Le Château de THIL en Côte d’Or
Posté par francesca7 le 25 février 2013
Le château de Thil remonterait au règne de Charlemagne, au 9ème siècle. La collégiale date du 14ème siècle.
Le château de Thil se situe à l’ouest de Dijon, en Bourgogne, entre les communes de PRECY sous THIL et de Vic-sous-Thil. La présence d’un castellum est attestée dès 1016 dans le cartulaire de Flavigny et l’occupation du site se poursuit de façon certaine jusqu’au xviie siècle. S’il est vrai que le château a été fortement restauré au cours du xxe siècle, ses vestiges rendent encore possible une étude architecturale. Ce château fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis le 12 septembre 1905.
Pendant la guerre de Cent Ans, la Bourgogne fut ravagée par les Anglais, les Ecorcheurs (Grandes Compagnies). En 1366, mort d’Arnaud de Cervoie, les soudards du « Petit Darby », son cousin, en profitèrent pour assiéger le château de Thil pendant cinq jours et le prirent le 15 mai. Ils exigèrent une rançon de 3 5OO F or.
Traité ici, l’histoire de Thil serait beaucoup trop long. C’est un des plus anciens châteaux forts de France et le site a été périodiquement remanié du 9ème au 15ème siècle.
Le premier personnage connu de cette famille est Miles de Thil qui fonde en 1007 le prieuré de Précy-sous-Thil. Dès le xie siècle, Thil est une vicomté au même titre que Semur-en-Auxois et Villaines. Il gardera ce statut jusqu’en 1310, date à laquelle il est érigé en comté relevant du duché de Bourgogne. Aux alentours de 1340, Jean de Thil est nommé connétable héréditaire du duché de Bourgogne. Alors que le prestige de la famille s’accroît, une collégiale est fondée sur l’extrémité nord de l’éperon, à une centaine de mètres du château. Encore conservée aujourd’hui, elle représente un bâtiment imposant à chevet plat, voûté en berceau pour la nef et en ogives pour le transept, avec un clocher à l’ouest de l’édifice. Enfin, en 1596, Thil devient une baronnie.
Nous évoquerons donc la période la plus faste, celle de Jean de Thil, connétable de Bourgogne en 1340. Pour rendre grâce à Dieu de sa bonne fortune, sire Jean fait édifier la collégiale. L’ambiance de l’époque, avec nos « preux chevaliers » vaut d’être contée !
Eclate la guerre de Cent Ans. Jean de Thil qui a épousé Jeanne de Châteauvillain en 1345, devient l’un de splus proches vassaux des ducs. Il est nommé connétable du duc Eudes IV, c’est-à-dire chef des armées, à la mort de Robert de Châtillon. C’est à ce moment qu’il décide d’adjoindre une collégiale à sa forteresse. La construction dure de 1343 à 1350. Ce n’est évidemment pas un hasard si l’édifice est fortifié ! C’était une sage précaution car, en plus des guerres privées entre seigneurs, s’annonçait la menace de la guerre de brigandages de ce qu’on commençait à appeler les « Grandes Compagnies », ces bandes de soudards mis au chômage par les suspensions de conflits périodiques.
Pour situer l’époque, n’oublions pas que la Grande Peste ravagea l’Auxois en 1348, conduisant à la tombe, ou plutôt à la fosse commune, des milliers d’habitants.
En 1356, c’est la déroute de Poitiers. Jean de Thil n’y est pas : il est mort deux ans plus tôt. L’élite de la chevalerie française y trouve la mort, part en captivité ou verse une rançon. Parmi les morts ; Jean de Châteauvillain, frère de Jeanne. Prisonnier ; un certain Arnaud de Cervole dont nous aurons bientôt à reparler. Après Poitiers, les troupes anglo-navarraises du roi d’Angleterre, Edouard III, se jettent sur la Bourgogne après la Champagne. Auxerre est prise par les bandes de Robert Knowles. Courcelles-Frémoy est incendiée. Saulieu est détruite. Le jeune duc, Philippe de Rouvres doit traiter avec les envahisseurs : le traité de Guilllon, signé le 10 mars 1360 avec les Anglais, épargne la dévastation aux Bourguignons contre une énorme rançon.
