Les trois Simone
Posté par francesca7 le 28 août 2015
Il me paraît impossible d’imaginer pour l’Europe une renaissance qui ne tienne pas compte des exigences que Simone Weil a définies. »
C’est Albert Camus qui l’affirme à propos de Simone Weil, née le 5 décembre 1909. Soeur du célèbre mathématicien André Weil, élève du philosophe Alain, normalienne et agrégée de philosophie, elle a laissé une oeuvre considérable, bien que la tuberculose l’ait emportée à trente-quatre ans. Sa pensée tient dans la conviction qu’il faut réhabiliter le rôle de l’individu dans la société dominée par les machines et les choses. Issue d’une famille bourgeoise, elle veut connaître de l’intérieur la condition ouvrière, au point de se faire embaucher aux usines Renault en 1935.
Engagée aux côtés des républicains et des anarchistes en Espagne en 1936, elle doit rentrer en France à cause d’une blessure. Pendant la guerre, elle trouve refuge aux États-Unis puis à Londres où elle ne peut s’entendre avec les gaullistes. Elle meurt le 24 août 1943, au sanatorium d’Ashford. Ses oeuvres complètes sont publiées en 1988. Simone de Beauvoir est née le 9 janvier 1908 à Paris. Agrégée de philosophie, elle a partagé la vie de Jean-Paul Sartre.
Si elle partage avec lui les convictions existentialistes, elle enracine son expérience d’écriture dans le concret, dans l’autobiographie qui lui permet de conduire une réflexion directe sur le vécu. En 1949, la parution de son oeuvre Le Deuxième Sexe crée une onde de choc : elle y démonte de façon énergique et engagée l’idée de la prétendue infériorité naturelle de la femme. Le Deuxième Sexe devient l’ouvrage de référence du mouvement féministe dans le monde entier.
Simone de Beauvoir soutient Sartre dans ses activités politiques, voyage beaucoup, poursuit son action pour la libération de la femme. Elle est l’une des premières à prôner la libéralisation de l’avortement. Elle obtient en 1954 le prix Goncourt pour son roman Les Mandarins. Simone de Beauvoir est morte à Paris le 14 avril 1986.
Il reviendra à une autre Simone d’obtenir, en 1975, une loi sur l’interruption volontaire de grossesse : Simone Veil (avec un V, et non un W). Née le 13 juillet 1927, à Nice, Simone Jacob est arrêtée en mars 1944 par la gestapo et déportée à Auschwitz avec sa mère qui y mourra ainsi que l’une de ses soeurs.
Libérée au camp de Bergen-Belsen en 1945, elle revient en France. En octobre 1946, elle épouse Antoine Veil, futur collaborateur de Michel Debré. Après une carrière dans la magistrature, Simone Veil occupe le poste de ministre de la Santé de 1974 à 1979. Elle devient ensuite la première présidente du Parlement européen, jusqu’en 1982. Ministre d’État de 1993 à 1995, elle prend en charge les Affaires sociales, la Santé et la Ville. Depuis 1998, Simone Veil est membre du Conseil constitutionnel.
Simone de Beauvoir, Simone Weil et Simone Veil. Trois femmes qui, par leurs convictions et leurs combats, marquèrent la France du XXe siècle.
Elles ont toutes trois le même prénom et répondent à ce même engagement et militantisme pour une France plus juste, plus égalitaire, marquant ainsi de leur empreinte avant-gardiste le XXe siècle. L’une, compagne de Sartre, est la figure emblématique du féminisme; l’autre, un « brin » anarchiste, pointe du doigt l’existentialisme pur alors que la dernière, toujours en fonction, obtient la loi sur l’interruption volontaire de grossesse en France.
