Ce que l’on sait moins c’est qu’il n’y a pas que le fruit qui est bon dans le noyer, les feuilles sont elles aussi très intéressantes. Petit rappel.
Le noyer est une espèce thermophile, cultivée autrefois pour sa ressource oléagineuse (noix récoltées en octobre-novembre) et son bois dur, en particulier pour l’ameublement. Par exemple, en Alsace et dans la plaine rhénane, s’il était rare dans les plaines loessiques, il résistait bien isolé dans les finages d’Outre-forêt, les collines sous-vosgiennes, les glacis de piémont vosgien souvent couvert de vignobles, voire dans le Ried s’il était au sec et dans les terrasses rhénanes limoneuses d’Eschau et deRhinau.
Le noyer commun peut pousser jusqu’à 1 000 m d’altitude en zone tempérée, mais il lui faut un emplacement à l’abri des vents forts. Il tolère les sols légèrement acides à calcaires alors que le noyer noir nécessite des terrains frais et légèrement acides. Le noyer est un arbre facile d’entretien mais il a besoin d’un sol riche. Il faut surtout veiller à ce qu’il ait assez d’eau au mois de juin car s’il en manque, les noix seront petites. C’est aussi le moment où se prépare l’induction florale (les futures fleurs de l’année suivante). Une sécheresse à ce moment précis compromet donc aussi la récolte de l’année suivante.
Le noyer n’apprécie pas la taille. On se contentera donc de tailler les bois morts à la fin de l’automne si on veut éviter les écoulements de sève.
Les feuilles de noyer produisent du juglon qui après lessivage par les pluies, par un phénomène d’allélopathie, empêche les autres plantes de pousser autour du noyer. Toutes les plantes ne sont pas affectées négativement par la juglone. Myosotis, Pachysandra terminalis, Barbe de bouc , alchémille, hosta, heuchère, bugle rampante ( et la majorité des bulbespeuvent constituer un joli décor au pied de cet arbre.
Une étude américaine indique que les vergers de noyers où sont aussi plantés des Elaeagnus umbellata ou des aulnes glutineux ont une production de noix augmentée de 20 %. Cela est dû à l’azote apporté dans le sol par ces espèces.
L’alliance de la vigne et du noyer est une constante culturelle en Alsace, depuis la civilisation gallo-romaine implantant la vigne. L’arboriculture traditionnelle pouvait associer au noyer le châtaignier calcifuge, mais aussi et surtout les autres arbres fruitiers thermophiles : la pêche de vigne, le néflier, le cormier (sorbier domestique), l’amandier. C’est l’association du vin et de la noix qui a fondé la fête du vin.
Une croyance alsacienne maintient qu’une femme qui veut garder son mari se doit de garder en son soulier senestre feuille de gauguier cueillie la nuit de la Saint-Jean. Les noms alsaciens du noyer sont Nussbaum ou Wallnuss.
Le noyer magique de la Saint-Jean aurait, en plusieurs provinces françaises, la particularité d’émettre ses feuilles et quasiment ses fruits tous d’un coup le jour de la Saint-Jean (le 24 juin), d’où son nom.
Avoir un petit coup de fatigue, ça arrive à tout le monde. Surtout lorsque le souvenir des vacances commence doucement à s’évanouir. Il faut s’occuper de mille choses, et parfois même en plus des enfants.
C’est le cas de mon ami Paul, qui a pris ses vacances en juillet. À la rentrée, il a mis ses jumelles à la maternelle pour la première fois. Je le tance pour qu’on aille boire un café, il en prend deux. De son propre aveu, il est déjà « cuit », et la Toussaint est encore loin, pour lui en tous cas.
Je lui conseille de prendre des compléments alimentaires, mais il ne veut pas en entendre parler, car il se connaît, il a du mal à y penser – ou alors, quand il y repense, il en prend trop d’un coup. Je réfléchis alors à une solution, et une idée me vient à l’esprit : les noix.
