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    La France, je l'aime corps et biens, en amoureux transi, en amant comblé. Je la parcours, je l'étreins, elle m'émerveille. C'est physique. Pour l'heure, c'est le plus beau pays du Monde, le plus gracieux, le plus spirituel, le plus agréable à vivre. En dépit de ses défauts, le peuple français a des réserves inépuisables de vigueur, d'astuce et de générosité. j'écris cela en toute connaissance de la déprime qui périodiquement enténèbre nos compatriotes. Ils ont une pente à l'autodénigrement, une autre au nihilisme. Je suis français au naturel et j'en tire autant de fierté que de volupté. J'ai pour ce vieux pays l'amour du preux pour sa gente dame, du soudard pour la servante d'auberge, de l'érudit pour ses grimoires, du paysan pour son enclos, du bourgeois pour ses rentes, du croyant des hautes époques pour les reliques de son saint patron... J'ai la France facile, comme d'autres ont le vin gai ; je l'ai au coeur et sous la semelle de mes godasses. Je suis français, ça n'a pas dépendu de moi et ça n'a jamais été un souci. Ni une obsession. Toujours un bonheur...

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Expression : LES GRANDES BOUFFES

Posté par francesca7 le 7 septembre 2014

 

 

images (16)Qu’on le veuille ou non, le verbe « bouffer » est devenu dans le langage familier quotidien le synonyme usuel de « manger ». Il est en train de perdre totalement dans les jeunes générations le côté légèrement agressif qu’il avait conservé chez ceux qui l’employaient il y a quelques années avec une pointe de provocation. Il est devenu aussi naturel que les pantalons pour tout le monde et les cheveux longs. 

En 1973, le film de Marco Ferreri La Grande Bouffe (dialogues de Francis Blanche) a sans doute aidé à cette banalisation du mot chez les adultes, alors que « manger » tend à devenir un terme plus général et en quelque sorte plus abstrait. 

Bouffer supplante peu à peu dans l’usage courant des verbes tels que déjeuner, dîner, souper, peut-être parce que les repas en question, outre qu’ils se réfèrent à une organisation familiale souvent mal supportée par les jeunes ne se distinguent plus pour beaucoup de gens par un caractère bien défini, et n’ont plus un horaire très strict. On bouffe à n’importe quelle heure, c’est ça la liberté…. On se fait même des petites bouffes, gentiment, entre soir, pour le plaisir.

Le mot a d’abord voulu dire, dès le XIIè siècle, « souffler en gonflant les joue ». De là son développent d’une part en « gonfler » – un tissu bouffant (suivi en cela par sa variante bouffir ; un visage bouffi) – d’autre part en expression de la colère ou de la mauvaise humeur : « Li roi l’entent, boufe et soupire » (XIIIè). Sens que son homologue occitan bufar, « souffer », a toujours conservé : Que bufes ? Parce qu’un homme contrarié souffle bruyamment, comme aussi un taureau prêt à charger. 

« Le sens de « manger gloutonnement » est attesté indirectement dès le XVIè siècle par bouffeur et plus tôt par bouffard » (Bloch et Wartburg), ce qui rend inexacte la remarque de Littré : « Le langage populaire confond bouffer et bâfrer ». Il ne confond rien, mais il est possible qu’il y ait eu à l’origine une attraction entre les deux mots, la forme ancienne de bâfrer étant « baufrer ».  » Et après, grand chère à force vinaigre. Au diable l’ung, qui se faignoit ! C’estoit triomphe de les veoir bauffrer » (Rabelais). Cela  dit la constatation de Littré doit avoir du vrai pour le passage de  « souffler » à « manger gloutonnement » ; « il bouffe bien ; sans doute à cause de la rondeur des joues, quand la bouche est pleine. Mais ce n’en est pas moins une locution rejetée par le bon usage », ajoutait-il prudemment ; 

Les usages changent. Bouffer, manger ? Peu importe. Manger vient lui-même d’une plaisanterie en latin, manducare qui voulait dire « jouer des mandibules ». L’essentiel, n’est-ce pas, est d’avoir quelque chose à se mettre sous la dent.

 

EXTRAIT de LA PUCE A L’OREILLE de Claude Duneton – Editions Stock 1973 – Anthologie des expressions populaires avec leur origine. 

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Expression : Ahuri de Chaillot !

Posté par francesca7 le 7 septembre 2014

          

 

Homme niais, ahuri 

La source de cette expression reste très souvent introuvable, mais on peut cependant remonter le ru un peu plus loin.

 Paris75-5-

Première moitié du XVIIe, plus exactement en 1637, paraît une comédie de mœurs, écrite par un auteur resté inconnu, tant il se voulait Discret ( L.C), pièce jouée par un acteur célèbre du théâtre du Marais, Alizon, qui donne son nom à l’œuvre.

On y voit une vieille galante, Alizon Fleury, tourner en bourrique plusieurs amoureux, dont un certain Monsieur Karolu, bourgeois nanti de Paris qu’elle prétend épouser.

Un beau jour, le couple, accompagné d’un ami et des filles de la veuve blette, décide d’une équipée champêtre, par voie fluviale. On ira à Chaillot en suivant le fil de l’eau, en bateau.  Pas question de prendre le bateau à un sol et de côtoyer tout un chacun, un bateau privé, sinon rien. 

Se présente un batelier, un de Chaillot, le type même du benêt dont la joyeuse compagnie ne perdra pas une occasion de se moquer, jusqu’à le faire sortir du bateau, sous prétexte de lui offrir quelques gondoles à boire, pour lui fausser ensuite compagnie sans l’avoir payé ! 

Et voilà donc le batelier, comme dans le dicton «aheury de Chalièot, tout estourdi sortant du bateau » . 

Alors, illustration du proverbe, montrant qu’en 1635 (la pièce aurait été jouée avant que d’être publiée) il était déjà bien connu, ou origine possible du dicton à chercher dans cette pièce populaire ? 

Par ailleurs, l’auteur s’amuse effectivement à glisser plusieurs dictons et proverbes  tout au long du texte. Acte trois, scène IV, le batelier, sorti du bateau, attend stupéfait sa clientèle qui ne reviendra pas:

« Je serais bien payé de ma peine aujourd’huy; 
Jamais je ne mettrais ma fiance en autruy.
 
Tousjours argent contant avant que je demare
Le monde maintenant me semble bien avare :
 
Pour avoir beu deux coups, mangeant des reliquas,
 
Un louis de trente sols payera mon repas.
 
C’est vendre un peu trop cher une telle denrée.
 
La campagne n’est plus du soleil éclairée :
 
Il s’en va toute nuict.
 Ha ! je suis attrapé ! 
Ils ont heureusement de mes mains échappé. 
Que l’on void de méchians dans le temps où nous
 
[sommes !
 
Il faut que mon batteau je ramène aux Bons-Hommes.
 
Peut-estre, en m’en allant, trouveray-je quelqu’un.
 
A Paris ! à Paris ! allons, un sol chacun.»

 

Ahuri de Chaillot. Abruti, écervelé, imbécile, homme un peu fou :

           » On acheva le cassis, Gervaise souhaita le bonsoir à la compagnie. Lorsqu’elle ne parlait plus, elle prenait tout de suite la tête d’un ahuri de Chaillot, les yeux grands ouverts. Sans doute elle voyait son homme en train de valser ». É. Zola, L’Assommoir,1877, p. 785.

          Une des nombreuses parodies de Taronnet (…) porte pour titre : Les Ahuris de Chaillot ou Gros-Jean Belesprit. L. Rigaud, Dict. du jargon parisien, L’Argot ancien et moderne, 1878, p. 76. 

 Chaillot, qui fut un des plus anciens villages des environs de Paris, devint du jour au lendemain, par édit royal rendu en 1659, faubourg de la ville, et reçut en même temps le nom de faubourg de la Conférence, Les habitants de Chaillot se réveillèrent ainsi Parisiens, sans trop savoir pourquoi, et furent plutôt étonnés du brusque changement de nom de leur localité ; ils en lurent même ahuris et les Parisiens lancèrent à ce moment l’expression qui est restée.

De bons auteurs, tout en conservant cette explication, placent le fait en 1786, moment où Chaillot fut compris dans Paris par la construction du mur d’octroi. Mais la locution semble plus vieille, et d’ailleurs en 1786 on appelait encore Chaillot : le faubourg de la Conférence.

Ahuri de Chaillot !

 

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Lodève , ville de Louis VIII

Posté par francesca7 le 6 septembre 2014

 

(D’après « Le Magasin pittoresque » paru en 1906)

 
 
220px-Louis_VIII_le_Lion_(Jean-Fouquet)Les amateurs de pittoresque et les chercheurs de souvenirs auraient de quoi se satisfaire si, profitant d’une villégiature, ils allaient visiter l’ancienne cité des Volques, Lodève, plus tard, la ville de Louis, sise dans une vallée des Cévennes, au confluent de la Lergue et de la Soulondre. Posée au cœur de ce vallon comme un bouquet au fond d’une corbeille, elle est entièrement visible de tous les points, car de partout des monts l’enclavent et, de leurs cimes, permettent au regard d’en embrasser l’ensemble.

La hauteur la mieux située pour en analyser les détails est le Rocher des Fourches, mont sourcilleux menaçant la route de Montpellier. Au premier plan, la hauteur de Montbrun et la ville ; au second, les pentes du Grésac où s’étagent des vignes, que peuplent des mas, avec leur laurier en sentinelle dans un angle et la porte ombragée de la treille légendaire. L’arrière-plan et les lointains sont formés par la chaîne imposante de l’Escandorgue, contrée jadis volcanique, qui découpe ses crêtes élevées sur un ciel chaud et presque toujours bleu.