De 1908 à aujourd’hui, (re)découvrez ces trois Simone…
Simone de Beauvoir (1908-1986)
Agrégée de philosophie, Simone de Beauvoir est l’auteure, notamment, du Deuxième Sexe, une œuvre controversée dès sa parution en 1949. Par des mots forts et percutants tels que: « Personne n’est plus arrogant envers les femmes, plus agressif ou méprisant, qu’un homme inquiet pour sa virilité », l’œuvre démontre l’absurdité de la prétendue infériorité de la femme et devient très vite l’ouvrage de référence du mouvement féministe dans le monde entier – un livre vendu à plus de 22 000 exemplaires dès la première semaine, au grand dam du Vatican.
La compagne de Jean-Paul Sartre devient vite la figure de proue du féminisme – un rôle qu’elle adoptera à merveille tout au long de sa vie à travers divers combats pour la libération de la femme aux quatre coins du monde, ce qui lui vaut une reconnaissance internationale en tant que féministe engagée du XXe siècle. Tour à tour philosophe, militante, essayiste, écrivaine et romancière, elle reçoit le prix Goncourt en 1954 pour son romanLes Mandarins; une oeuvre parmi d’autres: L’Invitée (1943), La Force de l’âge(1960) ou encore Une mort très douce (1964), paraît-il, le préféré de Sartre.
Après une vie de militantisme sans limite inspirant bon nombre de monuments érigés en sa mémoire, celle que Sartre surnommait Castor est morte le 14 avril 1986 à l’âge de 78 ans.
Simone Weil (1909-1943)
« Il me paraît impossible d’imaginer pour l’Europe une renaissance qui ne tienne pas compte des exigences que Simone Weil a définies » écrit Albert Camus, plusieurs années après la mort de cette dernière, à l’âge de 34 ans. Une courte vie durant laquelle elle a lutté contre la misère sociale et défendu le rôle de l’individu dans une société dominée par les choses et les machines.
Née le 3 février 1909, la sœur du célèbre mathématicien André Weil est agrégée de philosophie en 1931. Elle enseigne durant quatre ans dans divers lycées. Son ami, le philosophe Gustave Thibon, dit à propos de la jeune femme: « Elle vivait la distance désespérante entre « savoir » et « savoir de toute son âme » et sa vie n’avait pas d’autre but que d’abolir cette distance. » Ainsi, bercée par cette quête permanente du « savoir », et ce malgré sa santé défaillante, elle se fait embaucher dans les usines Renault – elle, issue d’une famille bourgeoise! – afin de connaître la vie ouvrière. Puis, engagée dans les mouvements républicain et anarchiste, elle se rend en Espagne où elle s’oppose au coup d’État de Franco. Pendant la guerre, elle trouve refuge aux États-Unis puis à Londres, d’où elle travaille comme rédactrice pour France Libre.
Elle succombe à la tuberculose le 24 août 1943, au sanatorium d’Ashford, laissant derrière elle une œuvre considérable, axée principalement sur la condition humaine. Ses œuvres complètes sont publiées en 1988.
Simone Veil, la femme préférée des Français
Alors qu’une Simone (de Beauvoir) est l’une des premières à prôner le droit à l’avortement, une autre Simone (Veil, avec un V et non un W) fait adopter la « loi Veil » qui autorise l’avortement en France. Nous sommes en 1975, elle est alors ministre de la Santé.
Née Simone Jacob, le 13 juillet 1927 à Nice, la femme préférée des Français (selon un sondage réalisé en 2010 par l’Ifop) a parcouru un chemin que l’on peut qualifier d’épique: déportée à Auschwitz, rescapée de la Shoah, elle s’est imposée comme une ardente militante européenne. Petit tour d’horizon des prouesses de cette dame dont l’avenir lui fut présenté comme incertain, alors qu’elle perdait sa mère et l’une de ses sœurs dans les camps: ministre de la Santé de 1974 à 1979, elle devient ensuite la première femme à présider le parlement Européen, jusqu’en 1982 ; ministre d’État de 1993 à 1995, elle prend en charge les affaire sociales, la Santé et la Ville; de 1998 à 2007, elle est membre du Conseil constitutionnel. Ajoutons au palmarès de cette grande dame la Présidence d’honneur de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, sa distinction de Grand officier de la Légion d’honneur ou encore sa récente élection à l’Académie française.
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