En effet, rien n’est si bon pour l’organisme et l’intellect que les noix. Pourtant, on n’y pense jamais. Le plaisir que nous avions étant petits à en écraser les coquilles nous paraît désormais un effort de trop. « Et puis les noix, c’est gras », me dit Paul.
« Arrête de manger des cacahuètes à l’apéro », lui ai-je aussitôt répondu. « Et fais-moi confiance. » Trois jours plus tard, j’ai reçu un message. Paul me remerciait : c’était le petit plus énergétique dont il avait besoin.
À vous la robustesse du noyer
Non, le noyer ne sert pas qu’à décorer les tableaux de bord des voitures haut de gamme. Cet arbre originaire d’Iran, au port majestueux, pousse partout et atteint parfois l’âge de 1000 ans.
On le plantait souvent près des monastères pour ses fruits nourrissants, pour le brou vert (pigment naturel de l’écorce) qui les protège, ainsi que pour les propriétés médicinales de ses feuilles.
Attention toutefois, si vous voulez en planter un chez vous, la juglone qui s’échappe lors de la décomposition des feuilles peut persister plusieurs mois dans le sol et se révèle toxique pour les autres plantes. D’où la tradition selon laquelle on ne doit pas s’endormir sous un noyer, ce qui pourrait occasionner des maux de tête – mais pour tout vous dire, je ne l’ai jamais fait…
Les noix recèlent de nombreux éléments aux notables vertus thérapeutiques : la naphtoquinone (dans les feuilles et le brou), des tanins et des flavonoïdes, bien sûr, mais aussideux acides particulièrement utiles, l’ellagique et le gallique, ainsi que des huiles volatiles.
Les feuilles, en plus des flavonoïdes, sont riches en vitamine C. Quant aux noix, leur huile est très riche en acides gras polyinsaturés (linoléique, oléique et linolénique), nécessaires au renouvellement des cellules. Hélas, l’huile de noix rancit très vite.
Superaliment, au travail !
Les noix sont, selon les spécialistes de la phytothérapie, un « superaliment ». Elles sont riches en vitamines (B1, B2, B3, B5, B6) et en minéraux (sélénium et manganèse). Surtout, elles fournissent un excellent apport en acides gras oméga 3, qui protègent le cœur et favorisent la fonction cognitive. Ce qui a été supputé depuis longtemps en vertus de la Théorie des signatures
(lire l’article dans le nouveau Plantes et Santé de novembre), puisque les cerneaux de noix ressemblent à des cerveaux.
Les acides gallique et ellagique sont des composants phénoliques aux puissants pouvoirs antioxydants car ils stimulent les enzymes chargés de nettoyer les éléments cancérigènes de notre organisme.
Ce pouvoir anti-âge donne aux noix une place de premier plan dans le traitement de la maladie d’Alzheimer. Car les acides gallique et ellagique inhibent l’agrégation plaquettaire et décomposent les plaques amyloïdes formées dans le cerveau par cette maladie – diminuant ainsi le risque d’attraper la maladie et retardant son apparition.
Les noix, en tant que source conséquente d’oméga 3 et d’acide linolénique, ont une action efficace sur le système immunitaire, sur le cœur, la circulation et les affections dégénératives. En outre, elles font diminuer le mauvais cholestérol, ce qui ravira les gourmands.
L’huile de noix a été prescrite dans l’Antiquité, notamment par Galien et Dioscoride, même si on l’utilisait déjà vieille d’un an, c’est-à-dire tout à fait rance. Elle soignait alors le ver solitaire, les coliques néphrétiques et les calculs de la vessie. Mêlée à parts égales avec de l’eau de chaux, elle calmait et guérissait les brûlures.
Enfin, le vinaigre de jeunes noix marinées prouve encore son efficacité comme gargarisme pour le mal de gorge.
Le pouvoir des feuilles
Dans le noyer, il n’y a pas que les noix. Il y a aussi les feuilles, et le brou de noix, c’est-à-dire la carapace verte et plus tendre qui entoure la coquille.
Traditionnellement, les propriétés stimulantes, stomachiques et dépuratives des feuilles de noyer les ont fait recommander pour traiter le rachitisme, l’apathie chronique, ainsi que les tuberculoses pulmonaire et osseuse. Elles régulent l’appareil digestif, favorisent le tonus musculaire, stimulent le foie et épurent le sang.