 

Vue de Lodève au XIXe siècle

 De temps très ancien, on fabriquait à Lodève le drap de troupes, fabrication bien réduite depuis la fin du XIXe siècle. Avant que Louis VIII s’intéressât à elle au point de lui donner son nom, que Henri IV et Sully l’avantageassent et que Colbert y fît construire des usines et la désignât fournisseuse de l’État, Lodève était une pépinière de tisserands et de fileurs. Chaque famille possédait son métier à tisser. Plus tard, ces métiers épars se réunirent. Plus tard encore, le monopole s’imposant et des capitalistes le désirant, les groupes se fondirent dans neuf ou dix usines qui absorbèrent tout le travail du pays. Ces usines, à la force hydraulique d’abord, ensuite à la vapeur, prospérèrent et furent le bien-être de la contrée de nombreuses années.

On ne peut guère fixer une date à la fondation de Lodève, mais on s’en fait une idée en apprenant qu’elle était en guerre avec les Romains, plus de cinq cents ans avant Jésus-Christ. La nuit des temps plane sur son origine. Placée au confluent de deux rivières, sur une colline en dos d’âne, première assise du Grésac, et à l’entrée du profond défilé des Fourches, elle était une des portes des Cévennes, et l’on conçoit que sa position stratégique ait fait choisir de bonne heure son emplacement par les premiers habitants du pays, sans doute l’avant-garde des Celtes venus d’Asie.

La légende attribue le nom de Lodèva à L’os d’Eve, trouvé là, paraît-il. Mais n’est-ce pas le comble du songe de supposer qu’un os, fémur ou tibia, humérus ou clavicule de la mère des humains, soit venu du paradis terrestre s’échouer sur les berges de la Largue ou de la Soulondres ? Peut-être les Celtes l’y apportèrent-ils, eux qui avaient passé à travers le paradis perdu ? Mystère !

A gauche du Rocher des Fourches se dresse la colline de Montbrun, où s’élevait le château féodal de ce nom. Le premier qui l’habita quand il ne se composait encore que d’une grosse tour, fut Harvaldus, comte de Lodève, en l’an 800 ; le second, Adon Ier, son fils et le troisième, Heldin, lequel, toute sa vie, semble avoir eu l’Évêque de Lodève pour bête noire. Il subsiste encore une légende locale à ce sujet ; mais elle est manifestement le résultat d’une erreur historique avant d’être une erreur des sens, puisqu’on y dit que le seigneur Heldin tirait le canon contre le clocher de l’Évêque, et cela au Xe siècle, alors que la découverte de la poudre ne devait avoir lieu que 400 ans plus tard.

Après Heldin, le comté de Lodève devint vicomté sous la suzeraineté de Guillaume Taillefer, seigneur de Toulouse. Ce privilège passa après aux comtes de Rodez, lesquels le vendirent avec tous les droits et prérogatives sur le Lodévois, pour 60 000 sols melgoriens, à Raymond de Madières, 42e évêque de Lodève en 1188. Et ce fut en 1225, sous le pontificat de Pierre IV, évêque, que le roi Louis VIII reconnut aux prélats de la cité le titre de comtes de Lodève et de Montbrun et leur accorda, en même temps, le droit de battre monnaie. Ce droit, ils le perdirent plus tard ; mais ils conservèrent le titre jusqu’à la Révolution, sous François-Henri de Fumel, le 109e évêque, de regrettée mémoire.

Sur la colline de Montbrun, il ne reste du passé qu’une longue muraille dentelée et une citerne vide à ciel ouvert. De la vigne chétive et des câpriers poussent sur un sol pauvre et éternellement lavé par les orages. C’est le refuge des couleuvres frileuses et des lézards gris qui y poursuivent les mouches. On y cherche en vain l’ombre de la douce Archimberta, la femme de Heldin et la mère de Nobilia ; le souvenir de Hugues II devenu évêque de Rodez ; de Ermengarde sa sœur qui prit le voile à Nonnenque et y mourut victime de son dévouement ; tant d’autres qui ennoblirent cette forteresse disparue et ce mont si vivant, aujourd’hui solitaire.

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 Pont sur la Soulondre et Tour de Saint-Fulcran

 

De là, on plane sur la ville, sur toute la vallée lodévoise au sol vert, aux vignes touffues, aux olivettes en quinconces, aux routes bordées de platanes géants, sur les pentes boisées d’arbousiers et d’yeuses, vallon chaud, plafonné d’un ciel italien et éclairé d’un soleil d’or. En descendant de Montbrun, on rencontre un pont de pierre. Il est étroit, avec deux refuges triangulaires. Ce pont est tout jaune et comme enfumé ; des œillets poussent entre les pierres et une végétation robuste de pariétaires le voile, comme voulant cacher sa vétusté. Il y a deux arches. En amont et en face de sa pile unique, se dresse une tour carrée et pleine ; c’est le brise-lames, le bouclier du pont.

Il semble plus âgé que la cité, ce pont. A quelle époque a-t-il été construit ? Au XIIe siècle peut-être, alors que Raymond de Madières, évêque de Lodève, acheta à Hugues II, comte de Rodez, la propriété de Montbrun et fit tracer le chemin à marcher qui longe le torrent de Bélbézès pour desservir le manoir ? Mais est-ce bien sûr ? Il était le seul pont reliant Montbrun à la ville, ce qui laisse supposer qu’il est de beaucoup antérieur à Mgr de Madières et qu’il a dû servir aux premiers seigneurs de Montbrun, lesquels, sans lui, se fussent trouvés isolés sur leur roc. A première vue, on a l’impression que tout le Moyen Age a passé sur lui. On le nomme le pont vieux.

Après l’avoir franchi, on arrive sur les boulevards, place des anciennes fortifications, aujourd’hui le tour de ville. En remontant le boulevard du côté de la Soulondre, on rencontre un enclos dans lequel il y a une tour. C’est l’enclos du collège. La tour a une origine lointaine ; elle porte à son faîte les pierres en saillie qui soutenaient les mâchicoulis. C’était une tour d’angle de la citadelle ; elle est aussi robuste qu’à ses premiers jours. Sous le toit, pend une cloche que le concierge met en branle aux heures de travail et de récréation.

Il existe trois tours comme celle-là à Lodève, la seconde sur le boulevard du Quai, la troisième à l’angle du boulevard Montalangue. Cette dernière a souffert des morsures du temps. Elles datent du XIIe siècle. Par la montée dite de Saint-Fulcran, on arrive sur la place de la cathédrale. Il y là les jardins des abbayes de Saint-Sauveur et Saint-Benoît, la première acquise par saint Fulcran, 30e évêque de Lodève, la seconde construite par lui dans les années 973 et 974. Ce prélat, qui était de haute noblesse et possédait une fortune princière, fit des dons considérables non seulement dans son diocèse, mais dans ceux de Montpellier et de Maguelonne, ce dernier, berceau de sa famille.

En arrivant sur le parvis, on voit, en face, les bâtiments de l’antique évêché, quoique son aspect, aujourd’hui, n’éveille rien d’antique. La porte monumentale se projette, et deux retraits en quart de cercle supportent des vases et des corbeilles de pierre où sont sculptés des flammes, des fruits et des fleurs. Certains font remonter l’origine de cette porte à Louis VIII. Elle est plutôt de Louis XIII par son style Renaissance. Le palais de l’évêché est au fond de la cour. L’aile de droite est le presbytère, le jardin de l’Evêché se trouve derrière. Ce jardin qui a vu plus de cent prélats, depuis saint Flour jusqu’à Fumel, est aujourd’hui un parc public, comme le palais est devenu l’Hôtel de Ville, comme son grand salon est devenu la salle du tribunal civil ; les autres pièces, la salle du conseil municipal, de la Justice de Paix, de la bibliothèque, etc.

 Lodève , ville de Louis VIII dans VILLAGES de FRANCE Lodeve-3

Cathédrale Saint-Fulcran à Lodève

 

La cathédrale ressemble à une aïeule donnant la main à un enfant. C’est non seulement le monument le plus ancien, mais le plus remarquable de Lodève. D’un style gothique, avec des parties de flamboyant. Partout l’ogive aux fines nervures ; nulle part le plein-cintre. Sa voûte, où court un parapet et que terminent deux tourelles à ciel ouvert, a 26 mètres de haut sur 107 mètres de long. Son clocher, tour carrée et robuste, a 52 mètres l’élévation. Il y a mille ans que tout cela est debout.

C’est l’évêque Fulcran qui fit élever cet imposant édifice. Ce prélat a laissé un si lumineux souvenir que son nom est entouré d’une vénération universelle. Fulcran fut le patron de Lodève. La plus grande fête, comme la plus grande foire, ont nom de Saint-Fulcran ; des rues, des avenues, des places, sont connues sous ce nom-là, et Lodève elle-même s’appelle : ville de Fulcran. Cet évêque descendait en ligne directe des comtes de Maguelonne par son père, et des comtes de Substantion, vieille villa Romaine, par Eustorgia, sa mère. Deux grands noms unis à deux immenses fortunes.

Louis8lelion.jpgFulcran vit le jour à Malaviella, propriété de sa mère, ou plutôt à Mérifous, qui en était une dépendance. Né en 909, Fulcran monta à 40 ans sur le trône épiscopal, où il passa 57 années. La première pierre de la cathédrale fut posée en 969 ; la construction dura cinq ans. L’évêque y consacra une partie de sa fortune.

En montant 280 marches, on arrive au dernier étage de la tour, où se trouvent les cloches. Devant la première ouverture, on s’arrête et on ferme les yeux. A cette hauteur, le vide prend le front, trouble le regard, et le vertige apeure. L’impression dissipée, on regarde. Toute la ville ondule et dévale jusqu’au confluent. Toute la vallée se déploie, majestueuse et belle, avec sa ceinture de collines et de monts rocheux, ardus, sauvages, aux bases pavées de prairies, étagées de vignes et bouquetées de bois.

