• BONJOUR A TOUS ET

    bienvenue (2)

     CHEZ FRANCESCA 

  • UN FORUM discussion

    http://devantsoi.forumgratuit.org/

    ............ ICI ............
    http://devantsoi.forumgratuit.org/

  • téléchargement (4)

  • Ma PAGE FACEBOOK

    facebook image-inde

    https://www.
    facebook.com/francoise.salaun.750

  • DECOUVERTES !

    petit 7

  • BELLE VISITE A VOUS

    aniv1

    PETITS COINS DE PATRIMOINE QUI SERONT MIS EN LUMIERE AU DETOUR DE NOTRE REGION DE FRANCE...

  • Cathédrale St-Etienne-Auxerre

    St-Etienne Cathédral, Auxerre

    « La restauration est une opération qui doit garder un caractère exceptionnel. Elle a pour but de conserver et de révéler les valeurs esthétiques et historiques du monument et se fonde sur le respect de la substance ancienne et de documents authentiques. Elle s’arrête là où commence l’hypothèse, sur le plan des reconstitutions conjecturales, tout travail de complément reconnu indispensable pour raisons esthétiques ou techniques relève de la composition architecturale et portera la marque de notre temps. » citation Charte de Venise, art. 9, ICOMOS, 196.

  • M

    JE SUIS ORIGINAIRE MOI-MEME DE LA BOURGOGNE....

  • FRANCE EN IMAGES

    G

    « Un monument restauré traduit les connaissances, les ambitions, les goûts, non seulement du maître d’oeuvre mais aussi du maître d’ouvrage : c’est le vrai révélateur de l’appréhension des édifices par une génération donnée, qui leur permet de reconnaître pour sien un édifice centenaire. » citation de Françoise Bercé.

  • amis

  • Méta

  • amis

  • Architecture Française

    5

  • Artisanat Français

    1

  • A

  • amour-coeur-00040

  • montagne

    Tout devient patrimoine : l'architecture, les villes, le paysage, les bâtiments industriels, les équilibres écologiques, le code génétique.

  • 180px-Hlézard1

  • Patrimoine Français

    3

    Citation sur la France.
    !!!!
    La France, je l'aime corps et biens, en amoureux transi, en amant comblé. Je la parcours, je l'étreins, elle m'émerveille. C'est physique. Pour l'heure, c'est le plus beau pays du Monde, le plus gracieux, le plus spirituel, le plus agréable à vivre. En dépit de ses défauts, le peuple français a des réserves inépuisables de vigueur, d'astuce et de générosité. j'écris cela en toute connaissance de la déprime qui périodiquement enténèbre nos compatriotes. Ils ont une pente à l'autodénigrement, une autre au nihilisme. Je suis français au naturel et j'en tire autant de fierté que de volupté. J'ai pour ce vieux pays l'amour du preux pour sa gente dame, du soudard pour la servante d'auberge, de l'érudit pour ses grimoires, du paysan pour son enclos, du bourgeois pour ses rentes, du croyant des hautes époques pour les reliques de son saint patron... J'ai la France facile, comme d'autres ont le vin gai ; je l'ai au coeur et sous la semelle de mes godasses. Je suis français, ça n'a pas dépendu de moi et ça n'a jamais été un souci. Ni une obsession. Toujours un bonheur...

    Dictionnaire amoureux de la France - Denis Tillinac.

  • a bientot

À table Louis-Dieudonné

Posté par francesca7 le 30 juin 2015

 

 Louis_XIV_by_Juste_d'EgmontMidi ! Le roi s’installe devant sa petite table carrée, dans sa chambre, face à la fenêtre. La foule des courtisans est accourue, elle n’a rien dans l’estomac, elle !

Elle va se nourrir du spectacle du monarque attrapant de ses mains prestes les viandes qui vont être portées à sa bouche avec une gourmandise gloutonne inégalable. Point de fourchette, ça se passe comme ça chez Louis XIV ! Et pourtant, ce n’est pas une restauration rapide : près de 400 personnes ont préparé le repas royal qui va être convoyé jusqu’à la table à grands renforts de fifres, de tambourins, de maîtres d’hôtel, de gentilshommes servants, de gentilshommes tranchants, d’écuyers, d’échansons…

Et que mange le roi ? Retenez un instant votre souffle… Devant vous, le roi va manger – en partie, mais quand même ! – du potage de tortue, de la bisque de pigeonneaux, du potage de mouton aux navets, de la queue de mouton aux figues, de la cuisse de chevreuil, du poulet d’Inde à la framboise, du cochon à la dombe, du poupeton – du ris de veau avec des crêtes de coq et de la viande hachée – ; du héron, du faisan, de la gelinotte, du dos de sanglier, du faon, du héron ; voici les entremets, c’est-à-dire ce qui est servi entre les mets plus copieux : de la tétine de vache, de l’oreille de cerf, du foie de chevreuil, des beignets de moelle !

 Attendez, ce n’est pas terminé, il reste le dessert !

On apporte des confitures au parfum, des tourtes au musc, de la crème à l’ambre, des pralines. Fin du repas du midi. Le roi mangera-t-il ce soir ? Bien sûr, à dix heures : douze pigeons, trois chapons, six poulets, du veau, des poulardes, un faisan, des perdrix… Tout cela est arrosé des vins les plus fins ! Et presque tous les matins, Louis se plaint d’avoir fait des cauchemars dans la nuit !

 

Louis XIV dit Louis le Grand ou le Roi-Soleil, né le 5 septembre 1638 à Saint-Germain-en-Laye et mort le 1er septembre 1715 à Versailles, est un roi de France et de Navarre. Il règne sur le royaume de France du14 mai 1643 à sa mort le 1er septembre 1715.

Né Louis-Dieudonné, il monte sur le trône de France au décès de son père Louis XIII, le 14 mai 1643, quelques mois avant son cinquième anniversaire. Il est le 64e roi de France, le 44e roi de Navarre et le troisième roi de France issu de la dynastie des Bourbons. Son règne de 72 ans est l’un des plus longs de l’histoire d’Europe, et le plus long de l’Histoire de France.

À table Louis-Dieudonné dans FONDATEURS - PATRIMOINEIl marque l’apogée de la construction séculaire d’un absolutisme de droit divin. Après une minorité troublée par la révolte de la Fronde de 1648 à 1653, Louis XIV assume personnellement le gouvernement à la mort du cardinal Mazarin en 1661 en ne prenant plus de ministre principal. Son autorité se déploie avec la fin des grandes révoltes nobiliaires, parlementaires, protestantes et paysannes qui avaient marqué les décennies précédentes. Le monarque impose l’obéissance à tous les ordres et contrôle les courants d’opinion (y compris littéraires ou religieux), parmi lesquels le jansénisme à partir de 1660 et le protestantisme au travers de la révocation de l’édit de Nantes en 1685. Louis XIV construit un État centralisé, où son rôle direct est encore accentué après le décès des ministres Colbert en 1683 et Louvois en 1691.

Par la diplomatie et la guerre, il accroît sa puissance en Europe, en particulier contre les Habsbourg. Sa politique du « pré carré » cherche à agrandir et rationaliser les frontières du pays, protégée par la « ceinture de fer » de Vauban qui fortifie les villes conquises. Pour obtenir une prédominance économique, un effort de développement commercial et colonial est conduit, notamment par son ministre Colbert.

À partir de 1682, Louis XIV dirige son royaume depuis le vaste château de Versailles, modèle architectural de nombreux palais européens et dont il a dirigé la construction. Sa cour soumet la noblesse, étroitement surveillée, à une étiquette très élaborée. Le prestige culturel s’y affirme grâce au mécénat royal en faveur d’artistes tels que Molière, Racine, Boileau, Lully, Le Brun et Le Nôtre, ce qui favorise l’apogée du classicisme français, qualifié, dès son vivant, de « Grand Siècle », voire de « Siècle Louis XIV ».

Le soleil comme emblème

220px-1694_S_Nec_Pluribus_Impar dans FONDATEURS - PATRIMOINELouis XIV choisit pour emblème le soleil. C’est l’astre qui donne vie à toute chose mais c’est aussi le symbole de l’ordre et de la régularité. Il régna en soleil sur la cour, les courtisans et la France. En effet, les courtisans assistaient à la journée du roi comme à la course journalière du soleil. Il apparaît même déguisé en soleil lors d’une fête donnée à la cour.

Le Roi-Soleil domestiqua définitivement tous ceux qui lui contestaient le pouvoir en faisant de sa vie de monarque un théâtre perpétuel où tout, de son coucher à son lever, de ses repas à ses frasques amoureuses, de ses vêtements à ses animaux de compagnie, de ses divertissements à ses plaisirs intimes, était suivi par des courtisans anxieux.

Concernant une éventuelle tendance du souverain à l’égocentrisme, Mme de Maintenon rapportait que Louis XIV, qui avait eu à affronter en peu de temps les décès de plusieurs proches et membres de sa famille, notamment son fils, voyait ces évènements comme une affaire entre Dieu et lui, et qu’il se lamentait sur son propre sort. Elle expliqua : « Le roi était si habitué à ce que l’on vécut pour lui qu’il n’imaginait pas que l’on put mourir pour soi ».

Il fut un amateur fervent de la danse, du spectacle de ballets et du jeu de paume et comme presque tous ses ancêtres, un passionné de chasse et d’équitation. Cela fut surtout vrai dans sa jeunesse car s’il a pu paraître robuste et insensible à la fatigue, ne se plaignant ni du chaud ni du froid, ni de la pluie ni de la grêle et feignait de s’étonner qu’on puisse en souffrir, Louis XIV fut avant tout un homme d’une grande endurance physique et morale. Et s’il eut un règne d’une longueur exceptionnelle, il fut paradoxalement toute sa vie d’une santé déficiente et maintes fois mise en péril, aussi fut-il suivi quotidiennement par cinq médecins, Jacques Cousinot de 1643 à 1646, François Vautier en 1647, Antoine Vallot de 1648 à 1671, Antoine d’Aquin de 1672 à 1693, enfin Guy-Crescent Fagon jusqu’à la mort du roi, tous usant et abusant de la saignée, des purgations et des lavements auxclystères (le roi ayant reçu plus de 5 000 lavements en 50 ans). Par ailleurs, comme l’expliquent des notes sanitaires, il eut de nombreux ennuis peu « royaux ». Ainsi, il arriva à Louis d’avoir fort mauvaise haleine à cause de ses ennuis dentaires apparus en 1676 selon le journal de son dentiste Dubois : il arrivait alors à ses maîtresses de placer un mouchoir parfumé devant leur nez (et ce d’autant plus que le roi ne supportait pas les parfums, à l’exception de la fleur d’oranger) et en 1685, alors qu’on lui arrachait un des nombreux chicots de son maxillaire gauche, une partie de son palais fut arrachée, provoquant une « communication bucco-nasale ».

