Les armées de la République
Posté par francesca7 le 2 juillet 2014
La raison des premiers succès si rapides des Vendéens ne réside pas seulement dans leur connaissance du terrain, dans leur foi, dans leur vaillance et dans leur mobilité. Elle est aussi dans la médiocrité des armées de la République au début de l’insurrection. Comme écrit le général Biron, au Comité de Salut public, le 31 mai 1793, les rebelles « ne doivent absolument leur force et leur existence qu’à l’épouvantable confusion qui n’a cessé d’accompagner les mesures incohérentes et insuffisantes qu’on a toujours prises partiellement contre eux ».
En face de ces hommes décidés que sont les paysans vendéens, prêts à tout, les régiments républicains composant la pitoyable « armée des Côtes » sont pour le moins hétéroclites. En mars 1793, toutes les forces de la France sont aux frontières, et on ne dispose que de rassemblements informes de citoyens, levés à la hâte. qui ne savent ni commander ni obéir.
Rompus par le premier choc de l’ennemi dit le général Turreau — ils commençaient par jeter leurs fusils et leurs gibernes, et le champ de bataille était couvert d’armes et d’effets d’équipements. de sorte que, dans une affaire où nous perdions deux cents ou trois cents hommes, les Vendéens profitaient de douze mille à quinze mille fusils. » Quant aux munitions. le citoyen Bruslé, envoyé sur le théâtre des opérations affirme : « Vous n’apprendrez pas sans indignation que ce sont nos propres volontaires qui leur ont vendu (aux Brigands) des cartouches pour se procurer du beurre. des oeufs et autres objets de la campagne. »
Les soldats de métier sont minoritaires. Cependant, même quand ils afflueront à partir de la fin avril, mélés aux volontaires, les Vendéens seront fréquemment victorieux. Quand les soldats de la Convention mettent le pied sur cette terre inhospitalière, ils ignorent la tactique de leurs adversaires. Une colonne républicaine est-elle en vue ? Soudain, des bataillons invisibles s’élancent, en poussant des cris effroyables ; ils surgissent de partout, innombrables, la baïonnette en avant, la faux levée, tuent, exterminent, comme une avalanche, puis disparaissent avec la même rapidité, ie même mystère.
Les Bleus s’affolent. Une psychose se développe dans les bivouacs où on grossit démesurément le nombre, les méthodes et les pouvoirs des brigands.
Une des meilleures descriptions des méthodes chouannes est celle de l’abbé Girault dans son livre sur Rochecotte :…
« Au début, quand la chouannerie était seulement un geste de défense, les chouans se cachaient dans les bols pour n’être pas soldats ou se contentaient d’entraver par des manifestations hostiles les séances de recrutement. Mais quand ils eurent, par le nombre et l’armement, pris conscience de leur force, ils passèrent à l’offensive. On les vit alors par petits groupes, rarement par bandes de quelques centaines d’hommes, parcourir prudemment les campagnes, occuper les hameaux isolés, s’aventurer de quelques lieues sur les grandes routes et, dès qu’ils étaient les maîtres d’une région, forcer les soldats républicains à se confiner dans les villes ou les gros bourgs, lever de force les jeunes gens, molester les patriotes et les fonctionnaires. Le coup accompli, ils se dispersaient dans les maisons amies ; le lendemain, au point du jour, le capitaine rassemblait sa compagnie et rejoignait au lieu convenu les autres formations.
La tactique des chouans consistait essentiellement à éviter le combat de front pour ménager les hommes, et à surprendre l’adversaire pour s’assurer le maximum de succès. C’est la guerre d’embuscade et d’usure, une « guerre des nerfs » qui harcèle, décourage, désorganise l’ennemi, la seule guerre qui convienne aux faibles. Elle avait réussi aux Bretons, aux Allobroges, aux Arvernes qui furent d’entre les peuplades gauloises celles qui résistèrent le plus longtemps à Jules César. Tout l’art du chouan, écrit Tercier, consiste à s’embusquer au meilleur endroit, à se précipiter sauvagement sur l’ennemi s’il chancelle et à le poursuivre sans relâche s’il s’esquive ; au contraire, s’il tient ferme, à l’abandonner, à décrocher, à prendre ce qu’on appelle la déroute, un par un, à l’égrené, par vingt chemins différents, à travers hales, champs et bois.
« Dès qu’il a cessé de combattre, il n’est plus astreint à aucune règle, il s’en va où il veut et par les sentiers qu’il juge les moins dangereux ; s’il est pressé il fuit avec la rapidité du daim et ne craint pas d’être rejoint, car le soldat républicain ignore le pays, et son lourd équipement comme la discipline l’empêchent de courir à travers champs.
« Mais la guérilla n’est possible que dans un pays connu. Aussi le chouan s’accroche à son sol, dont seul il connaît les chemins creux, les « rotes » le long des haies épaisses, les carrefours trompeurs, les masures hospitalières ou hostiles, les « terrouesses » creuses, et jusqu’aux chiens dressés contre les Bleus. Rien ne lui répugne davantage que de quitter son pays car il perdrait aussitôt toute assurance ».
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