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Aux abords de la Rade de Brest

Posté par francesca7 le 6 septembre 2014

 

220px-Vue_cavalière_de_BrestEn raison de la remontée du niveau des mers après les dernières glaciations quaternaires, les cours d’eau, même les plus modestes, ont de larges et profonds estuaires dénommés rias ou abers, pénétrant profondément à l’intérieur des terres, les parties aval des anciennes vallées ayant été envahies par la mer lors de la montée des eaux consécutive au réchauffement climatique post-glaciaire : c’est ainsi que Landerneau, Daoulas, Le Faou, Châteaulin sont ou ont été des ports de mer et qu’aujourd’hui encore, l’influence des marées se fait sentir jusqu’au niveau de ces localités (sauf pour Châteaulin sur l’Aulne où l’aménagement de l’écluse de Guily-Glas à Port-Launay a justement été fait pour l’éviter). Le port de Brest est né dans la ria de la Penfeld, profitant lui aussi du tirant d’eau important malgré la modestie de ce petit fleuve côtier. Ce n’est qu’à partir duSecond Empire que progressivement le port s’est étendu en rade de Brest.

Depuis de nombreux siècles, Brest est un important port militaire. Ainsi, la rade de Brest possède de nombreuses installations militaires, telles que :

  • l’arsenal de Brest, au nord de la rade ;
  • la base opérationnelle (base sous-marine) de l’île Longue, au sud-ouest ;
  • l’École navale et le groupement des écoles du Poulmic, à Lanvéoc ;
  • le cimetière des navires de Landévennec.

On y trouve également nombre de vestiges de fortifications militaires et de vestiges des siècles derniers, comme les forts du Portzic, de la pointe des Espagnols, de la pointe de Lanvéoc, de lapointe de l’Armorique, de la pointe du Corbeau, les ducs d’Albe près de la pointe de l’Armorique et ceux qui ont servi de support à la construction de l’appontement pétrolier de Lanvéoc, la ligne de fortifications de Quélern…

De nombreux ports sont installés depuis longtemps sur le pourtour en particulier dans les estuaires et plus précisément les fonds d’estuaires qui étaient le lieu d’échange des charges routières et marines. Landerneau, au fond de la ria de l’Élorn en a tiré une grande richesse, dès le Moyen Âge, étant encore, en 1790, la deuxième ville la plus riche du département naissant (après Morlaix), en disputait le chef-lieu à Quimper. Brest n’était alors qu’un port militaire qui offrait peu de place dans le maigre estuaire de la Penfeld aux rares bateaux de commerce.
Ce n’est qu’au milieu du xixe siècle que le remblaiement de la plage de Porstrein permettra de créer des quais utilisant des tirants d’eau exceptionnels allant jusqu’à 20 mètres. On a d’ailleurs envisagé vers 1975 de créer un port spécifique aux énormes pétroliers géants sur la presqu’île de Plougastel. Châteaulin, situé dans l’estuaire le plus long, celui de l’Aulne a également été un lieu commercial très actif, car situé sur un carrefour sur un axe routier majeur reliant le Nord au Sud et ouvert sur de vastes territoires ruraux dans chaque direction.

L’Annuaire de Brest décrit ainsi en 1840 le service de la rade :

« [Pour la rade], les chaloupes partent de la cale aux vivres, à Recouvrance, le lundi et le vendredi de chaque semaine, de 2h à 4h du soir (…); le prix du passage ne s’élève pas au-dessus de 50 centimes. Elles se rendent aux lieux suivants : la côte de Plougastel depuis Saint-Jean, L’Hôpital, Daoulas, Le Faou, Landévennec,Lanvéoc, Le Fret, Rostellec, Quélern, Roscanvel, Camaret. Elles partent des mêmes lieux pour Brest, le lundi et le vendredi, de 4 à 5, 6, 7 ou 8 heures du matin. »

Le petites villes de Daoulas et du Faou gardent aussi les traces bâties d’un important trafic commercial médiéval sur leurs estuaires propres. Les ports de Crozon et de Lanvéocsont directement sur le rivage, mais ont été les points d’appui d’un important et ancien trafic de cabotage pour lesquels des bateau de charge à voile ont été développés. Ce cabotage bénéficiait donc de nombreux lieux d’atterrage d’une grande sécurité sur une très vaste superficie. Les produits transportés étaient essentiellement des produits agricoles et des matériaux de construction (pierre à bâtir, sable, maërl, chaux, bois) et ce trafic a été stimulé par l’ouverture du Canal de Nantes à Brest en 1858 en permettant à des péniches de remonter et descendre dans tout le centre de la Bretagne. Le transport des passagers complétait les charges, car, à la belle saison, il permettait d’éviter de longs déplacements sur des routes souvent de mauvaise qualité.

La rade abritait autrefois en raison de sa configuration une grande diversité d’habitats naturels, une productivité biologique et une biodiversité très élevée. Elle comprend encore des sites d’importance communautaire européenne pour les oiseaux, plusieurs réseaux d’habitats et de corridors biologiques sous-marins et littoraux importants, qui ont été très affectés par les activités humaines pour la partie nord-ouest, mais qui ont justifié le classement d’environ la moitié de la rade en zone Natura 2000.

La_rade_de_Brest_et_l'escadre_cuirassée-Michel_Willenich_mg_8189

Une étude a porté sur l’incidence des cancers des enfants (de 1991 à 2005) autour de la rade, en raison de la proximité d’une base de sous-marins. Un excès d’incidence des leucémies existe dans le Finistère, dû à un excès en 2000-2001 à Brest (qui évoque une cause environnementale ponctuelle dans le temps), sans qu’on ait pu l’associer aux sites nucléaires de défense. L’incidence de tous les cancers (hors leucémie) a également augmenté sur la totalité du Finistère de 1999 et 2004, mais pas localement ; ni dans la rade de Brest ni à Brest.

La rade est également victime des séquelles de guerre et en particulier des séquelles des vagues de pollutions que la rade a connues lors de la Première ou de la Seconde Guerre mondiale (1939-1945). Les pollutions relictuelles liées aux munitions immergées ou non explosées peuvent s’aggraver avec les premières fuites massives, que les experts prédisent dans les années 2000-2010.

La rade abrite encore quelques petits herbiers de zostères (équivalents atlantiques des posidonies de Méditerranée). Ces prairies sous-marines sont peu profondes, dont l’une àKernisi découvre même à marée basse, ce qui est devenu exceptionnel dans le Finistère. Les ancres et leurs chaînes ainsi que les corps-morts et certains matériels de pêche dégradent ces herbiers.

Les zostères sont à la fois abri, zone de frayère et de nutrition, nourricerie pour de nombreuses espèces, constituant un habitat irremplaçable pour certaines et alimentant lalaisse de mer. Elles sont notamment l’habitat exclusif de l’hippocampe, qui régresse à la même vitesse que les herbiers.

La « Légende des Sept-Saints » concerne sept enfants qui auraient erré en rade de Brest de Landévennec, au Faou et à Daoulas, et parvenus jusqu’à Brest. La première paroisse de Brest leur fut consacrée (paroisse des Sept-Saints). Le texte intégral des différentes versions de cette légende est consultable.

La rade de Brest est une grande baie de 180 km² située dans le Finistère en France. Elle est reliée à l’océan Atlantique, nommé à cet endroit la mer d’Iroise, par un passage large de 1,8 km qui se nomme le goulet de Brest.

Ce très grand plan d’eau est navigable toute l’année.

 

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Une rivière qui déserte

Posté par francesca7 le 6 septembre 2014

 

259cd5ba-5a60-11e2-922f-0c1a40f503f3-200x300IL Y A CENT ANS DANS LE FIGARO – Tous les week-ends, Le Figaro explore ses archives de l’année 1913. Le 9 janvier, le journal narre comment la ville de Metabief (Doubs) a subitement perdu sa rivière.

Article paru dans le Figaro du 9 janvier 1913.

Les habitants de Métabief (Doubs) ne sont pas contents, parce qu’ils ont perdu leur rivière. C’était une charmante petite rivière. Elle ne faisait pas d’embarras, ne roulait pas de gros cailloux, et n’avait jamais englouti personne. Pour la connaître, il fallait être du pays. Elle sortait de terre à l’entrée du village, et aussitôt s’ingéniait à se rendre utile. Elle faisait donc tourner les quatre roues de quatre usines. Puis elle vagabondait un peu à travers la campagne, et allait se jeter dans le Doubs, comme une fillette lassée d’avoir trop couru, et qui vient se réfugier dans le giron maternel. Elle s’appelait le Bief-Rouge. Il n’y a plus guère que les sculpteurs pour croire encore aux divinités des sources et des rivières. Si l’un d’eux avait voulu représenter la naïade du Bief-Rouge, il lui aurait, je pense, donné les traits et le costume d’une brave petite campagnarde, déjà bonne ménagère, et qui joue à cache-cache après qu’elle a fait cuire la soupe.

Or, un drame est survenu. La rivière, soudain, a jeté son bonnet, par-dessus les montagnes. Depuis fin décembre 1912, elle coule en Suisse.

Vous pensez bien qu’elle n’a pas renoncé ainsi à toute une vie de labeur tranquille sans y avoir été fortement sollicitée. Encore ce mot est-il trop doux. Il a fallu employer les moyens les plus violents pour détourner cette honnête personne de ses devoirs. C’est un rapt. C’est un enlèvement.