Sa psychologie présentait des tendances mégalomanes comme en témoignent sa grande collection de chaussures de ballet ornées de rubans somptueux dont certains témoignages l’évaluait à 2 500 paires. Il avait une obsession pour sa vaste collection qui l’a porté toute sa vie à chercher la deuxième pièce d’une paire qui ne sera jamais reconstituée.

La lecture du journal de santé de ce monarque, minutieusement entretenu, est édifiante : il se passe peu de jours sans que le souverain soit l’objet d’une purgation, d’un lavement, d’un emplâtre, d’une pommade ou d’une saignée.  

Si l’on veut connaître en détail de quelle manière, sous Louis XIV, une maîtresse de maison ordonnait le service de sa table les jours où elle avait des invités, il faut lire les ouvrages spéciaux du temps.

Parmi ceux-ci, il en est un, publié en 1655, dont le succès fut immense, écrit par Nicolas de Bonnefons, valet de chambre du roi, et intitulé : Les délices de la campagne, où est enseigné à préparer pour l’usage de la vie tout ce qui croît sur terre et dans les eaux. On y découvre par exemple l’instruction pour une table d’une dimension à peu près égale à celle que représente la gravure reproduite ici.

« La grande mode est de mettre quatre beaux potages dans les quatre coins, et quatre porte-assiettes entre deux, avec quatre salières qui toucheront les bassins des potages en dedans. Sur les porte-assiettes on mettra quatre entrées dans des tourtières à l’italienne ; les assiettes des conviés seront creuses aussi, afin que l’on puisse se représenter du potage, ou s’en servir à soi-même ce que chacun désirera manger, sans prendre cuillerée à cuillerée dans le plat, à cause du dégoût que l’on peut avoir les uns des autres, de la cuiller qui, au sortir de la bouche, puiserait dans le plat sans l’essuyer. » Cette recommandation est assez singulière et prouve que, même dans les grandes maisons, en plein dix-septième siècle, lorsque l’on prenait le repas en famille ou entre amis, tous les conviés puisaient le potage à même la soupière ; en un mot, on mangeait encore à la gamelle.

« Le second service, poursuit notre auteur, sera de quatre fortes pièces dans les coins, soit court-bouillon, la pièce de boeuf, ou du gras rôti, et, sur les assiettes, les salades. Au troisième service, la volaille et le gibier, rôti, sur les assiettes le petit rôti, et ainsi tout le reste. Le milieu de la table sera laissé vide, d’autant que le maître d’hôtel aura peine à y atteindre, à cause de sa largeur ; si l’on veut remplir, on y pourra mettre les melons, les salades différentes, dans un bassin, sur de petites assiettes, pour la facilité de se les présenter, les oranges et citrons, les confitures liquides dans de petites abaisses de massepan, aussi sur des assiettes. » L’instruction pour les repas de cérémonie, les festins, donne une grande idée de la profusion et de la variété des mets en ces occasions.

« A une compagnie de trente personnes de haute condition, et que l’on voudra traiter somptueusement, je suis d’avis que l’on fasse dresser une table d’autant de couverts à la distance l’un de l’autre l’espace d’une chaise, en mettant quatorze d’un côté, une au bout d’en haut et une ou deux au bas ; que la table soit large ; que la nappe traîne jusques à terre de tous côtés ; qu’il y ait plusieurs salières à fourchon et porte-assiettes dans le milieu pour poser des plats volants.

« - Premier service. A l’entrée de table, on servira trente bassins dans lesquels il n’y aura que des potages, hachis et panades ; qu’il y en ait quinze où les chairs paraissent entières, et, aux autres quinze, les hachis sur le pain mitonné ; qu’on les serve alternativement, mettant au haut bout d’un côté un bon potage de santé, et, de l’autre côté, un potage à la Reine fait de quelque hachis de perdrix ou faisan. Après, et dessous le potage de santé ou autre hachis sur les champignons, artichauts ou autres déguisements, et vis-à-vis une bisque. Sous l’autre hachis, un potage garni ; sous la bisque, une jacobine, ou autre, et ainsi alternativement jusques au bas bout, mettant toujours après un fort, un autre faible.

« - Second service. Il sera composé de toutes sortes de ragoûts, fricassées, court-bouillons, venaisons rôties et en pâte, pâtés en croûte feuilletée, tourtes d’entrée, jambons, langues, andouilles, saucisses et boudins, melons et fruits d’entrées… Le maître d’hôtel ne posera jamais un bassin chargé de grosses viandes devant les personnes plus considérables, à cause qu’il leur boucheroit la vue du service, et que cette personne seroit obligée de dépecer pour présenter aux autres.

220px-Traite-Pyrenees« - Troisième service. Il sera tout de gros rôti, comme perdrix, faisans, bécasses, ramiers, dindons, poulets, levrauts, lapins, agneaux entiers, et autres semblables ; avec oranges, citrons, olives, et saucières dans le milieu. – Quatrième service. Ce sera le petit rôti, comme bécassines, grives, alouettes, et fritures de toutes sortes, etc. – Cinquième service. Saumons entiers, truites, carpes, brochets, et pâtes de poissons, entremêlés de fricassées de tortues avec les écailles par-dessus, et des écrevisses.

« - Sixième service. Il sera de toutes sortes d’entremets au beurre et au lard, de toutes sortes d’oeufs, tant au jus de gigot qu’à la poêle, et d’autres au sucre, froids et chauds ; avec les gelées de toutes les couleurs et les blanc-mangers, en mettant les artichauts, cardons et céleri au poivre, dans le milieu, sur les salières. – Septième service. Il n’y faudra que des fruits, avec les crèmes et peu de pièces de four. On servira sur les porte-assiettes les amandes et les cerneaux pelés. – Huitième service. L’issue sera composée de toutes sortes de confitures liquides et sèches, de massepans, conserves et glacés, sur les assiettes, les branches de fenouil poudrées de sucre de toutes les couleurs, armées de cure-dents, et les muscadins ou dragées de Verdun dans les petites abaisses de sucre musqué et ambré.

« Le maître d’hôtel donnera ordre que l’on change les assiettes au moins à chaque service, et les serviettes de deux en deux. Pour desservir, il commencera à lever par le bas bout, et à mesure son second lèvera les assiettes, les salières et tout ce qui sera sur table, à la nappe près, finissant par le haut bout, où il donnera à laver, pendant que son second jettera les assiettes.

« J’ai écrit pour les hommes raisonnables, dit l’auteur en terminant, comme sont ceux qui s’ingèrent de la conduite des festins, qui est peut-être un des emplois les plus difficiles à mettre à exécution, de tous ceux auxquels l’homme s’applique, d’autant que l’on dépend de tant de sortes de gens, différents d’esprit et d’humeur, qu’il faut à poinct nommé, et à l’heure précise, que tout se rencontre ainsi que l’on l’a projeté ; et aussi que l’on est à la censure d’autres de plus grande condition, à qui leur peu d’appétit ou leur mauvaise humeur fera blâmer ce qui serait très agréable aux autres (qui, sur leur seul rapport de quelque plat, lequel ne leur semblera pas bon), n’oseront y goûter, crainte d’être obligés d’approuver ce qu’ils improuvent, ou bien de se dégoûter eux-mêmes, si par malheur l’assaisonnement ne se rencontrait pas être à leur goût. ».

Publié dans FONDATEURS - PATRIMOINE | Pas de Commentaire »

Vauban meurt d’une bronchite

Posté par francesca7 le 30 juin 2015

 

Vauban, avec sa cicatrice ronde sur la joue gauche due à un coup de mousquet reçu lors du siège de Douai[1]. Tableau attribué à Hyacinthe Rigaud.« Je perds un homme fort affectionné à ma personne et à l’État. » C’est Louis XIV qui s’exprime ainsi, à propos de celui qui vient de disparaître le 30 mars 1707, à l’âge de soixante-quatorze ans, après une mauvaise bronchite.

Cet homme à qui Louis XIV rend hommage s’appelle Sébastien Le Prestre de Vauban. Retiré des affaires – et ses affaires, c’était l’armée, la guerre, les sièges–, il a écrit un livre destiné au roi et qui propose une réforme totale du système de l’imposition, en supprimant les inégalités. Le livre n’a pas plu au roi, mais Vauban n’a pas été disgracié, et n’est pas mort d’avoir contrarié son souverain, ainsi qu’une légende tenace le fait toujours croire !

 À Vauban, on doit de remarquables fortifications tenant compte des progrès de l’artillerie. Cent vingt places fortes en bénéficient, dont beaucoup sont encore intactes aujourd’hui. « Ville fortifiée par Vauban, ville imprenable, ville assiégée par Vauban, ville prise », avait-on coutume de dire à son époque. Et c’était vrai ! Vauban a aussi introduit dans l’armée le fusil auquel il a fait ajouter la baïonnette (qui était déjà utilisée en Suède).

La réalité économique et sociale, il la connaît mieux que quiconque, parcourant sans cesse la France du nord au sud, de l’est à l’ouest pour surveiller ses constructions ou livrer quelque bataille. Son livre, Projet d’une dîme royale, est donc l’ouvrage d’un homme de bon sens qui aurait pu modifier le siècle à venir. Mais le roi Louis pour ses humbles sujets avait l’oreille si loin du coeur !

