La France, un pays pionnier
Posté par francesca7 le 27 novembre 2015
Le législateur français reconnaît depuis longtemps l’usage d’un nom géographique pour identifier et protéger des contrefaçons un produit dont le caractère est lié à un terroir et à un savoir-faire. Le concept d’Appellation d’origine contrôlée (AOC) sur lequel repose cette réglementation s’est forgé peu à peu – et souvent dans la douleur – à travers les multiples crises viticoles qui s’égrènent au début du XXe siècle.
La loi de 1919 fait émerger la notion d’appellation d’origine et l’associe à un droit collectif de propriété, sans qu’une définition légale n’en soit donnée ; elle reconnaît officiellement les syndicats de défense de l’appellation. Le décret-loi de 1935 enfin, par la création d’un Comité qui deviendra l’Institut national des appellations d’origine (INAO) en 1947, constitue le fondement des Appellations d’origine contrôlée. Désormais, aucune AOC viticole ne pourra voir le jour si le Comité n’a pas pris une décision favorable, en approuvant un texte la définissant. La loi du 2 juillet 1990 élargit l’Appellation d’origine contrôlée à l’ensemble du secteur agroalimentaire et la fait reposer sur les mêmes règles. Un règlement communautaire La mise en place du marché unique, ouvrant les frontières et donnant l’opportunité aux producteurs des différents pays de l’Union Européenne de vendre librement leurs produits aggravait les risques de détournement de nom.
Cela posait le problème du devenir de ces productions « de qualité particulière » et, plus largement, de celles qui sont spécifiques à chaque pays. C’est dans ce contexte général que le Conseil des Communautés Européennes arrêta le 14 juillet 1992 deux règlements relatifs, l’un à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine, l’autre aux attestations de spécificité des produits agricoles et des denrées alimentaires.
L’Appellation d’origine protégée (AOP) et l’Indication géographique protégée (IGP) assurent la protection d’une relation à un lieu. Elles désignent toutes deux « le nom d’une région, d’un lieu déterminé ou dans des cas exceptionnels, d’un pays, qui sert à désigner un produit agricole ou une denrée alimentaire originaire de cette région, de ce lieu déterminé ou de ce pays ». Dans le cas de l’AOP, « la qualité ou les caractères sont dus essentiellement ou exclusivement au milieu géographique comprenant les facteurs naturels et humains, et la production, la transformation et l’élaboration ont lieu dans l’aire géographique délimitée ».
Cette définition est très proche de celle de l’AOC. Dans le cas de l’IGP « une qualité déterminée, la réputation ou une autre caractéristique peut être attribuée à cette origine géographique et la production et/ou la transformation et/ou l’élaboration ont lieu dans l’aire géographique délimitée ». La philosophie de l’AOP est de protéger, à travers un nom, un produit unique et non reproductible dans un autre terroir. L’ensemble du processus de production doit se faire dans une seule et même zone dont il faut démontrer la cohérence et l’influence vis-à-vis des caractéristiques du produit. L’IGP, qui protège aussi un nom géographique, se fonde plutôt sur la réputation du produit, sur son histoire, liée à celle d’une localité, et sur des caractéristiques ou des qualités particulières. Elle n’impose pas une zone unique où doit se dérouler l’ensemble des opérations : les matières premières en particulier peuvent provenir d’ailleurs
Label rouge et Certification de produit
Le Label rouge a été créé en France dans le cadre de la loi d’orientation agricole du 5 août 1960.
Il atteste qu’un produit possède un ensemble distinct de qualités et caractéristiques spécifiques préalablement fixées dans un cahier des charges et établissant un niveau de qualité supérieur.
La Certification de conformité produit (CCP) date de 1990 et atteste qu’une denrée alimentaire est conforme à des caractéristiques spécifiques ou à des règles préalablement fixées portant sur la fabrication, la transformation ou le conditionnement.
Label rouge et Certification de conformité sont des démarches volontaires coûteuses et complexes. Depuis la loi d’orientation agricole du 5-01-2006 la Certification de conformité produit est devenue Certification de produit et n’est plus un signe de qualité géré par l’Etat, en revanche il reste sous sa responsabilité.
Le terroir Attesté dès le début du XIIIe siècle, le « terroir » est d’abord synonyme d’espace de terre, de territoire, dont il serait une altération linguistique. Le concept va se préciser scientifiquement dès la fin du XIXe dans le cadre de l’émergence de la pédologie, instaurant la notion de vocation des sols. Le terroir est alors donné comme immanent. Il est préexistant à l’homme qui ne fait qu’en révéler les potentialités. Dans Le paysage et la vigne (1990), Roger Dion, prenant l’exemple des terroirs viticoles, relativise le poids des facteurs d’ordre pédologique. Il fait remarquer que la qualité des vins est l’expression d’un milieu social et de ce qu’il appelle le « vouloir humain ». Ainsi ce sont les incessantes allées et venues entre l’agrosystème, le produit et l’homme qui aboutissent à « la subtile dialectique entre le complexe écologique et le complexe historico-économique », pour reprendre l’expression de Georges Bertrand (1975) dans l’Histoire écologique de la France rurale. Le terroir apparaît comme un concept polysémique. Selon qu’il intègre ou non la dimension humaine, il renvoie à l’épaisseur du temps et donne un autre sens à la relation au lieu. Le vocable n’existe pas en tant que tel dans les autres pays européens. Les Italiens parlent de « produtti tipici » ou « nostri » (de chez nous), les Espagnols de « productos de la tierra ».
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