On est en train de percer un tunnel, le tunnel de Frasne-Vallorbe, à travers le Mont-d’Or, la plus haute montagne du département. Or, au moment même où les habitants de Métabief constataient la disparition de leur rivière, les ouvriers du tunnel voyaient une énorme masse d’eau envahir leur chantier. Il faut en conclure qu’ils avaient, sans le savoir, crevé une poche d’eau et coupé ainsi un cours d’eau souterrain important. Par le trou qu’ils avaient percé, les eaux coulèrent dans le tunnel, et se précipitèrent, suivant la pente, en territoire suisse. A l’heure actuelle, les eaux du Bief-Rouge, au lieu d’aller grossir le Doubs français, vont grossir l’Orbe suisse.

Il y eut une grande émotion. Le Conseil municipal de Métabief ne manqua pas de se réunir et de faire constater officiellement que les sources du Bief-Rouge étaient taries. En temps de crue, elles débitaient quatre à cinq mètres cubes d’eau à la seconde. Aux époques les plus sèches, un quart de mètre cube environ. De grandes pluies étant survenues, quelques gouttes d’eau revinrent dans le lit de la rivière. Et puis elles s’en allèrent. A l’heure où j’écris, les sources du Bief-Rouge ne sont plus représentées que par quelques cailloux polis. Je les ai vues le 8 janvier sans plaisir. Les quatre usines sont arrêtées, et l’un des usiniers, M. de Lénoncour, ne fait pas placer une turbine qu’il venait d’acheter au moment où l’événement s’est produit.

Cependant, les ingénieurs du tunnel sont aussi ennuyés d’avoir de l’eau que les riverains du Bief-Rouge sont ennuyés d’en manquer. Et déjà ils prennent des mesures pour tenter de ramener en arrière la rivière séduite. Un homme prétend que leurs efforts seront probablement inutiles. Et on ne saurait négliger sa voix. M. Fournier est professeur de géologie à la Faculté des sciences de Besançon. Disciple de Martel, il explore depuis vingt ans le sous- sol du département, et en étudie l’hydrologie souterraine. En outre, il a prédit, voici dix ans, ce qui arrive aujourd’hui. En novembre 1905, il écrivait, une fois de plus:

«Le percement du Mont-d’Or aura pour effet de faire tarir les sources qui alimentent les villages de Jougne, Saint-Antoine, Métabief et Les Hôpitaux.»

Alors, puisque l’événement lui donne raison en ce qui concerne Métabief, il n’est personne, dans le département du Doubs, qui ne conçoive des craintes pour Jougne et Saint-Antoine. Et les habitants des Hôpitaux ne sont pas rassurés. D’autant que M. Fournier n’hésite pas à proclamer aujourd’hui que le Doubs lui- même est menacé. «L’existence de la rivière le Doubs est en danger», écrit-il en lettres capitales dans le Pontissalien, qui est un journal de Pontarlier.

J’ai vu M. Fournier. Ce n’est pas un savant vêtu d’une sévère redingote, et qui professe cérémonieusement. Quand il descend de sa chaire, c’est pour aller ramper dans les grottes. Aussi portait-il un petit veston de velours jaune, et avait-il de fortes chaussures. Il me parla avec une clarté que je désespère d’égaler.

-Le tunnel du Mont-d’Or, me dit-il, est un tunnel d’altitude. C’est-à-dire qu’il traverse la région des eaux souterraines. Par opposition, un tunnel de base est creusé au-dessous de cette région, à la base de la montagne, et ne peut amener aucun trouble hydrologique.

Du moment où l’on décidait de percer un tunnel d’altitude, il était facile de prévoir ce qui surviendrait. Je l’ai prévu. Je n’y ai pas grand mérite. J’ai prévu que les perceurs rencontreraient des cours d’eau souterrains, et que plusieurs villages seraient ainsi privés de leurs sources.

En effet, on connaît aujourd’hui les lois de la circulation des eaux dans les terrains calcaires, principalement dans ceux du Jura, à quoi appartient le Mont-d’Or.

Il n’y a, dans ces terrains, ni lacs souterrains, ni nappes d’eau continues. Mais partout, il y a des fissures parfois très profondes, et remplies d’eau sous pression.

On a recoupé une de ces fissures, située à 70 mètres au-dessous du niveau du Bief-Rouge. Il s’agit de savoir si cette fissure est simplement un trou vertical, ce que nous appelons diaclase, ou bien si elle affecte la forme d’un siphon renversé. Dans ce dernier cas, il y a un remède. Dans le premier cas, il n’y en a point, et le Bief-Rouge est perdu.

-Cependant, dis-je, les ingénieurs du tunnel se flattent de ramener le Bief-Rouge dans son lit.

-Ils s’en flattent, en effet, me répondit M. Fournier. Et voici quel programme ils ont établi. D’abord ils vont élever un barrage pour maintenir l’eau. La partie achevée du tunnel étant ainsi préservée de l’inondation, ils pourront établir une galerie latérale au tunnel. Cette galerie ira rejoindre la nappe d’eau, pour en assurer l’écoulement.

Mais l’écoulement de quel côté? Du côté de la Suisse. Il ne s’agit pas en ce moment, pour, les ingénieurs, de renvoyer le Bief-Rouge dans son lit. Il s’agit de se débarrasser de l’eau. Donc, on laisse l’eau s’écouler en Suisse. Et on continue le tunnel. Lorsqu’il sera achevé, on fermera la galerie d’écoulement des eaux, lesquelles, selon les ingénieurs, remonteront alors vers leur ancien écoulement.

Eh bien! Premièrement, le percement de la galerie d’écoulement est une entreprise dangereuse. Il y a des risques nombreux de rencontrer, là aussi, des cours d’eau souterrains ou des fissures, c’est-à-dire de provoquer de nouveaux écoulements. Au lieu de diminuer le mal, on l’aggrave.

En outre, il faudra huit mois au moins pour l’achèvement du tunnel. Croit-on que pendant ce long délai, les eaux n’emploieront pas leurs forces? S’imagine-t-on qu’elles sont enfermées dans des vases étanches? Comment! J’ai constaté parfois des pressions de 30 atmosphères dans les siphons naturels des eaux souterraines. Je suis descendu à 253 mètres de profondeur dans le lit d’une rivière souterraine dont l’eau remonte jusqu’à la surface, en temps de grandes eaux. Je sais que les rivières souterraines deviennent, à certaines époques, des torrents d’un débit colossal et d’une puissance dynamique considérable. Et l’on voudrait me faire admettre que toutes ces forces se laisseront annihiler par un barrage, qu’elles n’agiront point, qu’elles ne chercheront point une autre issue que celle de la galerie, qu’aucun drainage ne se produira, et enfin que les «phénomènes de capture» cesseront de jouer!

On déplace le niveau d’équilibre de plusieurs cours d’eau. On modifie leur équilibre même. Et c’est pourquoi j’ai pu dire que le Doubs lui-même est en danger. Les ingénieurs jouent avec des forces qu’ils ignorent.

Mais ce n’est pas tout. Les parois du tunnel pourront-elles résister aux pressions formidables des eaux qu’elles devront maintenir? C’est encore un problème. On annonce qu’elles seront renforcées. Tant mieux.

-Alors, ai-je dit, à votre avis, le Bief-Rouge est définitivement perdu?

-On ne pourra le savoir qu’après avoir exploré la fissure et reconnu si elle est une diaclase ou un siphon renversé. Ceux qui affirment, avant cette constatation, qu’ils ramèneront le Bief-Rouge dans son lit, n’entendent rien à l’hydrologie.

-Et tous les cours d’eau voisins sont menacés?

-Oui, si l’on ne prend pas des mesures immédiates. J’entends bien que les moyens que les ingénieurs veulent employer sont des palliatifs, et que, pendant quelques années, peut-être, certaines rivières reprendront ou garderont leur cours et leur débit normal. Mais nul ne sait ce qui arrivera après ce délai. On entreprend une œuvre dangereuse, et j’ai voulu la signaler. Ce serait méconnaître toutes les lois de l’hydrologie que de penser que les rivières céderont aux vœux des ingénieurs.

-Alors, que faut-il faire?

-Explorer la fissure. Et si l’on reconnaît qu’on ne peut faire revenir l’eau à son cours ancien, construire un aqueduc pour l’amener à Vallorbe, en Suisse. Le tunnel du Mont-d’Or est creusé -j’ai écrit cette phrase- à peu près à l’endroit que j’aurais choisi, si j’avais voulu amener à Vallorbe des eaux aussi abondantes que possible.»

J’allais quitter M. Fournier, quand on lui apporta une dépêche. Elle était signée du maire de Malbuisson, village sis à peu de distance de Métabief. Elle disait ceci «Débit de deux sources diminué de moitié. Eau louche. Venez le plus tôt possible.»


 

 

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Perruquiers sous Louis XV

Posté par francesca7 le 5 septembre 2014

 

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Le perruquier pouvait se croire, sous Louis XV, d’une importance considérable. C’était son art qui semblait assigner à chaque personnage son rang dans le monde ; on se distinguait les uns des autres par la perruque : noblesse, tiers état, clergé, autant de degrés hiérarchiques de la société, autant de perruques diverses.

Là ne se bornaient pas les attributions du perruquier : il était en rnême temps barbier, baigneur, étuviste. En un mot, il était le factotum de la toilette, le serviteur des grâces et de la beauté, par privilège du roi.