Gouverneur de Lille en 1668, brigadier en 1673, maréchal de camp en 1676, commissaire général des fortifications en 1678, lieutenant des armées du roi en 1688, Vauban n’accédera au maréchalat qu’en 1703. 

Ces titres ne rendent pas compte de son action sur le terrain ni de son sens politique. Cet ingénieur militaire est en effet à l’origine de l’aménagement de plus d’une centaine de places fortes situées aux frontières du royaume et au-delà, de la construction d’une trentaine d’enceintes nouvelles et de citadelles, comme celle de Lille, son premier grand projet urbanistique réalisé à partir de 1667. 

Bon connaisseur du royaume grâce à sa participation aux guerres et à ses incessants voyages aux frontières, Vauban fait part au roi de ses observations, critique sa politique et préconise des réformes : il signale ainsi dès 1686 les conséquences économiques de l’exode des protestants provoqué par la révocation de l’édit de Nantes et condamne cet acte arbitraire.

 

Économiste très préoccupé d’analyser les remèdes à la misère du peuple et les conditions économiques du maintien de la puissance française, il fait procéder en Flandre aux premiers recensements et, en 1696, fait réaliser une grande enquête statistique sur les paroisses de l’élection de Vézelay ; dans ses conclusions, il démontre la nécessité d’un allégement et d’une meilleure répartition de l’impôt, d’une simplification et d’une accélération des procédures judiciaires, de l’amélioration des rendements agricoles. 

En 1694, il a déjà présenté un projet de capitation, impôt que paieraient tous les Français ; dans sonProjet d’une dîme royale (imprimé secrètement en 1707, l’ouvrage ayant déplu à Louis XIV en raison de sa franchise de ton), il réclame une profonde réforme fiscale qui instituerait l’égalité de tous devant l’impôt : l’idée est de substituer à la multitude des taxes existantes (taille, aides, traites…) un impôt unique, pesant sur tous, égal au dixième du revenu. Décrivant la misère des classes populaires, victimes de la fiscalité royale galopante, la Dîme enseigne encore que le souverain doit égale protection à tous ses sujets ; que le travail est le principe de toute richesse, et que l’agriculture est le travail par excellence ; qu’il faut Ier_rue_Saint-Roch_n°1_plaque_Vauban_rwkéviter les emprunts ; que toutes les entraves apportées au commerce et à l’industrie sont nuisibles au pays ; que le menu peuple qu’on méprise et qu’on accable est le véritable soutien de l’État. Apprécié de Louis XIV comme ingénieur et homme de guerre (à 73 ans il est encore appelé à diriger les travaux de défense de Dunkerque [1706]),Vauban s’aliène la faveur royale par son activité réformatrice : le 14 février 1707, la Dîme royale est proscrite par un arrêt du conseil quelques semaines avant la mort du maréchal qui avait osé dénoncer les inconvénients de l’arbitraire royal et affirmer la nécessité de réformes institutionnelles profondes à l’instar de certains de ses contemporains, tel Fénelon.

 

Outre des ouvrages exclusivement militaires, dont les plus importants sont un Traité de l’attaque et de la défense des places (1739) et un Traité des mines (1740), Vauban a laissé une œuvre intitulée Oisivetés (1842-43), recueil de ses écrits militaires, scientifiques et économiques. Il fut reçu à l’Académie des sciences en 1699.

Publié dans FONDATEURS - PATRIMOINE | Pas de Commentaire »

Madame se meurt, Madame est morte

Posté par francesca7 le 30 juin 2015

 Henriette_dangleterreHenriette d’Angleterre ! Qu’elle est belle lorsque Louis XIV la redécouvre en 1661, le jour où elle se marie avec Monsieur, le frère du roi ! Louis avait dit à son frère qu’il se mariait avec un sac d’os ! Il conservait l’image de la fillette arrivée d’Angleterre où son père Charles Ier s’était fait décapiter. Elle était venue chercher refuge en France. Louis, lorsqu’il la revoit la trouve tellement belle qu’elle devient sa maîtresse, même si elle est sa cousine germaine.

Et pour cacher leur liaison, elle met en écran une superbe demoiselle d’honneur : Louise de la Vallière…

Revenons à Henriette : Louis XIV l’a envoyée en ambassade auprès de Charles II d’Angleterre : elle obtient un franc succès diplomatique ! À son retour, elle s’étourdit dans les fêtes, les bals, au grand désespoir de Monsieur, frère du roi, le parfumé fort jaloux que sa femme cherche aussi de la tendresse dans les bras du comte de Guiche, l’homme qu’il aime…

Elle fait bien de profiter du temps qui passe, Henriette qui atteint vingt-six ans. Le 29 juin 1670, au début de l’après-midi, elle est prise de douleurs atroces au côté. Elle boit un verre d’eau de chicorée, la douleur ne cesse de croître. Et dans la nuit, vers deux heures du matin, elle rend le dernier soupir, sans avoir cessé de souffrir. Fut-elle empoisonnée ? Non, l’autopsie a démontré qu’elle souffrait de graves affections ayant causé une péritonite.

Bossuet qui l’a assistée jusqu’à la fin, prononcera dans son oraison funèbre, le fameux : « O nuit désastreuse ! Ô nuit effroyable, où retentit tout à coup, comme un éclat de tonnerre, cette étonnante nouvelle : Madame se meurt, Madame est morte !… »

La princesse fut élevée dans le catholicisme au couvent de Chaillot par les sœurs de la Visitation. Ses premières années en France sont assez rudes pour une princesse de sang royal. La monarchie française est en train d’affronter le soulèvement de la Fronde, les caisses sont vides et la régente, Anne d’Autriche, a d’autres soucis que celui de s’occuper du bien-être de sa belle-sœur et de sa nièce. La petite Henriette passe donc avec sa mère des hivers pénibles dans l’appartement qui leur a été dévolu au Louvre. Les chroniqueurs relatent qu’elles y vivaient très chichement, ayant à peine de quoi se chauffer, qu’elles ne pouvaient se vêtir selon leur rang (Henriette devait même à sa tante la duchesse de Savoie d’avoir des gants à sa taille) et que la reine déchue d’Angleterre avait dû vendre tous ses bijoux et sa vaisselle pour assurer sa subsistance et celle de sa fille. De plus, les deux femmes étaient tenues à l’écart de la vie de cour, femme et fille d’un roi déchu et exécuté, pauvres, héritières d’une lignée royale (les Stuart) que l’on croyait déchue à jamais, Henriette et sa mère n’intéressaient personne. Lord Jermyn, l’amant de sa mère qui avait accompagnée celle-ci lors de sa fuite d’Angleterre et qui partageait la vie des deux femmes, était un buveur et violent qui paraît-il, battait sa maîtresse. Malgré ces difficultés matérielles et ce climat familial déplorable, il semble qu’Henriette bénéficia d’une éducation acceptable. Enfant intelligente, elle était cultivée.

Cette situation changea lorsque, en 1660, le frère aîné d’Henriette, Charles, contre toute attente, réussit à reconquérir, sous le nom de Charles II, le trône d’Angleterre qui avait été enlevé à son père, Charles Ier, décapité sur ordre de Cromwell en 1649. Henriette était très liée avec ce frère aîné. Elle qui avait été oubliée, négligée, tenue à l’écart jusqu’alors par la monarchie française, devient, à 16 ans, la sœur d’un roi en exercice, donc une personne digne d’intérêt. Ce n’est qu’à partir de ce moment-là que la régente, Anne d’Autriche commença à s’occuper de sa nièce.

En 1670, au grand dam de son entourage jaloux, Henriette fut chargée par le roi d’une mission diplomatique. Elle se rendit en grand apparat en Angleterre visiter son frère Charles II qui l’aimait tendrement et contribua à la signature du traité de Douvres, qui scellait le rapprochement entre l’Angleterre et la France.

Dans son entourage se trouvait Louise de Kéroualle dont le roi Charles fit sa favorite.

Deux semaines après son retour de Londres Madame fut saisie de violentes douleurs au côté après avoir bu un verre de chicorée. Son agonie dura plusieurs heures. Elle mourut à 26 ans, le 30 juin 1670, à deux heures et demie du matin environ, au château deSaint-Cloud, peut-être d’une péritonite biliaire, comme le laisse supposer le rapport d’autopsie de Bourdelot.

Jacques Bénigne Bossuet composa pour Henriette-Anne une oraison funèbre dont certaines phrases sont passées à la postérité, par exemple : « Madame se meurt, Madame est morte… etc. ».

Monsieur se remaria en 1671 avec la fille de l’Électeur Palatin, Charlotte-Élisabeth de Bavière (1652-1722), qui était une petite-cousine d’Henriette d’Angleterre du côté Stuart.

Une mort célèbre et contestée

Madame se meurt, Madame est morte dans FONDATEURS - PATRIMOINE 260px-HenriettaMariaStuartBeaubrunDe nombreux historiens ont avancé la thèse d’un empoisonnement qui aurait été commandité par le chevalier de Lorraine, amant de Monsieur, intrigant notoire et personnage sans scrupules, dont Henriette avait obtenu du roi l’exil en Italie.

Certains témoins dirent que Madame fut subitement prise de douleurs terribles dans les premières minutes qui suivirent l’absorption de cette tasse de chicorée ; cependant la notion d’abdomen aigu chirurgical, ici rupture brutale de la vésicule biliaire, n’était pas connue à l’époque ; il était alors facile d’incriminer l’empoisonnement, certes fréquent. Une hypothèse récente évoque la possibilité d’une porphyrie aiguë intermittente, qui rendrait compte des symptômes observés D’autre part, Louis XIV, auquel certains proches avaient fait part de leurs soupçons vis-à-vis de cette mort suspecte, ordonna qu’une autopsie du corps de Madame fût pratiquée mais défendit sous peine de mort aux médecins d’évoquer dans leur rapport l’hypothèse d’un empoisonnement au demeurant fort difficile à mettre en évidence avec les moyens de l’époque. En effet, si l’empoisonnement s’était avéré, le scandale eût été immense. La thèse du poison, mis non pas dans le breuvage mais déposé sur les parois internes de la tasse (Madame, comme tous les princes et princesses du sang, avait sa propre vaisselle que personne d’autre n’avait le droit d’utiliser) fut entretenue par les mémoires de la princesse Palatine qui succéda à Henriette, comme seconde épouse de Monsieur.

