Martin, un saint comme on n’en fait plus
Posté par francesca7 le 4 juin 2015
Amiens, Janvier 336, il gèle à pierre fendre !
Martin qui est né en Pannonie, l’actuelle Hongrie, et qui est devenu soldat à quinze ans, sert en Gaule. À la porte de la cité, il rencontre un pauvre nu. Martin, chrétien convaincu, a déjà distribué tout ce qu’il a en cours de route, il ne lui reste que son manteau. Il se saisit alors de son épée, et coupe son vêtement chaud en deux, donnant au pauvre de quoi se vêtir – et l’autre moitié alors, il ne pouvait pas la donner ?
Non ! Elle appartenait à l’armée romaine dont il faisait partie ; généreux, Martin, pas voleur ! La nuit même, le Christ lui apparaît en songe : c’était lui le pauvre nu qu’il a secouru ! L’affaire se sait et voilà Martin déjà vénéré comme un saint.
Martin est baptisé à Amiens. Il s’emploie à persuader les paysans que leurs arbres sacrés et leurs temples doivent être remplacés par le culte chrétien. Ceux-ci un jour, pour se venger, l’attachent à un sapin. En face, ils en abattent un autre qui doit logiquement écraser notre saint ficelé ! Mais miracle : le sapin coupé vacille, se redresse et va tomber de l’autre côté. Cela se sait encore, et voilà Martin presque divinisé !
Mais, un jour, à Candes, au confluent de la Vienne et de la Loire, Martin meurt comme tout le monde ! Les moines de Ligugé et ceux de Marmoutier, villes où il avait fondé des monastères, se disputent sa dépouille. Ce sont les Tourangeaux qui l’emportent, Martin ayant été évêque de Tours. Cela se déroule au début de novembre 397.
Alors survient un phénomène étonnant : au passage de la dépouille de Martin, les arbres reverdissent, des roses s’épanouissent, la nature refleurit tout à coup ! Et chaque année la nature se souvient de ce miracle et nous offre… l’été de la Saint-Martin ! On inhuma Martin le 11 novembre, et on prit soin d’installer sa cape (la moitié restante – et romaine – du manteau donné au pauvre) dans un sanctuaire qu’on nomma tout simplement capella. Et puis le mot capella a donné naissance au mot « chapelle ». Tout simplement !
Saint Martin de Tours, aussi nommé Martin le Miséricordieux – Dans la région des Alpes, il fut un jour attaqué par des brigands. L’un des voleurs lui demanda s’il avait peur. Martin lui répondit qu’il n’avait jamais eu autant de courage et qu’il plaignait les brigands. Il se mit à leur expliquer l’évangile. Les voleurs le délivrèrent et l’un d’eux demanda à Martin de prier pour lui.
La Chrétienté est alors déchirée par des courants de pensée qui se combattent violemment et physiquement ; les ariens sont les disciples d’un prêtre, Arius qui nie que le Christ soit Dieu fils de Dieu au contraire des trinitaires de l’Église romaine ; à cette époque les ariens sont très influents auprès du pouvoir politique. Alors que Hilaire, un trinitaire, victime de ses ennemis politiques et religieux tombe en disgrâce et est exilé, Martin est averti « en songe » qu’il doit rejoindre ses parents en Illyrie afin de les convertir. Il réussit à convertir sa mère mais son père reste étranger à sa foi ; cette position peut du reste n’être que tactique, le père essayant de défendre son statut social privilégié.
En Illyrie c’est la foi arienne qui est la foi dominante et Martin qui est un fervent représentant de la foi trinitaire doit sans doute avoir de violentes disputes avec les ariens car il est publiquement fouetté puis expulsé. Il s’enfuit et se réfugie à Milan mais là aussi les ariens dominent et Martin est à nouveau chassé. Il se retire en compagnie d’un prêtre dans l’île déserte de Gallinara non loin du port d’Albenga et se nourrit de racines et d’herbes sauvages. Martin s’empoisonne avec de l’hellébore et il s’en faut de peu qu’il ne meure.
En 360, avec les canons du concile de Nicée, les trinitaires regagnent définitivement leur influence politique et Hilaire retrouve son évêché. Martin en est informé et revient lui-même à Poitiers.
Alors âgé de 44 ans, il s’installe sur un domaine gallo-romain qu’Hilaire lui indique près de Poitiers. Martin y crée un petit ermitage, que la tradition situe à 8 km de la ville : l’abbaye de Ligugé où il est rejoint par des disciples. Il crée ici la première communauté de moines sise en Gaule. Ce premier monastère est le lieu de l’activité d’évangélisation de saint Martin pendant dix ans. Il accomplit ses premiers miracles et se fait ainsi reconnaître par le petit peuple comme un saint homme.