« La beauté que nous avons assignée à nos cheveux, dit un perruquier du dix-huitième siècle, est une beauté rare ; peu de personnes, surtout les hommes, se trouvent les avoir avec toutes les qualités nécessaires, dont voici les conditions, qui sont d’être raisonnablement épais et forts, d’une belle couleur châtain, plus ou moins foncée, ou d’un beau blond argenté, d’une longueur moyenne, descendant jusqu’à la moitié du dos. Il faut encore que, sans être crêpés, ils frisent naturellement, ou du moins qu’ils tiennent longtemps garnis. Les cheveux, en général, sont sujets à bien des accidents et des défauts qu’il fallait supporter ou du moins pallier avant que la perruque eût été imaginée.

« Plusieurs se trouvaient en avoir très peu ; il y a des maladies qui les font tomber ; ils se dégarnissent quelquefois sans aucune maladie apparente, de manière que non seulement les personnes âgées mais celles qui ne le sont pas encore, deviennent chauves avant le temps. Il fallait donc se résoudre à porter des calottes, coiffures tristes et plates, surtout quand aucuns cheveux ne l’accompagnent. Ce fut pour remédier à ce désagrément qu’on imagina au commencement du règne de Louis XIII d’attacher à la calotte des cheveux postiches qui parussent être les véritables.

« On parvint ensuite à lacer les cheveux dans un toilé étroit de tisserand, comme aussi dans un tissu de frangé qu’on nomme Le point de Milan. On cousait par rangées ces entrelacements sur la calotte même, rendue plus mince et plus légère ; pour cet effet, on se servait d’un canepin (l’épiderme de la peau de mouton), sur lequel on attachait une chevelure qui accompagnait le visage et tombait sur le cou : c’était alors ce qu’on appelle une perruque. » (Art du perruquier)

On faisait d’abord les perruques à tresses sur trois soies et cousues sur rubans ; puis on parvint à imiter complètement une chevelure naturelle. Cette découverte parut « si bonne et si secourable » qu’en 1656 le grand roi créa quarante-huit charges de barbiers perruquiers suivant la cour ; deux cents charges étaient établies en faveur du public. Un autre édit en ajouta deux cents autres en 1673.

La mode nouvelle fit sortir beaucoup d’argent de France ; il fallait se procurer des cheveux à l’étranger, la production indigène ne suffisant plus. Colbert s’émut de ces exportations de numéraire ; il voulut abolir l’effet dans sa cause et remplacer les perruques par des bonnets, dont on essaya même des modèles devant le roi. Les perruquiers se hâtèrent d’adresser au roi leurs doléances et représentations respectueuses : « L’argent sorti de France pour l’importation des matières premières y rentrait et au delà par l’exportation des produits manufacturés ; la ville de Paris fournissait de perruques l’Espagne, l’Italie, l’Angleterre, l’Allemagne et autres États. »

Colbert abandonne le projet des bonnets, et les perruquiers grandirent en prospérité vers la fin du dix-huitième siècle, ils étaient au nombre de huit cent cinquante, avaient un prévôt, des gardes, des syndics, et charge héréditaire. « Ils ont droit et leur est attribué le commerce des cheveux en gros et en détail, comme aussi leur est permis de faire et vendre poudres, pommade, opiat pour les dents ; en un mot, tout ce qui peut servir à la propreté de la tête et du visage. »

Le rasoir étant instrument de chirurgie, le chirurgien avait aussi le droit de faire la barbe ; mais sa boutique devait être peinte en rouge ou en noir, couleur de sang ou de deuil, sur laquelle se détachaient les bassins de cuivre jaune qui servaient d’enseigne ; le perruquier avait à sa porte des bassins blancs, en étain ; la fantaisie seule choisissait la couleur de sa boutique. Et comme lui-même était moins grave, moins pesant que le barbier chirurgien !

Comme il nous paraît, dans les estampes, apprécier tous les privilèges de son art : faire les cheveux aux dames, les étager de manière à leur donner un aspect agréable, combler les lacunes et les cacher sous des nuages de poudre ; fabriquer tours, toupets, chevelures entières pour messieurs les gentilshommes, gens de cour, d’église, de justice ou d’épée ; bref, débarrasser chacun des soins journaliers du corps !

Entrez dans cette boutique où travaillent les tresseuses, où l’on monte les coiffures préférées par les merveilleux, où l’on frise en crêpe, où l’on frise en boucles, où l’on répète les nouvelles que l’on sait, où l’on invente celles qu’on ne sait pas ; faites-vous mettre suivant votre condition, votre âge et la mode du jour, les cheveux en bourse en cadenette, en catogan, à la téléchargement (5)grecque, perruque à la Fontange, à la brigadière, en bonnet, nouée à l’oreille, d’abbé, de palais, à marteaux, à simple nœud, à queue de rubans, etc.

Examinez cette collection d’outils : fers à friser (pince à longues branches à mâchoires plates en dedans), fers à toupet (à branche ronde entrant dans une creuse), cardes de toute sorte pour les cheveux, champignons à perruques, coquemard à faire chauffer l’eau, bouilloire, bouteille de fer-blanc pour porter l’eau chaude en ville, cornet à œil de verre et masque à poudrer, melons (étuis à perruque), zeste (bourse à tuyau pour poudrer), etc., etc.

Regardez, écoutez, n’oubliez pas que cet artiste en cheveux est en même temps votre barbier, votre baigneur, qu’il descend peut-être du grand Binette (celui qui disait : Je dépouille la tête des sujets pour en couvrir celle du souverain) ; que peut-être vous vous trouvez dans la boutique de maître André, fabricant de perruques et de vers tragiques à la manière de ceux-ci :

En tel état que j’aille, à pied comme en carrosse,
Il m’en souviendra du – premier jour de mes noces.

Quant aux perruquiers en vieux, ils ne rasaient point : ils n’étaient pas de barberie ; au lieu de bassins, ils avaient pour enseigne un marmot, espèce de vieille tête de bois avec une très vieille perruque. Ils pouvaient faire du neuf, mais à condition de mêler du crin aux vrais cheveux et de mettre au fond de la coiffe cette inscription : perruque mêlée. C’étaient les perruquiers des pauvres gens.

(D’après « Le Magasin pittoresque », paru en 1862)

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Merciers, marchands de tout et de rien

Posté par francesca7 le 5 septembre 2014

 

(D’après un texte paru en 1908)

Publié le MERCREDI 13 JANVIER 2010, par LA RÉDACTION

 

mercieranglaisOn disait au Moyen Age : « Merciers, marchands de tout, faiseurs de rien ». C’était l’exacte définition de ce métier. Chaque artisan à l’origine vendait seulement ses produits : mais tous les métiers n’existaient pas en si grand nombre et avec la même importance dans chaque ville. Il était donc indispensable qu’il y eût des gens pour se charger de rassembler les marchandises les plus diverses et les mettre à la disposition des acheteurs. Mais les différents industriels veillaient jalousement à leurs privilèges, et de tout temps ils surveillèrent attentivement les marchands pour les empêcher de rien fabriquer.

Ces marchands, qui servirent ainsi au Moyen Age d’intermédiaires entre le public et les fabricants, on les appela merciers. Ce mot, qui n’éveille pour nous que l’idée d’un petit commerce borné à quelques articles de lingerie, à quelques accessoires de toilette, et à quelques-uns des instruments nécessaires à la couture. Toutefois, le mot mercerie avait bien plus d’étendue ; il vient du mot latin merx, qui signifie tout ce qui se vend. Un mercier, c’était à l’origine un négociant en gros.

On distinguait deux sortes de merciers. D’abord ceux qui allaient au loin chercher les marchandises précieuses : ils se rendaient dans ces curieuses foires, où les marchands de tous pays se retrouvaient pendant quelques semaines et d’où ils revenaient dans leur patrie avec des mulets chargés de ballots. Puis il y avait les merciers sédentaires, qui recevaient des premiers les marchandises coûteuses ou qui commandaient aux fabricants de la ville où ils se trouvaient les objets dont ils avaient besoin. La corporation des merciers est l’une des plus anciennes ; au XIIe siècle, en 1137, nous les rencontrons dans un acte où on leur concède un droit de place dans les halles de Champeaux. Comme tous les métiers tenant de près ou de loin à la mode, aux habits ou aux armures, les merciers eurent dès cette époque une importance exceptionnelle : les chapeliers de plumes de paon, si considérables et si en faveur, ne comptaient guère au prix d’eux ; cette prépondérance venait sans doute du fait que les merciers employaient un peu de toutes les matières précieuses, l’or, l’argent dans les orfrois et les bordures, les perles et les joyaux dans les broderies.

Les merciers parisiens étaient groupés sur la rive droite au Moyen Age ; les plus estimés se trouvaient, au XIIe siècle, rue Quincampoix, puis ils se rapprochèrent des Halles où, d’ailleurs, depuis le règne de Louis VII, ils possédaient une place fixe. Plus tard, quelques-uns passèrent l’eau ; de bonne heure, beaucoup d’entre eux s’installèrent au Palais de justice, dans la galerie qui faisait face à la cour d’entrée.

Au treizième siècle, ils vendent et fabriquent eux-mêmes, et comme les femmes peuvent travailler du métier, il y a des maîtres et des maîtresses, des apprentis et des apprenties. La fabrication porte sur les orfrois, merveilleuses applications de broderies sur soie, sur les bordures plus simples, les bourses, les bas, les menus objets de toilette brodés et ornés. Cette fabrication est très surveillée. Les merciers ne peuvent broder sur parchemin ou toile ; la soie seule est autorisée.

Les produits d’Orient, en général, étaient peu estimés ; on prohibait l’or de Lucques et de Chypre qui était un composé de soie et d’or ; on empêchait le mélange du vieux et du neuf, celui du fer avec l’or, et les quatre prud’hommes du métier avaient ordre de dépecer sans pitié tout ouvrage fabriqué contrairement à ces prescriptions. Une des préoccupations de ces gardes était d’empêcher l’emploi des perles fausses, vendues à profusion malgré les défenses, et dont l’application sur une broderie exposait à la destruction complète de l’ouvrage.