Même si La Palatine ne cite pas ses sources, elle semble si convaincue d’un empoisonnement que de nombreux historiens supposent que Monsieur aurait pu connaître, ultérieurement, l’identité du ou des coupables, que celui-ci ou ceux-ci faisaient peut-être partie du cercle de ses favoris (le nom du chevalier de Lorraine fut notamment évoqué). Atterré par cette révélation, Monsieur aurait alors fait quelques confidences à demi-mots à sa seconde épouse. En effet, le frère du roi, qui était très bavard, très frivole, avait la réputation d’être incapable de garder un secret. Il fallait toujours qu’il parle pour se donner quelque importance.

Cependant, Madame de la Fayette, amie de la princesse, affirme dans son Histoire de Madame Henriette d’Angleterre que celle-ci s’était plainte pendant plusieurs jours avant sa mort « d’un mal de côté, et d’une douleur dans l’estomac à laquelle elle était sujette »; elle précise également lui avoir trouvé mauvaise mine. Bref, elle fait clairement état d’un malaise général pouvant étayer la thèse de la péritonite. On est davantage enclin à se fier à ce témoin direct des faits qu’à Madame Palatine qui, d’une part, ne devait arriver pour la première fois à la Cour que plus d’un an après les faits, et d’autre part, vouait au chevalier de Lorraine une haine violente qui ne pouvait que biaiser son jugement.

Les raisons de la mort d’Henriette ne sont toujours pas établies avec certitude à ce jour. Cependant les études modernes sur le rapport d’autopsie et sur l’évolution de l’état d’Henriette les derniers jours penchent pour une occlusion intestinale consécutive à une cholécystite aiguë.

 

Publié dans FONDATEURS - PATRIMOINE | Pas de Commentaire »

Ô Marie, si tu savais

Posté par francesca7 le 27 juin 2015

220px-Marie-manciniElle n’était pas jolie, ni gracieuse, Marie Mancini, la nièce du cardinal Mazarin, mais elle possédait la beauté de l’esprit, la plus puissante des armes. C’est ainsi qu’elle conquit le jeune roi, en septembre 1658, projetant de devenir reine de France.

C’était sans compter avec l’oncle qui fronça le sourcil : Louis XIV marié avec sa nièce ? Quoi ? Trop modeste, ce parti ! Et l’amour alors ? Eh bien on s’en passera ! Louis et Marie doivent se séparer après avoir vécu une aventure pleine de romantisme et de douceur.

En 1661, Marie accepte d’épouser le prince Lorenzo Colonna, Louis XIV n’ayant rien fait pour la retenir en France. Elle part vivre à Rome. Mais sa relation conjugale ne tarde pas à se dégrader. Après avoir donné trois fils à son époux (Filippo en 1663, Marcantonio en 1664 et Carlo en 1665), Marie estime pouvoir se soustraire à son devoir conjugal, tout en courant les galants. Les infidélités de son mari sont par ailleurs connues, mais ce dernier, de caractère ombrageux et violent, n’en refuse pas moins la vie dissolue de sa femme. Craignant pour sa vie (à tort ?), Marie quitte époux et enfants pour parcourir l’Europe avec sa sœur Hortense Mancini, duchesse de Mazarin et Philippe, duc de Nevers, son frère.

Elle meurt en 1715, mais Louis XIV refusa toujours de la revoir. Elle repose à l’entrée de l’église du Saint-Sépulcre de Pise.

Elle sera l’arrière-arrière-grand-mère du prince Camille Borghèse (1775-1832), second époux de Pauline Bonaparte (1780-1825).

Par son arrière-petite fille Felice Colonna (épouse de Giuseppe Alliata, prince de Buccheri) et par la petite-fille de celle-ci Maria Felice Alliata, épouse de Fulco Giordano Ruffo di Calabria, 8e prince de Scilla, Marie Mancini est aussi l’aïeule à la 9e génération de Paola Ruffo di Calabria, reine consort des Belges, de 1993 à 2013 en tant qu’épouse d’Albert II.

Plus tard, Jean Racine, dans sa tragédie Bérénice, mettra en scène cet amour sans espoir. Sa note latine liminaire « Inuitus inuitam dimisit » qui signifie « Malgré lui, malgré elle, il la renvoya » est une claire allusion aux deux amants éperdus.

Et Louis XIV, lors de la représentation en 1670, dix ans après sa rupture forcée avec Marie Mancini, ne retiendra pas ses larmes en entendant Bérénice dire à Titus qui la renvoie : « Vous êtes empereur, Seigneur, et vous pleurez ! », ce sont presque les paroles prononcées par son aimée le 22 juin 1659 lorsque Mazarin avait dit non au mariage : « Ah ! Sire, vous êtes roi, vous pleurez, et je vais partir ! » Marie se consolera dans les bras du connétable du royaume de Naples – il n’est de noble chagrin qui ne trouve riche consolation… Qui lui avait trouvé cet avantageux parti ? Marie-Thérèse d’Autriche Ô Marie, si tu savais dans FONDATEURS - PATRIMOINE Jean_Fouquet_-_Remise_de_l%27%C3%A9p%C3%A9e_de_connetable_%C3%A0_Bertrand_Duguesclin_-_Enluminure_%28XVe_si%C3%A8cle%29qu’épousa Louis XIV…

Aujourd’hui, le logis du gouverneur est tombé en ruines. De cet impossible amour, seul subsite à Brouage l’escalier de pierre qui a permis aux amants de monter sur le rempart afin de confier leurs peines à l’océan. Et puis, ces quelques vers, écrit sur une simple plaque de bois : « C’est par cet escalier de pierre que Marie montait pour entrevoir la mer dans le lointain et pleurait tristement sur son cruel destin qui ne veut pas qu’un roi par amour se marie ». Le théâtre se souviendra aussi de cet impossible amour, que l’on retrouve chez Corneille dans la pièce Tite et Bénénice : « Vous êtes empereur, Seigneur, et vous pleurez ! » (acte IV, scène 5), et dans la Bérénice de Racine. Les vers cité plus haut sont extraits d’un poème de Jean Landry (1899-1932), intitulé Pèlerinage d’amour de Louis XIV à Brouage. Le jeune roi qui vient d’Espagne est seul et rêve, Sur les remparts dressés par le grand Cardinal, Et son regard distrait vogue sur le chenal, Vers l’île d’Oléron, le sable de la grève… Mais le doux horizon d’Aunis est sans attrait, Pour ses yeux attristés, qui se voilent de larmes, Car Brouage et son port n’ont pour lui que le charme De l’amour dont son coeur n’a pas été distrait… Malgré tous les efforts de Monsieur l’Intendant, Et le jeu, seul plaisir de cette forteresse, C’est là qu’elle connut de l’exil la détresse. Et tous les désespoirs de son coeur imprudent… Pauvre et tendre amoureux, il l’appelait « ma reine », Reine, elle pouvait être et le fût dans son coeur C’est là qu’elle voulut, bannie et sans rancoeur Apaiser loin de lui sa passion sereine… Elle rêvait, aimant des lettres et des arts, Et craignant ainsi que le fit Bérénice Quand pour l’adieu suprême, elle dit sans caprice : « Sire, vous êtes roi, vous pleurez, je pars. » Avec de longs soupirs, le Roi suit le rivage, L’Infante, son épouse, aurait pitié de lui, Tant il fait peine à voir, ainsi seul dans la nuit, Cherchant ses rêves morts, sous les murs de Brouage.

 

 

Publié dans FONDATEURS - PATRIMOINE | Pas de Commentaire »

IL N’Y A PAS DE SOT METIER

Posté par francesca7 le 27 juin 2015

 

 

77A la fin du XIXe siècle, Privat d’Anglemont écrit la monographie de quelques métiers bizarres, mais réellement existants, dont la plupart des Parisiens ne soupçonnent alors sûrement pas l’existence. Du fabricant d’asticots àl’employé aux yeux de bouillon, en passant par le loueur de viandes ou le marchand de contremarques judiciaires, c’est un voyage pittoresque auquel il nous convie.

Ne vous est-il point arrivé, en vous promenant dans Paris, un jour de fête, par exemple, de vous demander comment toute cette population peut faire pour vivre ? demande Privat d’Anglemont à ses lecteurs. Puis, vous livrant mentalement aux douceurs de la statistique, cette science si chère aux flâneurs et aux savants si vous avez calculé combien la grande cité contient de maçons, de rentiers, de charcutiers, d’avocats, de charpentiers, de médecins, de bijoutiers, de forts de la halle, de banquiers, en un mot d’hommes exerçant au grand jour, par devant la société et la loi, des professions avouées et inscrites dans le dictionnaire de l’Académie, n’avez-vous pas toujours trouvé des masses énormes de gens auxquels vous ne pouviez assigner aucun état, aucun emploi, aucune industrie ?

Eh bien ! tous ces gens-là composent la grande famille des existences problématiques, que l’on évalue à soixante-dix mille ; c’est-à-dire que chaque matin il y a à Paris soixante-dix mille personnes de tout âge qui ne savent ni comment elles mangeront, ni où elles se coucheront. Et cependant tout ce monde-là finit par manger ou à peu près. Comment font-elles ? C’est leur secret, secret souvent terrible, que divulguent les tribunaux. Privat d’Anglemont nous entraîne dans un curieux périple au cœur de la frange pauvre, laborieuse, intelligente, qui à su se créer une industrie honnête répondant aux divers besoins du public. Nous n’en retiendrons ici quelques-uns.

Le fabricant d’asticots
— Que fait M. Salin ? demandai-je.
— Oh il n’est pas au bureau de l’Assistance publique (être au bureau est une honte pour un homme, dans les quartiers de travailleurs). C’est un homme qui gagne joliment sa vie : il est fabricant d’asticots.

