Légendes et littérature Bretonoise
Posté par francesca7 le 16 août 2014
D’est en ouest et du nord au sud, la Bretagne regorge de récits merveilleux. Croyances, rituels et contes ont ainsi créé au fil des siècles tout un univers, folklorique pour les uns, mystérieux pour les autres. Les légendes ont surtout su conserver la fraîcheur de mythes très anciens qui n’ont pas été sans imprégner la vie littéraire bretonne, du Moyen Âge à nos jours.
Une terre de légendes
L’âme bretonne a toujours incliné au rêve, au fantastique, au surnaturel. C’est ce qui explique l’étonnante abondance et persistance des légendes.
La Table ronde
Après la mort du Christ, Joseph d’Arimathie, un de ses disciples, quitte la Palestine en emportant quelques gouttes du sang divin dans la coupe où le Rédempteur a bu lors de la Cène. Il débarque en Bretagne, séjourne en forêt de Brocéliande, l’actuelle forêt de Paimpont, puis disparaît sans laisser de traces.
Au 6 e s., le roi Arthur et 50 chevaliers entreprennent de retrouver la précieuse coupe. Elle constitue à leurs yeux le Saint-Graal , que seul pourra conquérir un guerrier au cœur pur. Cet homme idéal est Perceval, le Parsifal de Wagner. La recherche du Graal a donné naissance à d’inépuisables récits d’aventures médiévaux qui forment le cycle de la Table ronde. Ronde parce qu’Arthur et ses chevaliers s’assemblaient autour d’une table qui, par sa forme, supprimait toute préséance.
Merlin et Viviane
Un des compagnons du roi Arthur, Merlin l’Enchanteur, vient en forêt de Brocéliande. Dans sa retraite, il rencontre Viviane… et l’amour d’exalter l’enchanteur et la fée ! Pour garder plus sûrement Merlin, Viviane lui soutire un à un ses secrets et l’enferme dans un cercle magique. Il pourrait certes se libérer, mais il accepte avec joie, et pour l’éternité, cette captivité amoureuse.
Tristan et Iseult
Tristan, prince de Léonois envoyé par son oncle Mark, roi de Cornouaille, ramène d’Irlande Iseult, que Mark va épouser. Sur le navire, Tristan et Iseult boivent par erreur le philtre destiné à lier d’un amour inaltérable Iseult à son époux. La passion éclate dans les deux cœurs. Les récits font varier les dénouements : tantôt Tristan est tué par Mark, ulcéré de sa trahison ; tantôt il se marie et meurt dans son château de Bretagne. À chaque fois, Iseult le suit invariablement dans la tombe. L’opéra de Wagner et le livre de Joseph Bédier ont célébré ce drame de l’amour.
La ville d’Ys
Au temps du bon roi Gradlon , vers le 6 e s., Ys est la capitale de la Cornouaille : la baie des Trépassés et la baie de Douarnenez en revendiquent les vestiges. La ville est protégée de la mer par une digue, et le roi garde toujours sur lui la clef d’or qui ouvre les écluses.
Sa fille, la belle Dahut, appelée encore Ahès, mène une vie de débauche et rencontre le diable sous la forme d’un séduisant jeune homme. Comme preuve d’amour, il lui demande d’ouvrir les portes aux flots. Dahut dérobe la clef pendant le sommeil du roi et bientôt la mer se rue dans la ville. Gradlon fuit à cheval, sa fille en croupe. Mais les vagues le poursuivent et vont l’engloutir. À ce moment, une voix céleste lui ordonne, s’il veut être sauvé, de jeter à l’eau le démon qu’il porte derrière lui. Le cœur serré, le roi obéit, et la mer se retire aussitôt. Mais Ys est détruite.
Gradlon, qui choisit Quimper comme nouvelle capitale, finira ses jours en odeur de sainteté, guidé par saint Corentin. Quant à Dahut, changée en sirène, elle est devenue Marie-Morgane et entraîne depuis lors au fond de la mer les marins attirés par sa beauté. Il en sera ainsi jusqu’au vendredi de la Croix où la messe du rachat sera célébrée dans la cité engloutie. Alors Ys ne sera plus maudite et Morgane reprendra sa première forme.
La vie littéraire - Moyen Âge et Renaissance
Aucune œuvre rédigée en vieux breton n’ayant été conservée, seuls ont traversé les siècles des ouvrages en latin, ayant le plus souvent pour thèmes l’histoire de l’Église ou de la Bretagne, la morale et la vie des saints. D’un côté, la littérature bretonne disparue a inspiré le cycle arthurien ; de l’autre, il nous reste des écrits de moines.
La grande figure médiévale est Pierre Abélard (1079-1142), brillant philosophe, natif du Pallet, près de Nantes, qui fut abbé de St-Gildas-de-Rhuys. Il y reçut la correspondance passionnée de la jeune Héloïse, épousée secrètement, et relata l’histoire de ses malheurs. On peut citer aussi Guillaume Le Breton , poète et historiographe de Philippe Auguste, auteur de douze volumes de Philippide où il exalte les événements du règne avec patriotisme. Ce n’est qu’aux 15e et 16 e s. qu’on cerne une véritable école d’historiens et de poètes, née après la création de l’université de Nantes au 15 e s.