Le Dit du mercier, petit poème composé spécialement sur ce métier, énumère longuement les objets mis en vente par les maîtres, et qui tous étaient des merveilles de richesse et de splendeur. Certaines statues de nos cathédrales attestent la réalité de ces descriptions ; celles du portail occidental de Chartres, par exemple, donnent une idée de la perfection des travaux de mercerie. Tantôt ces orfrois étaient quadrillés, diaprés, échiquetés comme un damier, tantôt ils étaient semés de cabochons, de perles, de saphirs fixés au galon.

A dire le vrai, c’étaient les gens d’église et non les laïques qui employaient le plus ces riches ornements. Les séculiers ne les cousaient guère qu’à l’encolure des bliauts ou des robes, car ils étaient lourds et se pliaient mal aux caprices des étoffes légères ; mais il n’en reste pas moins acquis que la consommation énorme de ces objets avait donné aux merciers une situation particulière parmi les corps de métiers.

Les statuts des merciers furent confirmés à diverses reprises. Ils avaient ce qu’on appelait leroi des merciers pour chef de la corporation, et ce chef accordait le brevet de maître. Après une assez longue durée, la charge de roi des merciers, ayant été supprimée provisoirement par le roi François Ier, fut rétablie par Henri III. En 1597, elle fut définitivement mise de côté par ordre de Henri IV. Quant aux statuts, d’abord énumérés dans Etienne Boileau, ils furent rappelés en 1407 et 1418, et imprimés au milieu du XVIIIe siècle.

Les maîtres vendaient alors un peu de tout, des dentelles, des galons, des étoffes, des broches d’or et d’argent, des toiles et des soies, même des lainages. Ils payaient leur maîtrise mille livres, et la corporation portait d’argent à trois vaisseaux dorés d’un soleil levant, ce qui était une ancienne flatterie au roi Louis XIV, de même d’ailleurs que la devise : « Nous te suivrons partout. »

Au XVIIe siècle, quand les communications devinrent plus faciles, et que des produits plus nombreux purent s’entasser dans la boutique des merciers, la mercerie se partagea en une vingtaine de spécialités, et on eut ainsi des marchands joailliers, des marchands quincailliers, des marchands papetiers, des marchands bimbelotiers, qui vendaient des jouets d’enfants. Mais tous ces négociants avaient besoin de faire précéder le nom du métier dont ils vendaient les produits du mot marchand pour rappeler qu’ils ne fabriquaient rien eux-mêmes, et se mettre ainsi à l’abri des procès que les industriels n’auraient pas manqué de leur intenter.

Au XVIIIe siècle, le plus célèbre des magasins de mercerie à Paris était le Petit Dunkerque, qui se trouvait au bord de l’eau, à l’angle du quai Conti et de la rue Dauphine.

Au XIXe siècle, l’équivalent des merceries d’autrefois furent les grands magasins de nouveautés. Mais, tandis que les merceries avant 1789 n’étaient le plus souvent que des boutiques sombres, les magasins de nouveautés étaient de vrais palais.

Au temps de Louis-Philippe, ils étaient encore petits et mesquins ; mais avec la fin du Second Empire, ils s’agrandirent ; des maisons comme le Louvre ou le Bon Marché, célèbres dans le monde entier, sont devenues, par suite du renouvellement constant de leurs marchandises et de leurs applications à suivre les mille changements de la mode, de véritables expositions permanentes.

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Les métiers Coiffeurs

Posté par francesca7 le 5 septembre 2014

 

 
 
133123187165Si le coiffeur n’est l’alter ego ni du barbier ni du perruquier, il en est souvent le cousin germain, et les trois états bien des fois se sont personnifiés sur une seule tête. Les Grecs avaient leur xoupeuc, les Romains leur tonsor, dont la boutique était le rendez-vous des oisifs, des conteurs de nouvelles, des gobe-mouches, des bavards de toute classe, où chaque homme libre venait le matin rafraîchir sa toilette, où les merveilleux se faisaient rogner les ongles.

On y coupait les cheveux sans ciseaux, instrument alors inconnu, auquel on suppléait par deux rasoirs, qu’on faisait jouer en morne temps en les opposant l’un et l’autre. Théophraste, Plutarque, Martial, les poètes comiques grecs et latins parlent fréquemment de ces boutiques de tonsors, baigneurs-étuvistes, et M. Bœttiger leur a consacré une dissertation savante.

En France, ce n’est que dans les premières années du dix-huitième siècle qu’il commence à être question des coiffeurs, à part et en dehors des barbiers et des perruquiers. Les grands seigneurs avant cette époque chargeaient leurs valets de chambre du soin de leurs têtes ; les grandes dames les confiaient à leurs femmes de chambre. Le reste du genre humain, hommes et femmes, était condamné à passer par les mains du perruquier, qui avait fait son temps et qui vieillissait à vue d’œil. Un bon procès en règle est intenté en 1769 aux coiffeurs par les perruquiers : les nouveaux venus le gagnent ; et les premiers occupants ne se sont point relevés du coup, tandis que la fortune de leurs glorieux rivaux n’a fait que grandir.

Bientôt le titre de coiffeur ne suffit plus à ces fiers artistes ; ils se qualifient d’académiciens de la coiffure et de la mode. Mais à leur tour les académiciens, les grands académiciens, chargés de peigner la langue et d’épiler le vocabulaire, sans les empêcher de l’écorcher en vrais barbiers bien entendu, ne veulent pas de ces collègues de nouvelle espèce, et défense leur est faite d’inscrire sur leur porte, comme ils le faisaient, en gros caractères : académie de coiffure. Ils s’en consolent en prenant le titre, plus modeste, de professeurs et en ouvrant des cours de coiffure.

La faveur toujours croissante du beau sexe huppé les dédommagea amplement de ce léger échec. Avouons-le en passant, le coiffeur à la mode était ordinairement jeune, agréable, bien tourné. Heureux privilégié, admis aux mystères de la toilette, tous les jours rôdant autour de la même femme comme le serpent autour d’Eve, attendant l’occasion, caressant sa chevelure d’une main légère, papillonnant ça et là, aussi longtemps qu’il lui plaisait, autour d’une tête charmante, ayant le droit de la regarder avec amour à mesure qu’il contribuait à l’embellir, il dut trouver le secret de plaire s’il était aimable, et il l’était quelquefois, et flatteur toujours, ce qui ne nuit jamais. Mon Dieu ! n’accusons pas la chronique scandaleuse du temps. Songeons à la légèreté des mœurs, considérons l’abandon de la toilette matinale, l’atmosphère moite et parfumée, les tentations de la solitude, et ne nous étonnons pas que l’heure du coiffeur ait été plus d’une fois l’heure du berger !

Parmi ces enchanteurs du dix-huitième siècle, citons Legros, qui publia en 1769 un traité de l’Art de la Coiffure des Dames françaises, qui se vendait deux louis, et dans le post-scriptum duquel il met le public en garde contre une contre-façon propre à tromper l’univers et à détruire un auteur gui a fait un bon livre. Ce législateur de la coiffure eut une triste fin : il mourut étouffé sur la place de la Concorde, lors des fêtes du mariage de Louis XVI.

Citons après lui Dagé, qui ne pouvait suffire à sa riche et nombreuse clientèle. Les chevaux de son carrosse étaient sur les dents. Mme de Pompadour elle-même avait eu bien de la peine à le décider à la coiffer. La première fois qu’il se rendit chez elle, elle lui demanda comment il avait acquis une telle réputation : « Cela n’est pas étonnant, répondit-il, je coiffais l’autre (la duchesse de Châteauroux). » Ce propos fut recueilli, il circula à la cour ; et les ennemis de la belle marquise ne la désignèrent plus que par le sobriquet de Madame Celle-ci.

Le beau Léonard, coiffeur de Marie-Antoinette, acquit une célébrité immense par son habileté à poser les chiffons ; on appelait ainsi l’art d’alterner les boucles de la chevelure avec les plis de la gaze de couleur. On dit qu’il employa un jour quatorze aunes de cette étoffe sur la tête d’une seule dame de la cour. Le talent d’un si grand homme devait faire fureur. Comblé des faveurs du grand monde, il obtint le privilège du théâtre de Monsieur, composé des virtuoses italiens de l’époque, et pour l’exploitation duquel il s’associa, en 1788, avec le célèbre Viotti. Léonard, dont le véritable nom était Autier, et qui était Gascon, fut mis par la reine dans le secret du voyage de Varennes, et quitta secrètement Paris un peu avant le roi, chargé d’une partie de sa garde-robe. Mais il parait qu’il n’était pas entièrement dans la confidence, car ce fut, dit-on, sur l’avis donné imprudemment par lui d’un retard survenu a la voiture royale, que l’officier chargé de l’attendre au relais fit rentrer les chevaux précisément an moment où le monarque arrivait ; ce qui occasionna son arrestation.

Léonard suivit ses princes dans l’exil, et alla exercer sur les têtes moscovites la dextérité de son peigne aristocratique, que la république laissait, pour le quart d’heure, sans emploi. Du reste, cette émigration du peigne en Allemagne et en Russie n’avait pas attendu les commotions politiques : il y avait déjà longtemps que la France fournissait à l’Europe des valets de chambre coiffeurs, des femmes de chambre coiffeuses, comme elle leur fournissait des maîtres de danse et des cuisiniers.