Un chevalier anglais nommé Nichole de Tamborth sert d’interprète pendant les négociations ; il émarge donc au budget ducal en même temps qu’il guerroie pour son propre compte et celui du roi d’Angleterre. On le vit même apparaître dans la même négociation sous deux identités : comme chevalier anglais et en tant que négociateur payé par le duc, pour son plus grand profit bien sûr !
Malgré les accords, des bandes de pillards réapparaissaient sans cesse.
Des soudars arrivés dans l’Auxois annoncèrent qu’ils « feroient guerre et bouteroient les feux partout se les diz messire Nychole et Guillaume (de Granson, autre belle figure de l’époque) ne leur tenoient pce que promis avoient pour le paiis de Bourgogne ». (A.D.C.O. B 2748). Autrement dit, ils réclamaient une rançon en échange de leur neutralité. Nichole de Tamborth était comme par hasard avec le duc à Beaune. Dès le lendemain de l’annonce de ces menaces, il reçut pour prix de ses services auprès des routiers, les terres de Courcelles et de Montigny. C’est ainsi que pendant sept ans, Bierre eut pour seigneur un soldat du roi d’Angleterre. (ADCO. B 1337)
Les impôts et autres redevances perçus sur la population locale ont donc alors servi à entretenir un capitaine d’Edouard III et ses hommes ; ce capitaine devenait vassal des ducs (le dit messire nicole tendra en fie et hommage de nous et de nos successeurs ducs de bourgoigne les maisons dessus dites). Comme tel, il était donc tenu de répondre aux convocations de l’armée ducale. Ce n’est pas là, d’ailleurs, la plus surprenant des incongruités de l’époque….
Laissons là Nichole de Tamborth, qui d’ailleurs n’a pas dû s’attarder beaucoup dans le secteur, attendu que ses responsabilités l’appelaient à d’autres besognes. Philippe de Rouvres étant mort le 21 novembre 1361, c’est Philippe le Hardi, le premier des « grands ducs d’Occident » qui entre en possession de la seigneurie de Courcelles et Montigny, et donc Bierre, le 25 novembre 1367. Portons un instant nos regards vers la butte de Thil et son château au même moment. L’histoire est bien révélatrice des événements et des mœurs du temps.
La dame de Thil, Jeanne de Châteauvillain, avait perdu son premier mari, Jean de Thil, en 1354, et son deuxième, Hugues de Vienne, en 1362. Elle avait épousé aussitôt Arnaud de Cervole.
Arnaud de Cervole, appelé constamment « l’arceprestre » (l’archiprêtre) par ses contemporains est décrit comme un chef de bande qui aurait mis la main sur une riche héritière, mais la réalité est bien plus complexe. Certains historiens oublient de dire que le soudard en question eut pour parrain du fils qu’i l eut avec Jeanne de Châteauvillain, Philippe le Hardi ! Comment ne pas voir alors qu’il s’agissait d’un des plus proches familiers du duc, à qui il rendit maint service et prêta souvent de l’argent ? Arnaud de Cervoie était le pur produit d’une époque troublée, il peut être comparé, sur bien des points, à un autre chef de guerre qu’il côtoya et qui, lui, est resté dans l’histoire : Bertrand Duguesclin.
Le troisième époux de la dame de Thil est né dans le Périgord. Cervole est un hameau de l’arrondissement Périgueux. Sa noblesse dut être de second ou troisième ordre. Arnaud a certainement perçu des droits (sans être le moins du monde ordonné, mais seulement comme seigneur temporel) de ‘l’archiprêtré’ de Vélines (chef-lieu de canton de la Dordogne) : d’où son surnom. Né dans une région où la guerre entre partisans du roi de France et du roi d’Angleterre faisait rage, Arnaud de Cervole se mit au service des Français à la tête de soldats qu’il recrutait lui-même et commandait. L’habitude d’utiliser comme forces d’appoint ceux que l’on appelait des soudoyers était déjà bien installée. L’archiprêtre se fit remarquer au combat et, à la bataille de Poitiers, fut l’un des derniers défenseurs du roi Jean le Bon. Celui-ci s’empressa de payer la rançon d’un prisonnier aussi précieux .
