Le rituel de la cloche
Posté par francesca7 le 10 mai 2014
« C’est un usage qui remonte à l’Antiquité de convoquer le peuple chrétien à l’assemblée liturgique et de l’avertir des principaux événements de la communauté locale par un signal sonore. Ainsi la voix des cloches exprime-t-elle, en quelque sorte, les sentiments du peuple de Dieu, quand il exulte et qu’il pleure, quand il rend grâce ou qu’il supplie, quand il se rassemble et manifeste le mystère de son unité dans le Christ. »
Livre des bénédictions [1]
Comptant parmi les plus vieux instruments sonores, les cloches ont toujours été associées à la Chrétienté dès les premiers siècles de son essor. Tout en rythmant l’écoulement des heures depuis le Moyen Âge, leur fonction première est liturgique : par leurs volées et leurs tintements, elles appellent les fidèles à se rassembler et à prier, associant leurs chants aux joies et aux peines de la communauté chrétienne et, qui plus est à Notre-Dame de Paris, aux grandes Heures de l’Histoire de France, aux événements marquant la communauté internationale.
Dès la fin du XIIe siècle, l’édification de la cathédrale étant encore loin d’être terminée, il est fait mention de la sonnerie des cloches précédant les offices. Cette sonnerie s’étoffa au cours des siècles au rythme de la vie de l’édifice et de son rayonnement. Huit cloches dans la tour Nord, deux bourdons dans la tour Sud, sept cloches dans la flèche accompagnées de trois pour la sonnerie de l’horloge : cet ensemble spatialisé constitua un véritable paysage sonore dans le ciel de Paris jusqu’à la fin du XVIIIe siècle.
La Révolution et son lot d’excès n’épargnèrent pas les cloches de Notre-Dame et le bourdon Marie qui furent descendus, brisés et fondus en 1791 et 1792. Le bourdon Emmanuel, pièce maîtresse de l’ensemble, fut heureusement épargné et demeure aujourd’hui l’un des plus beaux vases sonores d’Europe, sinon le plus remarquable. Depuis 1686, au sommet de la tour Sud, il ne cesse de sonner les grandes Heures de la cathédrale, des grandes fêtes liturgiques aux événements marquants du diocèse de Paris et de l’Église universelle. Mais il est aussi intimement associé à la Nation française dont il rehaussa depuis sa fonte de nombreux temps forts : Te Deum pour les sacres de rois, fins de conflits (dont les deux Guerres mondiales en 1918 et 1945), obsèques nationales, drames de l’Humanité, quand la prière rassemble à Notre-Dame les croyants et les hommes de bonne volonté…
Associées au bourdon Emmanuel, quatre cloches, placées en 1856 dans la tour Nord en remplacement de la sonnerie disparue, assurèrent les diverses sonneries liturgiques et civiles jusqu’à leur dépose, en 2012, dans le cadre du projet de nouvelle sonnerie mis en œuvre pour les 850 ans de Notre-Dame de Paris. Elles furent suppléées durant une année par les trois cloches du carillon des heures de 1867, installées dans la flèche.
C’est le 23 mars 2013, en la veille du dimanche des Rameaux et de la Passion, que la nouvelle sonnerie se fit entendre pour la première fois depuis « les tours retentissantes qui couvrent la ville de leur ombre et de leur bronze et proclament Dieu à l’horizon » [2].
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[1] De Benedictionibus promulgué par la Congrégation pour le culte divin le 31 mai 1984, chap. XXX, n°1032.
[2] Paul CLAUDEL, préface in Marcel AUBERT, Vitraux des cathédrales de France XIIe et XIIIe siècles – 19 reproductions en couleurs d’après nature, Paris, Plon, 1937.
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