Dès que le calme fut de retour chez nous, on vit briller sous le Consulat et sous l’Empire Michalon, parent du peintre et du statuaire, peintre et statuaire estimable lui-même , à qui nos maisons de coiffures doivent l’origine des bustes en cire qui les décorent, Michalon, l’ami des artistes et des littérateurs de son temps, Michalon, l’habitué de Feydeau, avec son élégant cabriolet armorié, son jockey noir et ses séances à vingt francs le cachet, Michalon, le prédécesseur de Plaisir et de tous les grands maîtres actuels. Nous ne mentionnerons pas le coiffeur de Napoléon, Constant, dont la place était une vraie sinécure. Quant au poêle-coiffeur agénois Jasmin, il est beaucoup moins célèbre, à tout prendre, comme coiffeur que comme poêle, quoiqu’il s’opiniâtre, dans son bon sens, à rester l’un et l’autre.

Au premier aperçu, on pourrait croire que perruquier et coiffeur sont synonymes, et en effet de prime abord l’analogie est frappante ; on doit remarquer toutefois que si les perruquiers sont de plus ou moins habiles coiffeurs, les coiffeurs ne font pas tous des perruques ; et les uns et les autres renoncent de bon cœur au titre de barbier, qui n’est que la mauvaise queue de leur profession. Nos coiffeurs modernes, aux élégantes boutiques parfumées d’essences et de senteurs, prendraient aussi en fort mauvaise part la dénomination de perruquier, qui ne s’applique plus qu’à de rares vétérans de l’art, encore humides de poudre blanche, qui s’éteignent dans quelques villes stationnaires du centre, de la Bretagne ou du midi.

(D’après « Dictionnaire de la conversation et de la lecture », volume 6 paru en 1853)

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La première Caisse d’Epargne

Posté par francesca7 le 3 septembre 2014

 

 

La première Caisse d'Epargne dans AUX SIECLES DERNIERS 220px-Saumur_Maison_du_roiTout le monde connait la Caisse d’Epargne et son livret A. D’ici quelques années, exactement le 29 mai 2018, nous célébrerons le bicentenaire de sa création ! Savez-vous que le premier établissement a ouvert ses portes au 19 rue du Louvre à Paris, dans un hôtel particulier conservant de nos jours une belle salle de conseil, une façade sculptée et des dessus de portes aux armes du premier propriétaire !

 Un hôtel particulier prédestiné à la finance

Le baron Thoinard de Vougy, fermier général, c’est-à-dire récolteur des impôts sous Louis XV, fait construire en 1730 un superbe hôtel particulier, décoré de dorures et de peintures, au 9 rue Coq-Héron.

Son gendre devient premier président de la cour des comptes et entre 1786 et 1798, et l’hôtel est habité par le directeur des contributions indirectes.

Le concept d’épargne et de prévoyance voit le jour pendant le Siècle des Lumières ; un banquier du nom de Delessert lance en 1787, la « Compagnie royale d’assurances sur la vie », dont il occupe la place de dirigeant, proposant plusieurs formules d’assurances. Parmi les actionnaires et administrateurs, on trouve des personnages connus et renommés comme Condorcet, Talleyrand, Mirabeau.

Comme la Révolution n’est pas loin, le public ayant d’autres soucis, cette compagnie est dissoute en 1793, mais elle peut être considérée comme l’ancêtre de la Caisse d’Epargne.

Sous le Directoire et l’Empire, les frères Enfantin installent une banque dans cet hôtel particulier.

En mai 1818, sur le modèle anglais, le baron Benjamin Delessert (fils du précédent) associé au duc de La Rochefoucauld-Liancourt décident d’ouvrir toujours au même endroit, une institution nommée Caisse d’Epargne. Elle aura pour but d’encourager l’épargne populaire, mais il faut expliquer au public le bien fondé de bien gérer leur argent dans une période où les conditions économiques sont difficiles. Le baron disait « tâchons de faire comprendre au peuple les bienfaits, on peut presque dire les miracles, de l’économie » avant de remettre aux épargnants le fameux livret d’épargne où les versements et les intérêts sont inscrits, en fait l’ancêtre de notre livret A.

Cet établissement est d’abord privé, constitué en une société anonyme, dont les fondateurs sont des banquiers comme par exemple Laffitte gouverneur de la Banque de France, des administrateurs de la Compagnie royale d’assurances maritimes » ou encore le baron de Staël, petit fils de Necker.

En juillet de la même année, Louis XVIII autorise l’existence de la « société anonyme formée à Paris sous le nom de Caisse d’Epargne et de prévoyance », mais le succès escompté tarde à venir !

runningL’institutionnalisation des caisses d’épargne

En 1835, l’Etat intervient et assure la garantie des dépôts au Trésor Royal, verse un intérêt fixe, puis confie la gestion à la Caisse des Dépôts et déclare les caisses d’épargne « établissement privés d’utilité publique ». Avec ces transformations, la confiance des épargnants revient et augmente. A tel point que 12 ans plus tard, la France compte tout de même 364 Caisses d’Epargne sur le territoire.

En juillet 1895, les Caisses d’Epargne doivent se soumettre à la loi indiquant que le principe de l’emploi des fonds est celui des fonds de l’Etat. Par ailleurs, elles doivent constituer un fond de réserve spécial et supplémentaire, appelé « fortune personnelle » en plus de la réserve obligatoire recevant l’excédent des revenus pour couvrir les moins-values. Cette « fortune personnelle » est constituée de dons, de subventions et du solde entre les intérêts perçus et les montants reversés aux déposants. Cette réserve supplémentaire va servir à financer des logements peu chers, des bains-douches, des œuvres de solidarité nationale, d’hygiène sociale, d’assistance ou de bienfaisance.

Les Caisses d’Epargne participent aussi à la vie des collectivités et organismes publics en leur octroyant des prêts. On peut donc affirmer que cette épargne a joué un grand rôle dans le financement de l’économie nationale.

Après guerre, presque tous les foyers détiennent un livret … mais cette institution faillit ne plus voir le jour, car elle fut autorisée comme les banques, à participer à des activités spéculatives !

Sources

Nicolas Eybalin « Quand les lieux racontent l’Histoire de France ». Scrineo, octobre 2012.

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Riquet : le génie des eaux

Posté par francesca7 le 3 septembre 2014

 

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 A l’âge de 51 ans, où beaucoup de personnes meurent au XVII è siècle, Pierre Paul Riquet entreprend sa « grande œuvre », la construction du canal des Deux Mers reliant l’Atlantique à la Méditerranée.

Deuxième grand chantier sous Louis XIV, classé au patrimoine mondial de l’Humanité par l’Unesco en 1996, le plaçant au même niveau que la Grande Muraille de Chine, le Mont Saint Michel ou Versailles, cette construction fut menée à bien, grâce à la volonté et le talent de Riquet. Qui était cet homme trop méconnu du public ?

Ses origines

Pierre Paul Riquet nait en 1609 à Béziers ; son ancêtre appartenant à la classe supérieure des romains au XII è siècle est venu s’installer à Marseille ; élu Premier Consul de la ville de la Seyne en Provence en 1346, il devient gentilhomme de la maison du comte de Provence et crée deux lignées de « Riquet » : Honoré Riquety qui donnera Mirabeau en 1789 et Noble Reynier Riquety de Béziers, ancêtre de Pierre Paul Riquet.

Son grand père possédait une boutique d’étoffes, son père était notaire à Béziers et excellent homme d’affaires, mais condamné pour faux en écritures. Pierre Paul est rapidement initié au commerce ; il ne fait pas d’études supérieures, mais apprend l’art de calculer et est attiré par la mécanique ; il s’exprime en langue d’oc et ne parle ni latin, ni grec.

De gabelou à Directeur de la Ferme du Languedoc

Il entre dans l’administration des gabelles du Languedoc dans les années 1630-1632 pour apprendre le métier de gabelou ou agent de la gabelle ; au poste de grenatier, il s’occupe de la gestion du grenier à sel, de l’achat et la vente du produit, de la vérification des faux, trafiquants et contrebandes. De receveur, il passe sous-fermier de tous les greniers du Haut Languedoc en 1648, puis fermier en 1652.

Constatant que le prix du transport est exorbitant, il monte une entreprise, mais les routes sont presque inexistantes, peu sûres et en piteux état. Ayant entendu parler à l’âge de 9 ans d’un projet de canal reliant Toulouse à Béziers, il pense que par ce biais, le coût du transport serait diminué de beaucoup.

Fermier général dans le Languedoc en 1661, il est recruté par la province du Roussillon et de Cerdagne afin de mettre en place cet impôt puisque la région précédemment espagnole et exempte de la gabelle, est devenue maintenant française depuis le mariage du roi. Les problèmes surviennent vite, le pauvre peuple est récalcitrant et gronde devant cette nouvelle taxe. Colbert à qui Riquet doit rendre des comptes suite à l’arrestation de Fouquet lui demande d’intervenir par la force. Il préfère négocier pour calmer les récalcitrants, malgré les révoltes, malgré l’assassinat de ses commis, jusqu’en 1670 où il doit accompagner les 4 000 soldats envoyés par le roi pour mater les rebelles. Colbert est clair « il faut absolument récolter la gabelle pour financer l’Etat, les guerres et le canal des Deux-Mers ».

Jusqu’en 1678, il gravit tous les échelons pour arriver au poste de Directeur de la Ferme du Languedoc malgré tous les soucis rencontrés, mais en amassant une belle fortune.

Le père de famille et l’homme

Après Béziers, il s’installe à Mirepoix, épouse une fille de contrôleur des tailles en 1638 lui donnant la même année Jean Mathias futur président à mortier de Toulouse, Pierre en 1641 qui meurt 15 mois plus tard, Elisabeth en 1645, Pierre Paul futur capitaine des gardes du roi et futur comte de Caraman baptisé en 1646. De constitution solide, ils échappent presque tous à plusieurs épisodes de peste qui déciment plus du cinquième de la population de la région de Toulouse. A la mort de son père en 1646, il déménage vers la Montagne Noire à Revel pour être à proximité des localités concernées par la collecte de la gabelle, aux environs de Castres et Mirepoix. Là, il commence à faire des essais pour « son futur canal », tout en ayant la joie d’avoir encore quatre nouveaux enfants.

