LES HABITUDES VERTIMENTAIRES DE NOS ANCETRES
Posté par francesca7 le 7 mars 2015
C’est une banalité de dire que l’habillement, la parue, ont toujours été une des préoccupations majeures des hommes et des femmes. Les modes ont toujours changé (c’est en quelque sorte leur raison d’être) et toujours par référence à ce qui se portait dans les rangs les plus élevés de la société : pendant longtemps les cours royales et princières.
Autrefois, la mode changeait principalement de génération en génération, c’est-à-dire d’une génération régnante à l’autre, pour les grandes lignes, avec de s modifications de détail dans les parements qui sans doute permettaient aux plus riches de se trouver toujours à quelques galons d’avance, non pas sur le « commun », mais sur leurs niveaux immédiats – avance d’ailleurs protégée à certaines époques par des « lois somptuaires » qui réglementaient le port des fanfreluches selon le rang et le degré de noblesse.
En outre, le décalage était grand entre la vêture de la haute société parisienne et celle du reste du pays ; il grandissait en proportion de l’éloignement géographique. Quant au peuple en besogne il a porté longtemps et partout les restes et les défroques de ses maîtres, souvent avec une ou deux générations de retard.
Au Moyen Age le vêtement s’appelait d’une façon générique la robe. Il était composé, en plus de la chemise de la cote, pièce essentielle ; tunique à manches en forme de robe. Il existait aussi le surcot, facultatif, sorte de tunique sans manches qui se portait par-dessus la cote, et le mantel ou manteau – appelé parfois robe. Une forme plus robuste du manteau pour le voyage et pour la pluie s’appelait la chape.
Cela aussi bien pour les femmes que pour les hommes, le costume étant identique. Que eux qui s’effraient encore de voir aujourd’hui garçons et filles vêtus de la même manière se rassurent tout à fait : le vêtement unisexe n’est pas une nouveauté dans l’histoire ; Je dirais même que c’est à partir du moment où le costume masculin a commencé à se différencier, vers la fin du XIVè siècle, que la société médiévale déjà peu facile pour les femmes est devenue de plus en plus misogyne.
J’ajoute que la différenciation ne s’est jamais faite pour les gens d’Eglise, ni pour les enfants, lesquels jusqu’au XVIIè siècle ont continué à être vêtus uniformément de la même et ancienne « robe » jusqu’à l’âge de sept ou huit ans.
Voici un aperçu de la mode dans le premier tiers du XIIIè siècle, donné par Jean Renart dans le Guillaume de Dole. D’abord un surcot exceptionnellement riche, porté à même la chemise par un jeune homme qui s’en sert de « robe » de chambre :
troeve ostel a son gré
et bacheler a sa devise
qui ert en trop bele chemise
oz deffublez em pur le cors
fors d’un sercot dont ili ados
ert bendez d’ordrois d’Engleterre
c’en porroit ja assez loig querre
ainsçois qu’en trovast le pareil
la pene ert d’un cendal vermeil
s’ert trop bel au col herminé
de pesnes de boutons doré
A présent un manteau d’apparat qui vient d’être acheté :
La soe robé apareille
ses niez, qui est bele a mervelle
d’un samit inde a pene hermine
onques si blanche ne si fine
ne fut nule, ne miez ouvree
Voici enfin la belle Liënor en train de s’habiller pour rendre visite à la cour de l’empereur, et telle qu’elle sera au bord de la cuve où est plongé le sénéchal félon…
Sor chemise blanche aflouree
en vesti la cote en puret
mes el estoit d’un cendal vert
tote forree et cors et manches.
El ot un poi basses les hansches
et grailles lans, et biau le pis
Un poi fu plus haus li samis
desus la mamelete due
…
Li couls fu lons et gras et blans
par reson, sanz gorme et sanz fronce
Onques damoisele, selonc ce
qu’ele estoit triste et dolente,
ne sot plus bel metre s’entente
en li acesmer et vestir
Por sa gorge parembelir
mist un fermail a sa chemise,
ouvré par grande maiestrise,
riche d’or et bel de feture
basset, et plain doi d’overture
et si que la poitrine blanche
assez plus que n’est noif sor branche
li parut, qui mout l’amenda.
Que q’ele se ceint et lia
de sa guimple et de sa ceinture,
dont li ors de la ferreüre
valoit plus de XXV livres.
Extrait de La Puce à l’Oreille de Claude Dunetton
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