Aux 17e et 18 siècles
Bretonne par alliance, Mme de Sévigné a, de son château des Rochers-Sévigné, daté maintes lettres décrivant Rennes, Vitré, Vannes et Port-Louis où elle a fait « le plus joli voyage du monde ». Alain René Lesage , spirituel auteur de Gil Blas , connut le succès avec ses œuvres réalistes où il transposa des souvenirs de son Vannetais natal. Élie Fréron s’est illustré à travers ses démêlés avec Voltaire, et fut le brillant directeur du périodique parisien, L’Année littéraire .
Du romantisme aux romans du terroir
« Il inventa la mélancolie et la passion moderne. » Cette opinion de Théophile Gautier souligne à quel pointFrançois René de Chateaubriand a eu un rayonnement immense. Sa sensibilité, son éloquence passionnée, servies par un talent et un style brillants, expliquent l’influence qu’il exerça sur ses contemporains. Ses Mémoires d’outre-tombe évoquent son enfance à St-Malo et sa jeunesse au château de Combourg. Royaliste et théocrate,Lamennais devint un démocrate convaincu. L’évolution de sa philosophie se reflète dans ses œuvres, de l’ Essai sur l’indifférence au Livre du peuple paru en 1837. Philologue, historien et philosophe, Ernest Renan fut un esprit critique professant une foi absolue dans la science. Il écrivit de nombreux ouvrages parmi lesquels sesSouvenirs d’enfance et de jeunesse rappellent sa Bretagne natale. La jeunesse et la famille ont également été les thèmes de prédilection de Zénaïde Fleuriot dont les romans ont largement été publiés dans la seconde moitié du 19 e s.
Probablement moins puissants, mais fidèles interprètes du terroir, quelques auteurs ont bien traduit la pensée bretonne : Auguste Brizeux (1803-1858), auteur des poésies Telen Arvor ; le conteur Émile Souvestre qui écrivitLes Derniers Bretons ; Hersart de La Villemarqué et ses recueils poétiques de chants populaires, Barzaz Breizet Myrdhinn ou l’Enchanteur Merlin ; le chantre du cidre Frédéric Le Guyader ; le folkloriste et poète Anatole Le Braz (1859-1926) avec Les Légendes de la mort ; le romancier Charles Le Goffic (1863-1932), également poète avec L’Amour breton ; le chansonnier Théodore Botrel (1868-1925) qui célébra Les Chansons de chez nous etLes Chants du bivouac .
Quelques auteurs célèbres
Parmi le grand nombre d’auteurs que l’on pourrait citer ici, dégageons les poètes symbolistes Villiers de L’Isle-Adam et Tristan Corbière , les romanciers Paul Féval, auteur du Bossu , et Jules Verne (1828-1905), précurseur des découvertes modernes et traduit dans le monde entier, ainsi que J.-P. Calloc’h, poète lyrique qui s’exprimait dans le dialecte de Vannes. Pierre Loti doit également être mentionné pour Mon frère Yves et Pêcheur d’Islandequi a Paimpol pour cadre. Enfin, il faut encore évoquer le poète surréaliste Saint-Pol-Roux , dit « le Magnifique », Marseillais mais Breton de cœur, le romancier et nouvelliste Jakes Riou (1899-1937), auteur de Nominoé qui écrivait en breton, le journaliste, essayiste et écrivain Louis Guilloux (1899-1980), originaire de St-Brieuc (ville qui apparaît souvent en filigrane dans Le Sang noir , Le Pain des rêves et Le Jeu de la patience ), et le poète René-Guy Cadou (1920-1951) qui chanta sa Brière natale.
Littératures d’aujourd’hui
Littérature, essais, contes et récits, BD, divers : les auteurs bretons publient chaque année plusieurs centaines d’ouvrages, dont beaucoup sont désormais aussi édités en langue bretonne (le catalogue de Coop Breizh est riche de centaines de titres). Le dynamisme littéraire de la région se mesure aussi à la popularité du festival Les Étonnants Voyageurs , qui se tient à St-Malo depuis 1990.
Henri Queffélec (1910-1992) est un des auteurs ayant le plus célébré la Bretagne. Son roman le plus populaire reste Un recteur de l’île de Sein , adapté au cinéma en Dieu a besoin des hommes . Son fils Yann a brillamment pris la relève et a reçu d’ailleurs le prix Goncourt en 1985 pour son roman Les Noces barbares.
Pierre Jakez Hélias (1914-1995) a consacré toute son œuvre à la Bretagne, publiant plus de 60 ouvrages, dontLe Cheval d’orgueil , publié en breton sous le titre Marh .
Glenmor (1931-1996), de son vrai nom Émile Le Scanff ou Milig ar Scanv, fut un inlassable défenseur de la culture bretonne. Ce chanteur a laissé de nombreux disques et recueils de poèmes.
Irène Frain , née en 1950 à Lorient, est une romancière et historienne parmi les plus lues du grand public. Elle a reçu le Grand prix du roman historique en 2009 pour Les Naufragés de l’île Tromelin .
Claire Bretécher , née en 1940, est une dessinatrice de BD rendue célèbre notamment par ses albums Agrippine ou Les Frustrés.
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