Carrier et ses mariages républicains
Posté par francesca7 le 11 juillet 2015
» Ce monstre est d’une taille assez avantageuse. Il est presque tout en jambes et en bras. Il a le dos voûté, le visage oblong et d’un caractère très prononcé. Son nez aquilin rend encore son regard plus affreux ; son teint est d’un brun cuivré ; il est maigre et nerveux. Quand il est à la tribune et un peu animé, il semble tirer son discours de ses entrailles déchirées, prononçant les R comme un tigre qui gronde« .
Ce portrait de Jean-Baptiste Carrier est écrit par le journaliste Fréron. Il faut ajouter que Carrier, depuis sa jeunesse, est atteint d’alcoolisme chronique. En juin 1793, il est envoyé à Rennes, puis, en octobre, à Nantes.
On lui a ordonné de nettoyer les prisons surchargées de cette ville, parce que, dit-on, les Anglais vont arriver ! Alors il imagine – ou approuve – un procédé radical qu’il appelle la déportation verticale. En effet, au lieu de la déportation vers les îles lointaines, il fait embarquer les condamnés sur des barques à fonds plats qui sont coulées au milieu de la Loire. Les premiers exécutés de la sorte sont des prêtres.
Certains d’entre eux s’agrippent au bateau qui les a conduits au lieu du supplice. Leurs bourreaux, parmi lesquels certains reconnaissent leurs anciens paroissiens, leur coupent les mains. Des milliers d’hommes, de femmes, d’enfants périssent dans ce que Carrier appelle la « baignoire nationale ».
Pour se distraire, il fait lier face à face, avant de les noyer, un homme et une femme étrangers l’un à l’autre, nus. Il appelle cette mise en scène le mariage républicain. Il fait fusiller dans la plaine de Gigant près de Nantes, guillotiné sur la place du Bouffay ; il s’installe à la fenêtre de son appartement et parfois, en prenant son café, ivre, fait un signe d’adieu aux condamnés. Rappelé à Paris, Carrier sera guillotiné le 16 décembre 1794.
Carrie J.B Fils de Jean Carrier et de Marguerite Puex, il est le troisième enfant de cette famille composée de trois filles et de trois garçons. Il épouse le 4 octobre 1785 Françoise Laquairie. En 1784, Jean-Baptiste Carrier, à force de travail, parvient à obtenir la place de procureur à Aurillac, mais son office est supprimé en 1789.
En 1790, il est conseiller pour le bailliage d’Aurillac.
Jules Michelet a recueilli, des dizaines d’années après la Révolution, de nombreux témoignages sur Carrier qu’il évoque dans son Histoire de la Révolution française. Surnommé par Michelet le « missionnaire de la Terreur », il a laissé un souvenir sanglant dans la ville de Nantes et ses environs. La maladresse politique et les excès rhétoriques de Carrier, autant que sa brutalité, lui ont assuré sa réputation sanguinaire : cependant d’autres envoyés de la Convention, tels Fouché ou Collot d’Herbois à Lyon, furent responsables de massacres tout aussi considérables sans que la postérité les juge aussi sévèrement.
Tous ces jugements se sont appuyés sur la propagande qui naît au moment du procès des 132 Nantais (94 survivent) qui sont acquittés par le tribunal révolutionnaire et qui est le déclenchement des procès du Comité révolutionnaire de Nantes puis de Carrier. La campagne qui se déroule est orchestrée par un certain nombre de révolutionnaires désireux de faire oublier leur propre rôle, comme Fouché à Lyon. C’est Fouché qui finance Babeuf auteur d’un pamphlet peu lu en fait en 1794, mais qui est repris au xxe siècle, dénonçant le « populicide » vendéen. Carrier fait front et attaque la Convention, à la différence de Fouché, de Barras ou d’autres « terroristes » qui se font oublier. Cette attitude le conduit à l’échafaud et sa mémoire envahit l’imaginaire français. Nantes et la Loire deviennent les exemples les plus connus de la terreur et Carrier devient un adepte du robespierrisme alors qu’il était hostile à Robespierre.
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.