Cette industrie nous parut exorbitante, écrit Privat d’Anglemont. Le fabricant d’asticots dépassait de cent coudées notre imagination. Nous craignions de n’avoir pas bien entendu, mais certainement nous ne comprenions pas. Il nous fallut une explication.

— Fabricant d’asticots, dis-je avec surprise.
— Mais oui. Vous savez bien, ces petits vers qui servent à pêcher.
— Je sais. Mais, comment les fabrique-t-il ?
— Ah ! voilà. Ce n’est peut-être pas très propre, cet état-là, mais on y gagne sa vie. Il y a à Paris plus de deux mille pêcheurs a la ligne, beaucoup de gamins et pas mal de bourgeois établis ou retirés des affaires. Le père Salin a fait connaissance avec ceux-ci sur le bord de l’eau. Il leur fait des asticots pour amorcer toute l’année. Pour cela il a loué tout le haut de la maison, un ancien pigeonnier. II y met macérer des charognes de chiens et de chats que lui fournissent les chiffonniers. Quand c’est en putréfaction, les vers s’y mettent ; le père Salin les recueille dans des boîtes de fer-blanc qu’on nomme calottées, et il les vend jusqu’à quarante sous la calottée.

Vous voyez que ce n’est pas bien malin à fabriquer. Mais dame ! il faut un fier odorat pour faire ce métier-là ! Tout le monde ne le pourrait pas. Aussi ses journées sont-elles très bonnes au commencement de la saison Il ne gagne jamais moins de dix à quinze francs par jour, et tout le reste de l’année sept à huit. Mais il n’a pas d’ordre, ça aime trop à lever le coude.

— Cependant, lorsque les eaux sont hautes on ne pêche guère ; il doit souvent chômer pendant l’hiver ?
— Au contraire, c’est son meilleur temps, parce qu’alors il élève des vers pour les rossignols, ce qui est un excellent métier dont il a presque le monopole.

C’est propre, c’est facile, cela rapporte beaucoup. Il suffit de prendre de la recoupe (petit son), qu’on mêle avec de la farine et de vieux morceaux de bouchons, on les laisse couver dans de vieux bas de laine, et les asticots rouges naissent tout seuls. Cela se vend dix sous le cent. Généralement, les amateurs de rossignols sont de vieilles femmes riches et des bourgeois qui ont des métiers tranquilles : les bouquinistes, les relieurs, les tailleurs à façon. Tous ces gens-là paient bien et comptant : il suffit donc d’avoir une dizaine de pratiques possédant chacune trois ou quatre oiseaux pour vivre bien à son aise et payer une femme de ménage. S’il n’aimait pas tant la boisson, le père Salin pourrait être propriétaire tout comme un autre, mais il mourra à l’hôpital, il est trop artiste.

Employé aux yeux de bouillon
Je vais vous dire maintenant ce qu’on fait des os, écrit Privat d’Anglemont : avant d’arriver chez le marchand de noir animal, le tabletier ou le fabricant de boutons, ils sont cuits deux ou trois fois. D’abord le boucher les vend quatre sous la livre, sous le nom de réjouissance, aux bourgeois et aux grands restaurants, pour faire des consommés ; ceux-ci les cèdent au rabais aux traiteurs de quatrième ordre, qui en font des potages gras pour les abonnés ; enfin ces derniers les repassent aux gargotiers, qui en composent une espèce d’eau chaude, qu’ils colorent à grand renfort de carottes, d’oignons brûlés, de caramel et de toutes sortes d’ingrédients.

Or, comme ces ingrédients ne peuvent donner ce que recherchent les amateurs, c’est-à-dire des yeux au bouillon, un spéculateur habile a inventé l’employé aux yeux de bouillon. Voici à peu près comme cela se pratique : un homme prend une cuillerée d’huile de poisson dans sa bouche, au moment où doivent arriver les pratiques, à l’heure de l’ordinaire, et, serrant les lèvres en soufflant avec force, il lance une espèce de brouillard qui, en tombant dans la marmite, forme les yeux qui charment tant les consommateurs. Un habile employé aux yeux de bouillon est un homme très recherché dans les établissements de ce genre.

— Mais cela doit avoir un goût détestable ?
— Eh ! mon Dieu ! le goût ne se développe que par la pratique. Comment voulez-vous que des gens habitués aux arlequins de la mère Maillard deviennent des gourmets ? L’eau-de-vie, d’ailleurs, leur a brûlé le palais.

Le loueur de viandes
Heureusement, ajoutai-je, les viandes que nous voyons pendues aux vitres de toutes ces gargotes me semblent belles et bonnes.

— Ces viandes ne sont là que pour le coup d’œil.
— Comment pour le coup d’œil ?
— Oui ; ces quartiers de bœuf, de mouton et de veau pendus aux vitres des marchands de soupe, ne leur appartiennent pas : ce sont des viandes louées.
— Des viandes louées ! De qui, et pourquoi ?
— Pour servir de montre, pour achalander la boutique. Ces gens-là vendent le plat de viande six sols au plus, trois sols au moins ; ils ne peuvent donc employer que de basses viandes. Et que voyez-vous chez eux ? de magnifiques filets, de superbes gigots, de succulentes entrecôtes. S’ils donnaient cela à leurs pratiques, ils se ruineraient. Ils s’entendent donc avec des bouchers qui, moyennant redevance, consentent à leur louer quelquefois même, des animaux entiers. Le loueur les reprend quand il en a besoin.
— C’est encore une industrie qui m’était inconnue. Je ne soupçonnais pas le loueur de viandes.

IL N’Y A PAS DE SOT METIER dans ARTISANAT FRANCAIS 220px-Grandville_Cent_Proverbes_page105Marchand de contremarques judiciaires
M. Auguste est un ancien clerc de province. Il est venu à Paris sans sou ni maille ; il a été marchand de contremarques à la porte des théâtres du boulevard, où il a connu beaucoup de flâneurs et de petits rentiers, gens désœuvrés qui ne savent jamais comment franchir l’abîme immense qui sépare le déjeuner du dîner, la lecture du journal de l’ouverture des théâtres. Un jour qu’il se promenait dans le palais, il vit beaucoup de ces bons citadins qui stationnaient à la queue du public des tribunaux et qui faisaient mille gentillesses aux gardes municipaux pour les attendrir et tâcher de pénétrer dans le sanctuaire de la justice.

M. Auguste, qui est un homme à expédient, vit là une source de fortune. Il avait une idée. Dès ce moment il passa ses journées à courir dans les corridors du palais, accostant toutes les personnes qu’il voyait sortir des cabinets de messieurs les magistrats instructeurs. Il se proposait pour conduire les témoins à la caisse afin d’y toucher les deux francs que la justice alloue à tous ceux qui viennent la renseigner.

Lorsque le témoin avait reçu son argent, et qu’après avoir offert soit un canon de vin, soit une demi-tasse à M. Auguste, il voulait le quitter pour vaquer à ses affaires, celui-ci l’apitoyait en lui contant quelque histoire bien larmoyante, bien pathétique ; il savait encore se faire donner quelques sous pour sa peine. D’autrefois le témoin dédaignait la rétribution ; alors M. Auguste changeait sa batterie ; il inventait un autre conte, il implorait sa pitié ; il lui demandait son assignation en lui disant qu’il était père d’une nombreuse famille. On lui abandonnait facilement ce morceau de papier inutile. C’est en collectionnant toutes ces citations et assignations que M. Auguste a fondé le magasin qui le fait vivre.

Aujourd’hui M. Auguste vit comme un chanoine ; il est devenu une autorité dans le bas peuple du palais ; il gagne beaucoup d’argent. Il loue des citations en témoignage aux curieux pour les faire entrer aux Cours d’assises et aux Chambres correctionnelles, les jours de procès curieux.

Les gardes municipaux qui sont de planton aux portes des tribunaux ont pour consigne de ne laisser passer que les personnes assignées. Ils ne lisent jamais les assignations ; il suffit donc qu’on se présente hardiment avec un papier timbré pour qu’ils vous laissent passer, car du moment qu’on a le papier, la consigne est sauve. M. Auguste avait observé cela ; aussi a-t-il su en profiter.

Il sait par cœur la liste des affaires à juger ; il connaît les jours où les premiers sujets du barreau et de la magistrature debout doivent prendre la parole et ces jours-là, dès sept heures du matin, il est à son poste avec sa liasse de citations et d’assignations périmées. Il les loue ordinairement un franc pour la séance. On le connaît ; il a ses habitués ; on ne paie qu’après qu’on est placé ; mais on est obligé de laisser en nantissement 5 francs, qu’il ne remet qu’après la restitution de son papier.

— Et vous gagnez beaucoup d’argent à ce métier-là ? lui demandai-je.
— C’est selon les procès ; celui de Laroncière m’a rapporté jusqu’à 100 francs par jour ; j’étais obligé d’envoyer un de mes clercs dans la salle, pour redemander mes assignations. J’ai loué la même citation jusqu’à dix fois en une séance. Soufflard n’a pas mal donné ; la bande de Poil-de-Vache était bonne, mais ne valait pas les Habits noirs.
— Et les affaires politiques ?
— Cela dépend des personnages. Les complots m’ont laissé d’ailleurs d’excellents souvenirs ; les procès de presse furent d’un assez joli rapport. Les cris séditieux valaient moins. Quant aux crimes, aux infanticides, aux faux, aux vols de confiance, c’est chanceux.
— D’après ce que je vois, en lisant les détails d’un assassinat vous savez combien il vous rapportera.
— Il y a crime et crime ; c’est la position de l’accusé qui fait tout. S’il est jeune et féroce, il devient intéressant, c’est très bon. Si c’est un homme qui a simplement tué sa femme ou un passant dans la rue, ça ne vaut absolument rien. Les maris jaloux et farouches amènent des dames.

