devant une assistance des plus brillantes et a remporté un grand succès. Le programme, encore réduit, comportait une comédie de genre, « l’Ami de Monsieur », et un documentaire, « Riviera ». Ces deux films, de métrage moyen, ont été réalisés par un technicien, metteur en scène habile, M. Pierre de Cuvier. La sensation de relief obtenue est tout à fait saisissante, poursuite Hémardinquer. le documentaire, en particulier, avec ses lointains qui s’étagent à perte de vue, et ses « gros plans » qui semblent percer l’écran et se trouver dans la salle donne une impression de naturel admirable, bien propre à renouveler tout l’intérêt de ce genre de film.
Il est certain qu’un documentaire artistique sur des monuments, des églises ou des œuvres d’art acquerra une nouvelle valeur avec la vision en relief. La comédie, dont certains tableaux ont provoqué, dans le public, des réactions très caractéristiques, soulève déjà des problèmes techniques et artistiques très intéressants. Tous les sujets au premier plan, provoquent, en effet, chez le spectateur, l’illusion qu’une partie de l’action a lieu dans la salle elle-même. Lorsqu’une jeune fille jette des fleurs devant soi, on a l’illusion de les voir tomber dans la salle.
Des serpentins lancés dans un dancing paraissent tendus dans la salle ; lorsqu’un personnage lance devant soi une paire de souliers, les spectateurs se reculent instinctivement par crainte d’être blessés. cette « mise en relief » littérale de l’image donne à cette dernière une importance qu’elle avait quelque peu perdue depuis l’apparition du cinématographe parlant, et que les essais de cinématographie en couleurs n’avaient pas encore réussi à lui rendre.
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