L’ennui, c’est qu’on licenciait ces auxiliaires après les combats et qu’au lieu de rentrer sagement à la maison, ils avaient une fâcheuse tendance à dévaster des régions entières. Ces compagnies de pillards pouvaient même se regrouper et mettre en échec les armées régulières, comme à Brion sur Ource et à Brignais. L’une de ces « Grandes Compagnies » se forma en Champagne en 1360 et pour éviter des dévastations, on la dédommagea d’un passage rapide. C’est à ce moment, nous l’avons vu, que Nichole de Tamborth fut payé de ses services par l’octroi de la seigneurie de Courcelles.
Les chefs de bandes les plus fameux mettaient leurs hommes au service des armées régulières, au besoin contre d’autres bandes, ou bien servaient de négociateurs aux puissants qui dédisaient acheter le départ des brigands. C’est le rôle que tint Arnaud de Cervole auprès de Philippe le Hardi.
En 1363, l’archiprêtre se retrouve seigneur de Thil, et, comme il n’est pas homme à contempler le paysage, il garde la main en allant mettre le siège devant Vitteaux. Ici encore ne nous méprenons pas : il ne s’agit pas d’un acte de brigandage stricto sensu. Vitteaux est à Louis de Chalon, ennemi du duc Philippe le Hardi. Louis de Chalon vient de mettre à sac les terres de Châteauvillain. Nous avons là une guerre privée entre seigneurs, tout à fait légale et commune. Les dernières années d’Arnaud e Cervole sont occupées à organiser, pour le compte du papa et du roi de France, une croisade contre les Turcs. Il s’emploi à recruter des compagnies pour lui. Rude tâche que de convaincre des pillards, habitués à rançonner de gras marchands et à brûler des villages après avoir violé quelques paysannes, de partir à des milliers de kilomètres pour assurer leur salut en sa faisant découper en rondelles par la soldatesque Turque !
L’archiprêtre s’en aperçut à ses dépens puisque l’un des récalcitrants l’a occis proprement du côté de Lyon le 25 mai 1366. Pendant que le mari de Jeanne de Châteauvillain était encore vivante, mais fort occupé dans le sud, son cousin, appelé Petit Darby (petit ange d’aspect, grand démon de caractère), jugea l’instant propice pour se remplir les poches sans trop de risques. C’est ici qu’il faut placer l’épisode de la prise du Château de Thil. Dès qu’il apprit le mort d’Arnaud de Cervole, Philippe le Hardi envoya dans l’Auxois un de ses valets, Jean de la Pomme, pour recommander à sa commère, Jeanne de Châteauvillain, de « bien garder sa forteresse, de peur que les gascons n’y entrassent ». Trop tard. L’assassinat de l’archiprêtre a du prêtre prémédité pour se débarrasser d’un chef trop autoritaire aux yeux des bandes de soudards. Le 15 mai 1366, Petit Darby » prit THIL, la dame dedans ». Cependant, Darby ne put prendre la collégiale. Le bailli d’Auxois, Guillaume de Clugny, reçut des renforts et campa à PRECY SOUS THIL. Darby fit payer 3 500 francs d’or à la châtelaine et fila continuer son œuvre sur les terres de Châteauvillain. Nous connaissons ces épisodes grâce aux livres de comptes de Guillaume de Clugny, bailli d’Auxois (A.D.C.O, B. 2752).
Jeanne, veuve pour la troisième fois mais femme de tempérament, se remaria une quatrième et mourut en 1390. Jean dota la collégiale d’un chapitre composé de cinq chanoines et d’un doyen, astreints à célébrer (au moins) deux offices par jour, pour l’éternité. Cette pratique prit fin à la Révolution, en 1790 ! Les chanoines logeaient dans des petites maisons avec jardin, côté est du site le doyen à Maison-Dieu. Ils vivaient des redevances prises sur les terres leur ayant été octroyées. L’existence des serfs des alentours était tellement misérable, notamment à Nan, que ceux-ci préféraient rester célibataires que de voir leur progéniture subir le même sort qu’eux !