Mais parlez-moi de ces gaillards qui coupent leur maîtresse en morceaux ! qui l’attendent le soir dans une allée, la poignardent et tirent un coup de pistolet à leur rival à la bonne heure ! c’est du nanan ! Ils ont un public à eux, on les lorgne, on leur envoie des albums pour y écrire deux mots ; ils posent devant un parterre de femmes ; s’ils sont tant soit peu jolis garçons et que l’affaire prenne plusieurs audiences, la seconde journée double ma recette. Si le jugement se prononce la nuit, je suis obligé de donner des contremarques.

582La nuit est très propice aux drames judiciaires, le beau sexe s’y crée des fantômes. C’est si intéressant, un scélérat passionné qui égorge proprement la femme qu’il aime ! il y a de quoi en rêver quinze jours. On envie le sort de la victime, on voudrait être aimé ainsi une fois, rien que pour en essayer. Ah ! Lacenaire ! nous ne trouverons malheureusement pas de sitôt son pareil. Il faisait des vers, Monsieur ! s’écria M. Auguste, d’un air moitié d’admiration et moitié de regret. Il était galant, intéressant, il s’exprimait bien. Encore deux affaires comme la sienne, et je me retirais dans mes terres.

Ah ! si le huis-clos n’existait pas pour certains attentats ! quelle source de fortune ! je serais millionnaire. Tout le monde en veut : C’est le fruit défendu.

Publié dans ARTISANAT FRANCAIS | Pas de Commentaire »

JETER DE LA POUDRE AUX YEUX

Posté par francesca7 le 25 juin 2015

 

 

Poudre-YeuxEXPRESSION FRANCAISE

Le bitume nous prive du plaisir d’anciennes images. Finis les nuages de poussière blancs ou roses soulevés par les rutilantes torpédos d’avant guerre. Les moindres routes de campagne ont été conquises par le goudron, là où un vieux vélo lui-même laissait son sillage sur un chemin poudreux.

Poudreux est le mot juste : la poudre – ou poudrée, du latin pulverem (d’où « pulvériser ») – désignait à l’origine la vulgaire poussière ; Ce n’est que bien après l’invention de la « poudre » à canon, et le succès qu’on lui connaît que nos aïeux furent contraints d’utiliser le mot « poussière » pris en Lorraine, pour désigner la choses commune. Les apothicaires gardèrent leur poudre à eux. 

C’est donc « poussière » qu’il faut comprendre dans quelques locutions qui ont survécu au changement : « Jeter de la poudre aux yeux, c’est préoccuper les gens, les éblouir par un faux mérite. Ce proverbe prend son origine de ceux qui couroient aux jeux Olympiques, où l’on disoit que ceux qui avaient gagné le devant, qu’ils jettoient de la poudre aux yeux de ceux qui les suivoient, en élevant le menu sable et la poudre par le mouvement de leurs pieds, ce qui se dit figurément dans les autres occasions où l y a des compétiteurs ». (Furetière). 

Cet usage qui consiste à répandre de la poussière sur ceux que l’on domine semble avoir eu d’autres applications pratiques et symboliques. Le Coran se félicite en ces termes d’une victoire sur les ennemis de la foi : « Ce n’est point toi, ô Mahomet, qui a jeté de la poudre en leurs yeux, c’est Dieu lui-même qui les a confondus ».

Renart agissait de même au XIIIè  siècle :

 

Renart li fet honte et ennui…

bien le voudroit avoir conquis.

de la poudre li jete el vis.

 

Le sens moderne d’esbroufe me paraît assez bien évoqué par un carrosse en grand équipage soulevant un nuage de « poudre » jetée aux yeux du pauvre monde réfugié en hâte sur les bas-côtés. Mais il y a tant de façons d’en mettre plein la vue !

 

Extrait de La Puce à l’Oreille de Claude Dunetton 

Publié dans EXPRESSION FRANCAISE | Pas de Commentaire »

TENIR LE HAUT DU PAVE

Posté par francesca7 le 25 juin 2015

 

022003.1EXPRESSION FRANCAISE

Le pavé a toujours fait parler de lui. Matériau idéal d’un certain nombre de barricades, il est aussi à l’origine de nombreuses expressions qui, si j’ose dire, courent les rues : battre le pavé c’est naturellement se promener de long en large en le heurtant de la semelle par désoeuvrement : « On appelle un batteur de pavé – dit Furetière – un fainéant, un filou, un vagabond qui n’a ni feu, ni lieu, qui n’a autre emploi que de se promener. « 

Brûler le pavé c’est aller grande allure, à cause que les roues cerclées de fer des carrosses, comme les sabots des chevaux, faisaient jaillir des étincelles s’ils allaient bon train. Etre sur le pavé, c’est être sans logement, sans ressources, ruiné et à la rue….

Tenir le haut du pavé par contre est un signe de distinction. On sait que les rues d’autrefois étaient faites en double pente remontant vers les murs des maisons, de sorte à ménager au milieu un ruisseau pour l’écoulement des eaux de pluie, de vaisselle, et de toutes sortes de vidanges ; Il était donc préférable lorsqu’on déambulait sur la chaussée de se tenir le plus loin possible de cet égout à ciel ouvert, donc de marcher sur la partie la plus élevée, c’est-à-dire le plus près possible des façades.

Cela évidemment posait un léger problème de protocole dès que l’on croisait un autre piéton : « Dans les rues l’on me frapait, afin de me faire aller du côté du ruisseau – dit Sorel – et m’appeloit on gueux, si je tesmoignais mon ressentiment par quelque  paroles picquante ». Mais le choix se faisait plus généralement sur la parue ; il est certain qu’un important personnage, reconnaissable à la richesse de son habit, ne déviait jamais de son chemin sec – on s’effaçait devant lui, et il tenait toujours, au sens propre, le haut du pavé.

« On dit qu’un homme tient le haut du pavé dans une ville, qu’il n’y a personne qui lui dispute le pavé, pour dire qu’il est dans quelque dignité ou charge qui l’élève au-dessus des autres  » (Furetière).

« La marche des carrosses – remarque Voltaire – et ce qu’on appelle le haut du pavé ont été encore des témoignages de grandeur, des sources de prétentions, de disputes et de combats, pendant un siècle entier ».

Les trottoirs furent inventés plus tard et ne se généralisèrent qu’au siècle dernier. Il est curieux de noter qu’ayant pris la place du « haut du pavé » ils en eurent d’abord le prestige. « Etre sur le trottoir ; être dans le chemin de la considération, de la fortune », dit curieusement Littré, qui ajoute ce bel exemple : « Cette fille est sur le trottoir, ancienne locution qui signifiait : elle est bonne à marier, elle attend un mari »… ça alors ! On a raison de dire que l’enfer n’est pavé que de bonnes intentions !

 

Extrait de La Puce à l’Oreille de Claude Dunetton 

Publié dans EXPRESSION FRANCAISE | Pas de Commentaire »

LE METIER DES CRIEURS DE RUE

Posté par francesca7 le 25 juin 2015

 

134393008866Il existe une nomenclature fort curieuse, en vers anciens, des cris de Paris au XIIIe siècle ; c’est un monument remarquable, qui nous donne d’une manière assez exacte la mesure du commerce et l’existence des petits métiers les plus communs à cette époque

Paris, alors renfermé dans la clôture de Philippe-Auguste en 1211, occupait en superficie un emplacement de 700 arpens ; sous Louis XVI on en comptait 9 000. Les rues étaient étroites et boueuses, pavées encore en peu d’endroits, et obstruées à tous les instants par des porcs et autres animaux que les habitant laissaient errer au hasard pour chercher leur nourriture.

A ce premier ennui ajoutez celui d’entendre à toute heure du jour ces clameurs de toutes sortes, les cris des marchands et les bruits de tambour à chaque proclamation ou cri solennel des crieurs du roi et de la ville, et vous aurez le tableau animé, remuant et criard de cette ville au XIIIe siècle.

Nous donnerons quelques passages du Dict des cris de Paris de Guillaume de Villeneuve, avec un aperçu historique des diverses denrées et marchandises les moins connues et les plus curieuses. On verra que, sauf quelques uns d’entre eux qui ont disparu pour faire place à un plus grand nombre d’autres, ces cris sont encore à peu près les mêmes aujourd’hui ; seulement, on remarquera que plus d’une espèce de marchandise qui se vendait alors en détail dans les rues par de pauvres gens, se débite en gros aujourd’hui, dans des boutiques et magasins, par de riches négociants.

Un noviau dit ici nous treuve
Guillaume de la Villeneuve,
Puisque povretez le justise.
Or vous dirai en quele guise
Et en quele manière vont
Cels qui denrées à vendre ont,
Et qui pensent de lor preu fere
Que jà ne finirout de brère
Parmi Paris jusqu’à la nuit.
Ne cuidez vous qu’il lor anuit
Que jà ne seront à sejor.
Oiez qu’on crie au point du jor :
– Seignor, quar vous alez baingnier
Et estuver sans deslaier,
Li baing sont chaut, c’est sans mentir.

images« Puisque la misère l’y oblige, Guillaume de la Villeneuve trouve un nouveau dit à nous raconter. Je vais vous dire de quelle manière agissent les marchands pour faire leur profit, à tel point qu’ils ne cessent de brailler dans Paris jusqu’au soir ; ne croyez pas qu’ils en soient las et qu’ils pensent à cesser. Entendez ces cris dès le point du jour : Seigneur, allez vous baigner sans tarder ; les bains sont chauds, c’est sans mentir. »

C’étaient les barbiers qui, à Paris, autrefois, tenaient les bains ou étuves ; ils étaient réunis aux chirurgiens, et ne formaient qu’une confrérie sous la bannière de saint Côme et saint Damien. Les étuves ou bains étaient fort communs à Paris ; c’était un usage que ses habitants tenaient des Romains. Sous le roi Henri Ier, au XIe siècle, il est fait mention d’étuves situées à la pointe de la Cité ; en 1383, Charles VI renouvela les statuts des barbiers, et leur défendit de travailler les dimanches et les grandes fêtes de l’année.

On compte jusqu’à six rues, ruelles ou culs-de-sac qui reçurent le nom d’estuves à cause des bains qui s’y trouvaient placés. Il paraît au reste que, malgré toutes les précautions dont on usait à la réception des maîtres barbiers-baigneurs-étuvistes pour ne choisir que des gens de bonnes mœurs, et malgré la défense qui leur était faite d’aller travailler dans les étuves, ces endroits ne jouissaient pas, au moyen âge, d’une excellente réputation.

