L’histoire de Pierre le Vénérable
Posté par francesca7 le 24 mars 2015
Abbé de Cluny de 1122 à 1156 et grand intellectuel du XIIe siècle (Montboissier, Auvergne, 1094 - Cluny 1156).
Écolâtre puis prieur de Vézelay, Pierre le Vénérable est choisi comme abbé de Cluny en 1122, alors que la congrégation clunisienne traverse une crise profonde. En effet, depuis le début du XIIe siècle, le monachisme clunisien est sévèrement critiqué par les moines réformateurs, en particulier Bernard de Clairvaux et Guillaume de Saint-Thierry. De plus, le précédent abbé, contraint d’abdiquer par le pape, conteste l’élection de Pierre le Vénérable jusqu’en 1126. Cependant, à partir des années 1130, celui-ci entreprend de restaurer à la fois le patrimoine et le prestige de Cluny. Tout d’abord, il s’inspire du système cistercien des granges et des frères convers, et s’appuie sur une saine gestion des domaines, de manière à assurer le retour de la prospérité. Ensuite, le chapitre général de 1132 et les statuts de 1146 rétablissent la discipline monastique tout en renforçant la spécificité spirituelle de Cluny, c’est-à-dire la primauté accordée à la liturgie de l’office divin, face aux nouveaux ordres, en particulier celui de Cîteaux. Enfin, Pierre le Vénérable assure le rayonnement politique et intellectuel de Cluny. Ami de Suger, l’abbé de Saint-Denis, il rapproche la congrégation du royaume de France et du souverain capétien. Il participe aux grands débats de son temps en soutenant Abélard face à Bernard de Clairvaux comme en polémiquant contre les hérétiques, les juifs ou les musulmans. Il assure aussi le développement de la bibliothèque de Cluny et ordonne une traduction du Coran, qui fera autorité jusqu’au XVIe siècle. Pierre le Vénérable apparaît ainsi comme un parfait représentant de l’humanisme du XIIe siècle.
Pierre le Vénérable est né dans la famille noble des Montboissier entre 1092 et 1094 en Auvergne. Il est le fils de Pierre-Maurice de Montboissier et de la bienheureuse Raingarde de Semur.
Il entre très jeune au monastère clunisien de Sauxillanges en Auvergne, puis gravit les échelons de la carrière clunisienne : il fut notamment nommé écolâtre et prieur à l’abbaye de Vézelay dans les années 1116/1117 par le nouvel abbé de Cluny, Pons de Melgueil. Certains lui ont attribué le programme iconographique des chapiteaux de l’abbatiale romane de Vézelay.
Il voyage beaucoup et joue un rôle diplomatique important, notamment lors de l’élection pontificale lorsqu’il reconnaît en 1130 le pape Innocent II contre l’antipape Anaclet II.
Son activité intellectuelle fait de lui un représentant de la renaissance du XIIe siècle. Il fait traduire le Coran en latin, Lex Mahumet pseudoprophete. Connu comme polémiste, il rédigera ensuite des traités pour réfuter les doctrines israélites et musulmanes. En effet, il recommande d’établir des débats argumentés avec les théologiens des autres religions, plutôt que des Croisades.
Sa devise est : « La règle de saint Benoît est subordonnée à la charité ». Les accusations de Bernard de Clairvaux (saint Bernard) contre Cluny avaient été violentes et Pierre y avait répondu avec une dignité qui lui avait assuré la victoire. Il s’est ensuite réconcilié avec Bernard dont il est devenu l’ami et parfois le charitable critique. Quand Abélard, également dénoncé par saint Bernard, est condamné comme hérétique à être enfermé dans un couvent, Pierre le Vénérable l’accueille à Cluny comme un frère. À la mort d’Abélard, Pierre le Vénérable cède furtivement son corps à l’abbaye du Paraclet, dont Héloïse est abbesse, et rédige l’absolution plénière suivante : « Moi, Pierre, abbé de Cluny, j’ai reçu Pierre Abélard dans le monastère de Cluny et cédé son corps, furtivement apporté, à l’abbesse et aux religieuses du Paraclet. Par autorité de Dieu tout-puissant et de tous les saints, je l’absous d’office de tous ses péchés. ». Cette absolution fut, selon la coutume d’alors, gravée au-dessus du tombeau d’Abélard par l’abbesse.
Considéré par l’historiographie du xxe siècle comme le dernier des grands abbés de Cluny, il succède à son oncle Hugues II de Semur. Il combat également l’hérésie de Pierre de Bruys.
Il réforme l’abbaye de Cluny, en proie à des difficultés financières. Il réforme le domaine seigneurial pour assurer le train de vie des moines (Dispositio rei familiaris). Les inventaires qui sont constitués (Constitutio expense cluniaci) sont une précieuse source pour les historiens, avec des données sur les rendements, les semences, les techniques agricoles… À noter le rôle essentiel d’Henri de Blois, évêque de Winchester, dans cet ouvrage.
Pierre le Vénérable est l’auteur d’un Livre des merveilles de Dieu. L’expression « Livre des Merveilles » sera reprise par d’autres voyageurs, comme Marco Polo.
Il est aussi l’auteur d’un traité contre les juifs : Aduersus Iudœorum inueteratam duritiem. Selon Dominique Iogna-Prat, Pierre le Vénérable est un « représentant d’un antijudaïsme radical ».
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