Ce travailleur acharné se fait une bonne réputation, devient banquier privé, prêtant aux consuls de la ville, parfait homme d’affaires écrivant jusqu’à dix lettres par jour à différentes personnes pour des sujets variés, se déplaçant constamment d’une ville à l’autre, négociateur hors pair pour éviter des procès sans fin, constructeur, propriétaire du canal et chef d’entreprise proche de ses ouvriers, rationalisant le travail, fidélisant ses salariés en leur assurant une « mini sécurité sociale » et en les logeant, n’ayant jamais eu à faire face à des révoltes ni rebellions sur ses chantiers, constant dans ses projets et s’efforçant de les mener à terme, travaillant toujours dans un souci d’économie et de rentabilité, tout en gérant ses affaires de gabelles puisqu’il devient directeur de la ferme des gabelles du Languedoc et en obtenant la charge de munitionnaire des armées du roi ;  n’étant ni ingénieur, ni architecte, ni géographe mais avec du talent, une volonté de fer, beaucoup de capacités, une passion et un grand courage, parti de rien ou presque… il fait fortune.

Il peut acheter le « Fort de Bonrepos » et son domaine à environ 20 kms de Toulouse, se lancer dans sa reconstruction, ce château médiéval étant en très mauvais état. L’endroit considéré comme lieu stratégique de défense doit être réparé par la ville et l’entretien réglé par les Consuls ; grâce à ses négociations, il obtient le domaine, le château à vie de manière perpétuelle, à condition d’assurer la protection des villageois en cas d’attaque extérieure. Là, il achète des parcelles supplémentaires, fait abattre des morceaux de bâtiments en ruine, embellit la demeure à partir de 1654, conservant les matériaux pour les réutiliser, remettant en état des moulins et la briqueterie, logeant les principaux artisans pour les avoir sous la main, faisant office de maître d’ouvrage. En 1666, Bonrepos est presque habitable et Riquet est réhabilité dans sa noblesse, ne signera jamais « baron de … », mais écrira toujours Seigneur de Bonrepos, voulant rester discret, car dans sa jeunesse il a appris deux choses : ne jamais trahir son roi et ne jamais faire étalage de ses biens et sa fortune.

Riquet : le génie des eaux dans LEGENDES-SUPERSTITIONS 192px-FR06_P1100932cDans le but d’installer ses enfants, il acquiert aussi une maison dans Toulouse ainsi qu’un hôtel particulier à l’extérieur de la ville sur un domaine de quatre hectares avec une orangerie, des jardins, des prés et une glacière, sans oublier un hôtel à Paris. Un père aimant et soucieux de ses enfants, réalisant de belles alliances pour ses filles, toujours présent en cas de maladie ou lors d’un procès, ou encore pour sauver de la ruine et du déshonneur son second fils poursuivi pour dettes au jeu ; Riquet est jovial, bon vivant, d’un naturel franc ce qui lui apporte des ennemis mais aussi de fidèles amis.

La grande œuvre de Riquet

Le canal reliant les Deux-Mers fut un chef d’œuvre au temps de Louis XIV, le second chantier grandiose au temps du Roi Soleil…après Versailles. Tout le monde avait échoué pour construire le canal du Midi, Riquet a réussi à monter un projet « en béton », en insistant sur l’utilité économique et l’intérêt stratégique du canal, reliant l’Atlantique et la Méditerranée, en évitant le détroit de Gibraltar, en évitant le pillage de la marchandise et les taxes à payer à l’entrée ; il a été suffisamment persuasif pour le faire accepter par Colbert, malgré les 17 millions de livres, le financement du canal se faisant en trois parts : le roi, les états du Languedoc et Riquet ; son projet fut « choisi par le roi, de préférence à tout autre ». Il a su s’appuyer sur des personnes influentes à la Cour, il a su s’entourer d’une équipe compétente en qui il avait confiance.

Toujours présent sur le terrain, il entreprend le piquetage du canal de Sète à Toulouse, balisant les sources et les ruisseaux, payant mieux ses ouvriers pour les retenir et accélérer les travaux, de quelques centaines d’hommes il en géra 12 000 qui ne rechignaient pas à la tâche. Sur tous les fronts, il s’occupe aussi du creusement du port de Sète, du recrutement du personnel, de la construction de logements pour les ouvriers, des écuries, des magasins, assiste à toutes les réunions, organise le travail, répond à toutes les lettres à Colbert, trouve une solution lorsqu’une église se présente sur le tracé du canal (il la fit démonter, garder les matériaux pour être remontée un peu plus à l’écart) ou lorsqu’il faut traverser une montagne sablonneuse en faisant creuser un tunnel de 165m avec consolidation de la voute en 8 jours.

Concessionnaire du canal, il prend en charge la construction et l’entretien, investissant sa fortune personnelle, devant très souvent emprunter à des tiers et rembourser les dettes, l’argent du roi ne venant pas régulièrement ; en échange il perçoit les taxes, les péages, les redevances sur le transport des marchandises ; il doit faire face aux jaloux et tourmenteurs ainsi qu’à la pression exercée par les contrôleurs de Colbert, à ses récriminations, mais il peut compter sur ses fils qui sont présents, qui l’aident dans son travail et qui le soutiennent. Il pourrait être fatigué, stressé, épuisé, débordé, mais il tient bon malgré sa maladie, malgré les suspicions de Colbert qui le soupçonne de puiser dans la caisse du canal pour installer ses fils !

Ce fut la passion et l’œuvre de la vie de Riquet, une affaire de famille où les fils, les gendres, les beaux parents ont participé et travaillé, les descendants de Riquet continueront à le gérer jusqu’au XX è siècle. De même, ce sont des familles entières, de pères en fils qui y ont travaillé, des éclusiers aux magasiniers… Une réussite humaine car les travaux furent faits à la force du poignet.

Ce fut un moment de bonheur en 1667 où la première pierre est posée avec la bénédiction de l’archevêque de Toulouse, mais Riquet ne verra jamais naviguer les barques, il meurt en octobre 1680, l’inauguration se faisant en mai 1681, il ne restait que 5.5 kms à construire sur les 240 kms de la longueur du canal…Riquet est alors porté très haut, par son opiniâtreté, sa force de caractère, son talent, son génie.

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Les autres réalisations de Riquet

Parallèlement au canal des Deux Mers, Riquet s’est occupé de la construction des 328 ouvrages d’art jalonnant le canal (aqueduc, moulins, déversoirs, scieries, auberges, écuries, forges, magasins, logements…) ; du port de Sète qui fut une réussite, une beauté d’après les constations du fils de Colbert (missionné pour vérifier !) ; de l’aqueduc de Répudre dans l’Aude qui a servi de modèle à Vauban, sans oublier la demande expresse de Colbert pour Versailles : amener l’eau aux fontaines, reliant les eaux de la Loire au dessus de Briare à l’aide d’un pont canal. Trop long, trop coûteux, on fait construire la machine de Marly ; de l’aqueduc de Castries près de Montpellier sur 7 kms ; du canal de l’Ourcq qui approvisionnera Paris en eau potable pour les habitants et les industries dont les travaux sont lancés en 1677 mais le chantier interrompu «qualifié d’inutile » à la mort de Riquet ; en 1670, le roi demande la distillation de bouteilles d’eau minérale des stations thermales de Balaruc-les-Bains ; Colbert, ne pouvant le laisser travailler en paix et accomplir sa « grande œuvre » le charge encore de faire une étude en 1676 pour le futur canal de Bourgogne (réalisé sous Louis XV), puis le futur canal du Centre (réalisé sous Louis XVI), ainsi que le canal de Provence reliant le Rhône à la Méditerranée qui deviendra l’actuel canal du Rhône à Sète.

Après Riquet

Riquet s’éteint donc le 1er octobre 1680, à 71 ans à Toulouse. Placé dans un caveau de l’Elise Saint Etienne, en toute discrétion, sans cérémonie, ses enfants installés à Paris ne purent être présents ; Colbert s’inquiétant de la fin des travaux, fait mettre des scellés sur les biens de la famille ! A force de plusieurs demandes de la famille, de l’entourage de Riquet et de personnes bien introduites à la Cour, Colbert envoie à Jean Mathias (le fils Riquet) les fonds nécessaires à l’achèvement du canal, le roi assurant la famille de sa protection.

Les deux fils s’entendant à merveille, agissant de concert, toujours en accord dans les décisions à prendre (chose rare pour l’époque dans des familles ayant des biens), firent achevés les travaux afin d’inaugurer le canal en mai 1681, avec la première barque voguant de Sète à la Garonne. De même qu’ils aidaient leurs sœurs en versant les dots prévues, aimables et conciliants avec tous, ne lésant personne lors du partage de l’héritage, malgré les 4 millions de livres de dettes laissées par Riquet, dont deux furent quand même prises en charge par Colbert.

Louis XIV dans ses Mémoires pour l’instruction du dauphin mentionnait « le canal avait permis au royaume de devenir le centre du commerce de toute l’Europe » ; il fut une mine d’or pour les enfants, mais il fallut encore attendre 44 ans pour être rentable !

 Pour aller plus loin

- Riquet, le génie des eaux : Portrait intime, de Mireille Oblin-Brière. Editions Privat, avril 2013.

- Le canal du Midi : Histoire d’un chef-d’oeuvre, de René Gast. Editions Ouest-France, Janvier 2006.

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