Une ordonnance du mois de novembre 1510 voulut que toutes ces maisons fussent fermées en cas de contagion. Leur nombre s’accrut de telle sorte, qu’au dire de Sauval, on ne pouvait faire un pas dans Paris sans en rencontrer ; on cessa d’y aller vers la fin du XVIIe siècle.

Puis après orrez retentir
De cels qui les fres harens crient.
Or, au vivet li autres dient :
Sor et blanc, harenc fres poudrén
Harenc nostre vendre voudré.
Menuise vive orrez crier,
Et puis aletes de la mer.

« Vous entendiez après les cris de ceux qui crient les harengs frais ou la vive, le hareng saur, le hareng blanc, frais et saupoudré. Vous vendrai-je de notre hareng ? Entendez-vous crier la menue vive et les alètes de la mer ? »

Le commerce du poisson salé ne commença qu’au XIIe siècle, par les soins de la Hanse parisienne, ou corps des marchands ; et parmi ces poissons, les harengs furent les premiers qu’on vit paraître aux halles : ils venaient de Rouen par la Seine, mais Calais prétend être la première ville qui ait connu et pratiqué la pêche du hareng.

C’est Louis IX qui, en 1254, divisa la vente du poisson en frais, salé, et saur ; cette distinction subsista jusqu’à Philippe de Valois, en 1345. Alors on ne connaissait pas encore l’art de saler le hareng comme aujourd’hui : celui qui le trouva fut un nommé Buckelz, mort à Biervliet, dans la Flandre hollandaise, en 1347 suivant les uns, en 1447 suivant les autres. A Paris, les femmes qui vendaient cette sorte de poisson avaient le nom de harengères, et demeuraient sur le Petit-Pont ; le poète Villon, qui écrivait au XVe siècle, fait une mention particulière de leur talent à dire des injures.

On ne sait trop si l’alète était un poisson ou un oiseau.

Oisons, pijons et char salée ;
Char fresche moult bien conraée,
Et de l’aillie à grant planté.

« Oisons, pigeons et chair salée ; chair fraîche et bien parée, et de l’aillée en grande quantité. »

Le-marchand-de-verresLes Gaulois envoyaient à Rome de nombreux troupeaux d’oies, dont les Romains faisaient grand cas ; dans la suite les Francs les gardèrent, et longtemps en France ce fut la volaille la plus estimée, même chez les rois, puisque Charlemagne recommande, dans ses Capitulaires, d’en tenir ses maisons de campagne abondamment fournies. A Paris, les rôtisseurs n’avaient guère que des oies ; de là leur vint le nom d’oyers, qu’ils portèrent longtemps dans leurs statuts.

On sait qu’à cette époque les gens de la même profession étaient logés dans le même quartier et occupaient les mêmes rues : les rôtisseurs, ou plutôt les oyers, donnèrent leur nom à la rue qu’ils habitaient, et ce fut la rue aux Ouës ; mais par la suite on oublia cette étymologie, et on s’habitua à dire la rue aux Ours, nom qu’elle porte encore aujourd’hui. Une ordonnance du prévôt de Paris, en date du 22 juin 1522, donna la permission aux maîtres poulaillers et rôtisseurs de faire nourrir leurs oisons dans les rues de Verberie, des Fontaines, et autres aux environs, comme étant des lieux vagues et champêtres.

L’aillie ou l’aillée était une sauce que le menu peuple aimait beaucoup, et dont on faisait un bon débit dans les rues. C’était un mélange d’ail, d’amandes et de mie de pain pilés ensemble et détrempés avec un peu de bouillon. On la conservait comme la moutarde ; les habitants des provinces méridionales l’affectionnaient surtout. On en faisait aussi avec du verjus, témoin ce vers de cette même pièce :

Verjus de grain à faire aillée.
Or au miel (Diex vous doinst santé !)
Et puis aprez, pois chaus pilez
Et feves chaudes par delez.

« Voici du miel (que Dieu vous tienne en santé !) Puis après : pois chauds pilés, et fèveschaudes tout auprès. »

De tout temps, en France, le miel fut recherché : à certaines époques on en donnait comme un régal dans les monastères, et Louis le Débonnaire et Charles le Chauve firent divers présents de cette nature aux religieux de Saint-Germain et de Saint-Denis. Avant que le sucre ne fût devenu aussi commun, le miel en tenait lieu pour confire les fruits ; souvent même on le préférait au sucre dans les pâtisseries.

Charlemagne, en ses Capitulaires, rappelle à ses métayers de récolter des pois dans leurs jardins. La manière la plus généralement goûtée de les servir était de les faire cuire avec du cochon. Les moines de Saint-Victor parvinrent à donner à ce plat un degré de bonté remarquable ; je ne sais pas même si un amateur ne s’avisa pas de publier un commentaire sur les meilleures manières de les accommoder.

Les fèves se vendaient à l’égal des pois, et l’on petit lire dans les poésies du XVIe siècle que les élégants de l’époque faisaient usage d’eau de fève pour se blanchir le teint.

Aoust de pesches,
poires de chaillon et nois fresches ;
Primes ai pommes de rouviau,
Et d’Auvergne le blanduriau.

Pêches d’août,
poires de chaillou et noix fraîches.
J’ai les premières pommes de rouviau
et du blandureau d’Auvergne.

Pendant longtemps on ne vendit à Paris que des pêches de vigne ; les plus estimées étaient celles de Corbeil ; voici ce que Louis XIII en écrivait vers 1613 : « La meilleure pêche est celle de Corbeil, qui a la chair sèche et solide, tenant aucunement au noyau. » Montreuil devint plus tard aussi renommé pour ses pêches.

C’est à la Grèce que nous devons les poires : celles qu’on criait dans les rues au XIIIe siècle, sous le nom de chaillou, étaient ainsi appelées parce qu’elles venaient de Caillaux en Bourgogne ; on les mangeait cuites ou confites. Les pommes de rouviau (calville rouge) et le blandureau d’Auvergne (calville blanc), telles étaient les pommes qu’on vendait le plus communément au XIIIe siècle ; trois siècles plus tard, on citait les pommes de paradis, et lecapendu ou courtpendu, sorte de pomme que les femmes enfermaient dans leurs armoires pour parfumer leurs robes.

Avec les pommes et les prunelles, les bourgeois et les marchands faisient une boisson que l’auteur du Journal de Paris, sous Charles VI, appelle prunelle oudépense. Pour donner une idée de l’horrible disette qui désolait Paris en 1420, il dit que « ceulx qui en hyver avoient faict leurs buvaiges comme despenses de pommes ou de prunelles, jetterent au printemps ces fruits dans la rue pour que les porcs de sainct Anthoine s’en nourissent ; mais les pauvres gens, errant en grand nombre par les rues, disputoient ces restes aux cochons, et les mangeoient avidement. »

En Provence on assaisonnait les mets avec l’huile ; celle qu’on tirait des olives était la plus estimée ; mais comme elle ne pouvait suffire à la consommation qui s’en faisait par tout le royaume, les provinces, auxquelles sa cherté l’interdisait, y suppléaient et y suppléent encore par des huiles extraites de certaines graines ou fruits huileux que produisent quelques parties de leur territoire. Legrand d’Aussy remarque que dans le Bourbonnais, dans l’Auvergne, la Saintonge, le Limousin, la Bourgogne, le Lyonnais, et autres, le peuple se sert pour salades et pour fritures d’huile de noix ; celle qu’on criait au XIIIe siècle, dans les rues de Paris, servait non seulement pour les aliments, mais encore pour l’éclairage des lampes.

Il est curieux d’observer que les lampes dont on se servait à cette époque ressemblent à celles appelées Creziou, et qu’emploient les habitants des provinces méridionales : au lieu du coton pour la mèche, on y plaçait la moelle d’un certain petit jonc ; il y a même un vers de cette pièce où un crieur dit :

J’ai jonc paré pour mettre en lampe.
Vinaigre qui est bons et biaux.
Vinaigre de moustarde i a.
Diex ! a il point de lie la ?
Vinaigre qui est bel et bon.
Voilà vinaigre de moutarde.
Pour Dieu ! N’y a-t-il pas ici de lie (de vin)
à vendre ?

Le vinaigre, c’est-à-dire le vin aigri, était en usage avant le XIIIe siècle : on en connaissait de diverses espèces. Depuis longtemps la moutarde de Dijon est renommée : Champier, qui vivait sous François Ier, c’est-à-dire au XVIe siècle, nous apprend qu’elle s’envoyait sèche et en pastilles. Quand on voulait s’en servir, on délayait une de ces pastilles dans du vinaigre : c’était ce vinaigre qu’on appelait vinaigre de moutarde. Les vinaigriers allaient par les rues, demandant s’il y avait de la lie de vin à vendre ; car ils s’en servaient pour la composition de leurs vinaigres.

Chaus pastés, i a chaus gastiaus,
Chaudes oublies renforcies.
Galetes chaudes, eschaudez.
Roinsolles, ça denrées aux dez.
Les flaons chaus pas nes oublie.
L’autre crie gastiaus rastis.
Je les aporte toz fetis.
Cha des tartes et siminiaus.

Voilà des pâtés chauds, des gâteaux
tout chauds,
de chaudes oublies renforcées,
galettes chaudes, échaudés,
rinsolles, gâteaux à jouer aux dés.
N’oubliez pas les flans tout chauds.
Un autre crie : gâteaux razis.
Je vous les apporte tout faits,
ainsi que des tartes chaudes et des simeniaus.