En 1442, presque tous les habitants de Noidan et Pluvier furent occis par ces bandes sans foi, ni loi qui tuaient, pillaient, rançonnaient les habitants de nos campagnes ; ce n’était partout que mutilations d’hommes ; beaucoup de seigneurs, pour épargner leurs terres, transigeaient avec les Ecorcheurs en leur payant une forte somme. Les ravages causés par ces brigands étaient tels que le nombre de foyers de l’Auxois, qui était de 6 603 en 1397 était tombé à 3 903 en 1442 !
En 1470, la population de PRECY SOUS THIL compte 3 feux francs et 31 feux serfs. Si l’on considère qu’un foyer est composé de 5 ou 6 personnes, en fonction de la mortalité infantile et l’espérance de vie, notre beau village devait avoir entre 170 et 200 habitants.
Au XVIème siècle, les habitants de notre région eurent à souffrir des guerres de religions ; les simples gens de nos campagnes ne s’étaient pas mêlés de la querelle religieuse, ils étaient restés fidèles à la foi catholique et ne demandaient qu’à vivre et labourer en paix ; malheureusement, des bandes de pillards dévastaient les maisons, molestant le paysan et vivant à ses dépens. Au commencement de son règne, Henri IV constate « que tous les villages sont quasi inhabitables et déserts, la cessation de labour presque générale, le peuple appauvri et presque à sa dernière misère ». A la suite des ravages causés par ces guerres, les loups accoutumés à se nourrir de cadavres humains étaient devenus d’une grande férocité et fort audacieux. Le bétail et les gens étaient souvent attachés, des chasses aux loups étaient organisées dans chaque village ; les histoires de loups faisaient frémir, les soirs, dans les chaumières.
Actuellement, le château se présente sous la forme d’une enceinte ovoïde comprenant un réduit seigneurial et une grande basse-cour. L’étude du bâti permet de discerner différentes phases de construction s’échelonnant du xiiie siècle au xvie siècle. Pour le xiiie siècle, subsistent les vestiges du reste d’un logis rattaché à un cellier et probablement à la tour de guet. Une chapelle étant attestée dès 1085, nous pourrions avoir affaire au schéma type « aula, capela, Bergfried ». À la fin du xive siècle, la construction d’une tour-résidence et d’un bâtiment d’habitation redéfinit l’espace en dessinant ce qu’on appelle le réduit seigneurial. Cette configuration s’affirme au xve siècle puis aux vie siècle avec la construction d’un nouveau bâtiment et le remaniement de l’enceinte. Au fil des siècles, le site accroît ses qualités résidentielles tout en conservant ses prérogatives défensives.
Le château de Thil a connu une longue période d’occupation, dont l’évolution peut-être suivie sur au moins six siècles. La période d’apogée du site est liée à Jean de Thil (fin xive siècle) qui a doté le site de ses plus beaux éléments d’architecture, notamment la collégiale. La chronologie du château doit être encore affinée mais on peut d’ores et déjà parler d’un site majeur pour l’architecture castrale bourguignonne.
L’église de la collégiale comporte également des pièces intéressantes. Le chœur du XVe, son transept 12ème et des fenêtres flamboyantes ; pierre tombale 16ème, fonts baptismaux* 12 vitraux XVIe, statues (XIVe et XVIe s) . La collégiale en ruines arbore une belle architecture gothique ( XIVe s) : haut clocher carré à contreforts, nef unique, chœur à chevet plat, portail sculpté, pierre tombale du XVe d’un doyen de la collégiale.
Sources : D’après les écrits de recherches commencée par Alain Monin dans son livre : « Quand j’allais à l’école »
et Wikipédia
Château de Thil, visite :
Date à confirmer. Le Château de Thil est d’après André Malraux considéré comme le plus vieux Château Fort de France. Une ruine grandiose, romantique sur un…
Du lundi 23 avril 2012 au vendredi 1 novembre 2013
Château de Thil | Expo – Musée | Vic sous thil
Publié dans CHATEAUX DE FRANCE, Côte d'Or | Pas de Commentaire »