Il crée un nouvel ermitage à 3 km au nord-est des murs de la ville : c’est l’origine de Marmoutier avec pour règle la pauvreté, la mortification et la prière. Les moines doivent se vêtir d’étoffes grossières sur le modèle de saint Jean-Baptiste qui était habillé de poil de chameau. Ils copient des manuscrits, pêchent dans la Loire ; leur vie est très proche de ce que l’on peut lire dans les Évangiles sur la vie des premiers apôtres, jusqu’aux grottes qui abritent dans les coteaux de la Loire des habitations troglodytes où s’isolent des moines ermites.
Le monastère est construit en bois ; Martin vit dans une cabane de bois dans laquelle il repousse les « apparitions diaboliques et converse avec les anges et les saints » : c’est une vie faite d’un courage viril et militaire que Martin impose à sa communauté.
Tout ce monde voyage à travers les campagnes à pied, à dos d’âne et par la Loire ; car Martin est toujours escorté de ses moines et disciples, sans doute en grande partie pour des raisons de sécurité car il ne manque pas de voyager très loin de Tours. Ailleurs l’autorité de l’évêque est limitée à l’enceinte de la cité, avec Martin elle sort des murs et pénètre profondément à l’intérieur des terres. Martin semble avoir largement sillonné le territoire de la Gaule ; là où il n’a pas pu aller, il a envoyé ses moines.
À cette époque les campagnes sont païennes, il les parcourt donc faisant détruire temples et idoles. Il fait par exemple abattre un pin sacré.
Il prêche avec efficacité les paysans, forçant le respect par l’exemple et le refus de la violence. Il prêche par la parole et par sa force, il sait parler aux petits et il utilise à merveille la psychologie par sa connaissance des réalités quotidiennes et l’utilisation de paraboles simples que le petit peuple comprend, tel que le Christ le faisait : ainsi il dit d’une brebis tondue « qu’elle accomplit le précepte de l’évangile basé sur le partage ».
Il remplace les sanctuaires païens par des églises et des ermitages et comprenant fort bien l’homme de la campagne et ses besoins, il se donne les moyens de le convertir alors que la foi chrétienne est encore essentiellement urbaine.
Marmoutier sert de centre de formation pour l’évangélisation et la colonisation spirituelle des campagnes ; c’est pour l’essentiel la première base de propagation du christianisme en Gaule.
Martin de Tours est présent à Trèves lorsque les évêques d’Espagne Hydace et Ithace demandent à l’empereur Maxime la condamnation de Priscillien. Celui-ci est condamné (pour motifs civils) au chef de magie. Rejoint par Ambroise de Milan (délégué par le jeune empereur Valentinien II), Martin demande la grâce pour Priscillien. Bien qu’Ambroise, menacé de mort par l’empereur, ne le soutienne pas, Martin obtient que les disciples de Prisicillien ne soient pas poursuivis. Le pape Sirice s’élevera contre les procédés de Maxime.
Par la suite, Martin de Tours refusa toujours de participer aux assemblées épiscopales, ce qui, avec ses efforts pour sauver de la mort Priscillien, le fit suspecter d’hérésie. L’empereur Théodose Ier déclara nulles les décisions de Maxime dans cette affaire ; Ithace sera déposé quelques années plus tard, et Hydace démissionnera de lui-même de sa charge.
Marmoutier comptait 80 frères vivant en communauté, issus pour la plupart de l’aristocratie ce qui permettait à Martin de jouir d’une grande influence et de se faire recevoir par les empereurs eux-mêmes. Il existe désormais une complicité entre les empereurs et les évêques, entre le pouvoir de la nouvelle foi et le pouvoir politique. Mais cela n’empêche pas Martin, à la table de l’empereur, de servir en premier le prêtre qui l’accompagne et d’expliquer que le sacerdoce est plus éminent que la pourpre impériale.
Un jour, voyant des oiseaux pêcheurs se disputer des poissons, il explique à ses disciples que les démons se disputent de la même manière les âmes des chrétiens. Et les oiseaux prirent ainsi le nom de l’évêque ; ce sont les martins-pêcheurs.
Au soir de sa vie, sa présence est requise pour réconcilier des clercs à Candes sur Loire, à l’ouest de Tours ; l’urgence de l’unité de l’Église fait que malgré sa vieillesse, il décide de s’y rendre. Son intervention est couronnée de succès, mais le lendemain, épuisé par cette vie de soldat du Christ, Martin meurt à Candes, à la fin de l’automne, le 8 novembre 397 sur un lit de cendre comme mouraient les saints hommes ; disputé entre Poitevins et Tourangeaux, son corps est subtilisé par ces derniers et rapidement reconduit par le fleuve jusqu’à Tours où il est enterré le 11 novembre.
Une légende veut que les fleurs se soient mises à éclore en plein novembre, au passage de son corps sur la Loire entre Candes et Tours. Ce phénomène étonnant donnera naissance à l’expression « été de la Saint-Martin » ou l’été des Indiens (expression d’origine américaine)
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