ETRE REDUIT A LA PORTION CONGRUE
Posté par francesca7 le 6 mai 2015
EXPRESSION :
Après quelques décennies de relative abondance, du moins dans ce coin de planète que nous disons occidental, la vieille notion de portion congrue semble ça et là vouloir refaire surface. Elle n’a jamais cessé de présider à la répartition des richesses à l’échelle du globe.
Dans le langage ecclésiastique – explique Littré – portion congrue, pension annuelle que le gros décimateur payait au curé pour sa subsistance ». Qui diable était donc ce « gros décimateur » ? Eh bien le patron du curé d’autrefois, l’ecclésiastique à qui revenait le bénéfice de la cure. On sait que sous l’Ancien Régime le titulaire d’une paroisse ne s’occupait pas nécessairement de ses ouailles. S’il était quelque peut dignitaire, ou bien en vue dans le monde, il employait un prêtre subalterne et précunieux sur lequel il se déchargeait des affaires courantes de la foi, offices et menus sacrements, pendant que lui-même vaquait à des besognes moins pieuses ou des lieux infiniment plus réjouissants.
Toutefois, cet absent récoltait scrupuleusement la dime (dixième des récoltes des paysans) dont il reversait une part sous forme de pension alimentaire à son modeste travailleur du goupillon. « Les portions congrues se taxent aux Curez au Grand Conseil à 200 livres, et au Parlement, à 300 livres, suivant deux diverses déclarations qui y ont été vérifiées. Au-delà de la Loire on n’adjuge que 200 livres, en deçà jusqu’à 300 livres ». Si on en croit Furetière il semble bien que les salaires aient toujours été un peu plus bas « au-delà de la Loire » sans doute à cause du soleil…
En tout cas cette portion congrue, calculée au plus « juste », faisait des desservants de nombreuses paroisses de malheureux smicards en soutanes râpées. Cela explique peut-être qu’à la Révolution tant de petits prêtes se soient désolidarisés de leurs prélats, et aient embrassé la cause des sans-culottes et des partageux. Au fait « congru » du latin congruus, veut dire « convenable »…. Comme qui dirait suffisant.
Extrait de La Puce à l’Oreille de Claude Dunetton
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