Leurs propriétés anti-inflammatoires sont utiles en cas d’asthme et de polyarthrite rhumatoïde. Elles tiennent également lieu d’antibiotiques contre l’anthrax, autrefois courant dans les campagnes, inoculé par les animaux errants.
Les feuilles sont également à recommander pour les personnes atteintes de diabète hépatique : elles rééquilibrent les métabolismes perturbés, font baisser la glycémie, réduisent la soif et les mictions trop fréquentes des diabétiques, et évitent les complications. Les macérats de bourgeon sont désormais utilisés à cette fin de nos jours.
Pour la peau, la décoction des feuilles de noyer est efficace contre l’eczéma, les croûtes de lait, les ulcères, les plaies variqueuses, les angines, l’irritation des paupières, les pellicules et la chute des cheveux. On utilisait cette préparation en Angleterre pour laver les chevaux et les mettre à l’abri des piqûres d’insectes.
L’action astringente des feuilles combat l’irritation et l’inflammation de la muqueuse intestinale, soulage l’indigestion, la gastro-entérite, la nausée et les diarrhées. On l’utilise encore comme vermifuge et pour abaisser la glycémie. Elles éliminent en outre le mucus et la toux catarrhale.
L’infusion de feuilles sert de lotion pour les boutons de fièvre, le zona, les engelures, la transpiration excessive des mains et des pieds, les hémorroïdes, les varices, les ulcères, les inflammations des yeux comme les orgelets, ainsi que les maux de gorge.
Dosée un peu plus lestement, la décoction de feuilles peut être utilisée en douche, pour traiter les pertes blanches et les inflammations de l’utérus. Vous pouvez aussi vous préparer un bain avec, qui rendra votre peau douce et apaisera les démangeaisons.
L’écorce du noyer a des vertus détoxifiantes qui favorisent le système lymphatique, remédient à la congestion lymphatique, aux ganglions enflés et à l’acné.
Enfin, le brou bouilli dans l’eau était utilisé traditionnellement comme teinture sombre et comme soin pour les cheveux, en les épaississant. Tonique, stomachique, dépuratif comme les feuilles, il est également vermifuge, antisyphilitique, et entrait dans la tisane de Pollini, réputée efficace contre les affections vénériennes.
Le suc de brou vert était épaissi au miel, afin de produire un sirop, le rob nucum, prescrit contre les maux de gorge, les inflammations et les abcès des amygdales, mais aussi contre la teigne et les verrues.
Des préparations thérapeutiques et gourmandes
Vous l’aurez compris, il suffit de descendre au marché en bas de chez vous pour vous procurer des noix. Obtenir des remèdes avec ces fruits n’est guère plus compliqué.
Pour l’infusion de feuilles, placez 20 g par litre d’eau et faites infuser 15 minutes. 3 ou 4 bols par jour atteindront l’effet recherché. Si vous voulez avoir les effets sans vous embarrasser à chercher des feuilles de noyer, pas si facile à trouver dans certaines villes, le macérat de bourgeons de noyer est particulièrement efficace, surtout pour les diabétiques.
Le sirop dépuratif de noyer est aussi recommandé pour l’estomac : faites macérer 15 jours dans leur volume d’eau-de-vie des feuilles fraîches tassées, filtrez et ajoutez un sirop de sucre à raison de 180 g de sirop pour 100 g d’alcoolature.
L’huile se prend à la dose de 60 g le soir dans une salade de pommes de terre par exemple, pour expulser le ver solitaire. Contre les calculs rénaux et urinaires, la dose doit être jusqu’à 50% plus grande.
Il existe également des préparations alcoolisées, comme le vin de noix et le ratafia de brou de noix, sans parler de l’excellent Nocino, une liqueur de noix fabriquée en Italie. S’il ne s’agit pas à proprement parler de recettes thérapeutiques, elles prouvent que la noix est aussi bonne pour le gosier que pour le corps.