Les cabaretiers qui donnaient à manger chez eux vendaient ordinairement de la pâtisserie ; ils envoyaient leurs garçons crier et débiter leurs marchandises dans les rues : il y en avait de chauds et de froids. Dans les pâtés chauds on renfermait quelque bonne pièce de viande de boucherie, de gros et menu gibier, de la volaille ou du poisson.

images (1)Les oublies renforcées étaient ce que nous appelons aujourd’hui des gauffres ; les galettes chaudes sont celles que nous connaissons encore. Les eschaudez qu’on trouve désignés dans une charte du XIIIe siècle, sous la périphrase de Panes qui dicuntur eschaudati (pains qu’on appelle eschaudés), étaient ainsi nommés parce qu’on les faisait lever en jetant dessus de l’eau chaude : c’était moins une friandise qu’une nourriture économique et commune, puisque saint Louis permit aux boulangers, par grande exception, de cuire les dimanches des échaudés pour les pauvres gens.

Les rissoles, ou roinssolles, comme disaient les crieurs du XIIIe siècle, étaient une espèce d’échaudé ou de galette faite avec de la graisse ou du beurre, mais rissolée dans la poêle ; plus tard on y joignit de la viande hachée. La duchesse de Montpensier en parle dans ses Mémoires ; l’auteur des Cris de Paris dit que ces gâteaux sont des denrées aux dez, parce qu’après souper, le soir, les artisans, les écoliers et autres personnes soumises à des règlements, ne pouvaient jouer que ces friandises aux jeux de hasard.

Les flaons ou flans, dont parle le vers suivant, sont très anciens en France : le poète Fortunat en parle ; il raconte que sainte Ragonde, pour se mortifier, en faisait faire dont elle ne mangeait que l’enveloppe grossière, faite en pâte de seigle ou d’avoine. Quant aux simeniaus, c’était une sorte de pâtisserie connue sous ce nom en Picardie.

Publié dans ARTISANAT FRANCAIS | Pas de Commentaire »

QUAND LEO FAIT SON SHOW

Posté par francesca7 le 23 juin 2015

 

800px-Radio_Libertaire_10_ans_Léo_Ferré_3Le roi Léo est mort. Pas celui des odeurs mélangées de moules marinières et d’encens, mais le râleur cinglant à l’immense mauvais goût, à la provocation d’enfant, aux braises douloureuses des mots.
 

Léo Ferré est parti, et sans doute avec lui bien de nos rages, de nos violences et ennuis de n’avoir été que nous-mêmes.
Faux prophète de l’âge d’or, Léo à la fois dans l’attente et dans l’oubli, un pied dans l’art, l’autre dans la survie financière, mais toujours cœur fidèle, Léo aura enfin rejoint Pépé son chimpanzé, son âme sœur, un jour anonyme de 14 juillet, quelque part en Toscane, au milieu des fanfares des imbéciles.
 
 
Insomniaque dans un monde qui ronfle, Léo Ferré a veillé très tard pour nous laisser avec la gueule de bois de la lucidité face aux temps modernes, toujours plus toc, toujours plus informes.
Qui donc va réinventer le monde après lui ? 

 
Le temps du plastique nous ronge. Pourtant, quand la bêtise pesait de tout son poids, lourd et bas comme un couvercle, venant de la face lugubre du monde, certains se passaient des textes de Léo, presque clandestinement comme des mots de passe, pour résister à la connerie du monde.

Étranger à la vie sociale, il faisait claquer des mots sur des musiques parfois emphatiques, le plus souvent prenantes car venues du fond des boîtes à musiques du temps et de l’enfance. Parfois son complexe de chef d’orchestre manqué lui a donné certes l’invective sonore, mais aussi des robinets d’eau tiède de violons et de violonades.
Mais sa joie d’enfant devant un orchestre symphonique l’absoudra de tout, et j’attends encore Ivry Gitlis venir tendrement le surprendre, même là où il est maintenant, et ce beau sourire embué de larmes devant la seule valeur qui comptait pour lui : l’amitié fervente.
 
Il a su faire la courte échelle à Apollinaire, Baudelaire, Rimbaud, Aragon, qu’il fît descendre dans la rue, lui « le provocateur des gens à l’intelligence ». Mai 1968 lui aura apporté un public, une éternelle jeunesse, après qu’il a longtemps vécu caché derrière les portes des cabarets et des écluses de la Seine.
 
 
Voulant desserrer les mains de l’oppression, Léo Ferré gueulé à tort et à travers, Léo le hurle tout, Léo le « hurlevent ». Et, dans le flot parfois torrentiel de ses textes fleuves, il y a tant de saisissements superbes, de slogans lumineux, de mots consolateurs, de hennissements de « chansons des nuits quand y’en a marre» que nous n’avons plus faim malgré nos jours maigres.
 
Le vieux lion à la crinière d’argent, sans Dieu ni maître si ce ne sont ses amis, laisse une ombre immense et revigorante. Sans doute a-t-il rejoint l’eau « cette glace non posée, cette procédure mouillée ». L’eau de-là car ses fleuves de mots font les paradis fluides et toujours en crue.
 
Certains sont appuyés sur le ciel et ils ne le voient pas.
D’autres sont porteurs de feu, nous consument et se consument. Ils voient et l’enfer et les hommes.
 
Léo Ferré est le magma du monde. Volcan à la lave des mots rouges et noirs, il ne se sera jamais endormi. Il nous fait toujours chaud aux os et à l’âme. Il nous fertilise encore. Sur lui poussent les blés de nos paroles.
Il reste le grand actuel et, si parfois nous nous laissons aller à nous mettre à genoux devant la vie qui va, il ose gronder en nous.
Léo Ferré est notre grand actuel.

QUAND LEO FAIT SON SHOW dans CHANSON FRANCAISE 220px-Meilland_ferr%C3%A9_printemps_de_bourges85

un seul texte, mais superbe de Léo Ferré

 

FLB

 

L’eau cette glace non posée

Cet immeuble cette mouvance

Cette procédure mouillée

Nous fait prisonnier sa cadence

Nous dit de rester dans le clan

A mâchonner les reverdures

sous les neiges de ce printemps

A faire au froid bonne mesure

 

Cette matière nous parlant

Ce silence troué de formes

Et ces marins nous appelant

Nos pas que le sable déforme

Cette cruelle exhalaison

Qui monte des nuits de l’enfance

Quand on respire à reculons

Une goulée de souvenance

 

Vers le vertige des suspects

Sous la question qui les hasarde

Vers le monde des muselés

De la bouche et des mains cafardes

Nous prierons Dieu quand Dieu priera

Et nous coucherons sa compagne

Sur nos grabats d’où chantera

La chanterelle de nos pagnes

 

Mais Dieu ne fait pas le détail

Il ne prête qu’à ses lumières

Au renouvellement du bail

Nous lui parlerons de son père

Du fils de l’homme et du destin

Quand nous descendrons sur la grève

Et que dans la mer de satin

Luiront les lèvres de nos rêves

 

Nous irons sonner la Raison

A la colle de prétentaine

Réveille-toi pour la saison

C’est la Folie qui se ramène

A bientôt Raison à bientôt

Ici quelquefois tu nous manques

Si tu armais tous nos bateaux

Nous serions ta Folie de planque

 

On danse ce soir sur le quai

Une rumba pas très cubaine

Ça n’est plus Messieurs les Anglais

Qui tirent leurs coups Capitaine !

On a Jésus dans nos cirés

Son tabernacle sous nos châles

Pour quand s’en viendront se mouiller

Vos torpilleurs sous nos bengales

 

Et ces maisons gantées de vent

Avec leur fichu de tempête

Quand la vague leur ressemblant

Met du champagne sur nos têtes

Ces toits leurs tuiles et nous et toi

Cette raison de nous survivre

Entends le bruit qui vient d’en bas

C’est la mer qui ferme son livre…

 

Publié dans CHANSON FRANCAISE | Pas de Commentaire »

OPINER DU BONNET

Posté par francesca7 le 23 juin 2015

 

EXPRESSION FRANCAISE

250px-GdellarovereLe bonnet est apparu eu début du XVè siècle et il est resté très longtemps la coiffure courant des femmes commes des hommes. Voici son historique tel qu’il est donné au XVIIIè siècle par Mœurs et coutumes des Français de Le Gendre, cité par le Dictionnaire de Trévoux ; « On commença sous Charles V à abattre sur les épaules l’aumusse (coiffure de peau d’agneau avec le poil) et le chaperon, et à se couvrir d’un bonnet ; si ce bonnet étoit de velours, on l’appelait mortier ; s’il n’étoit que de laine, on le nommoit simplement bonnet. Il n’y avoit que le Roi, les Princes et les chevaliers qui ses servissent de mortier ; le bonnet étoit la coiffure du clergé et des gradués ; le mortier fut peu à la mode ; les bonnets y ont toujours été, avec cette différence, qu’autrefois ils étoient de laine, et que depuis environ cent ans, on ne les fait plus que de carte que l’on couvre de drap ou de serge ».

Cette histoire est partiellement inexacte. D’abord les mortiers n’ont été nommés ainsi qu’au XVIIè siècle par comparaison avec une « machine de guerre » (large bouche à feu très courte) pour désigner la toque des magistrats. Ensuite ce Le Gendre ne parle là que des bonnets rigides des officiels, des « gros bonnets » qui dirigent les autres.

Mais précisément ce sont eux qui, dans les assemblées de justice ou autres, opinent, c’est-à-dire donnent leur « opinion » – le mot a fini par se spécialiser sur une seule opinion au sens d’approuver.

Or, c’était dans les conseils une forme de vote que d’ôter son bonnet pour marquer son adhésion à l’avis de l’orateur sur la question débattue – un vote, non à main levée mais à « bonnet levé ». C’est là au sens propre opiner du bonnet. « On dit figurément – explique Furetière – qu’une question passe du bonnet, qu’on opine du bonnet, lorsque tout le monde est du même avis, ou qu’on opine sans raisonner et selon le sentiment de ceux qui ont déjà opiné ». Selon lui, il s’agirait même d’un vote à l’unanimité.

Extrait de La Puce à l’Oreille de Claude Dunetton 

Publié dans EXPRESSION FRANCAISE | Pas de Commentaire »

12345
 

leprintempsdesconsciences |
Lechocdescultures |
Change Ton Monde |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | C'est LE REVE
| Détachement Terre Antilles ...
| ATELIER RELAIS DU TARN ET G...