L’hérésie devant l’Inquisiteur – 1233
Posté par francesca7 le 9 avril 2014
Période ‘de rigueurs implacables.
L’hérésie est abattue militairement; mais les parfaits continuent de prêcher et le nombre des croyants est encore considérable. Les prisons inquisitoriales sont bientôt pleines. On fait périr par le feu les hérétiques endurcis, les autres sont condamnés à la prison perpétuelle. S’ils se repentent et passent franchement au catholicisme romain, ils peuvent se tirer d’affaire par un pèlerinage en Terre Sainte. Mais c’est à la condition de confesser spontanément son erreur. Si, au lieu de cela, l’hérétique se laisse dénoncer, tout change.
En pratique, les choses se passent brutalement s’il s’agit d’un hérétique avoué. Pour les suspects on prend des formes, surtout dès que la grande guerre religieuse du Midi a pris fin. Un homme n’est que soupçonné. Un bruit public a couru. Cela suffit. S’il s’y ajoute une dénonciation, l’inquisiteur, déjà alerté, n’a pas une minute à perdre. Il lance une citation. Untel est invité à comparaître devant le tribunal de l’Inquisition au couvent des Frères prêcheurs.
Le curé reçoit la citation. Et il la signifie à son paroissien en présence de témoins dignes de foi. Le dimanche suivant, il la renouvelle, du haut de la chaire, en présence du clergé et du peuple. Et il en est ainsi trois dimanches ou trois jours de fête consécutifs.
Si le suspect se présente au jour dit en personne ou représenté par un procureur, l’interrogatoire pourra commencer. S’il ne se présente pas, il est contumax et encourt l’excommunication provisoire.
Au bout d’un an — l’inquisiteur en ce temps-là, à Toulouse, n’est pas pressé — le suspect est cité à nouveau, et s’il ne se présente pas, il est frappé de l’excommunication définitive. L’excommunication définitive est grave; elle entraîne l’interdiction pour les fidèles de communiquer avec l’homme. Elle entraîne aussi pour les fidèles qui en sont avisés, l’obligation de le dénoncer.
L’inquisiteur requiert alors le pouvoir civil d’arrêter l’homme et de le remettre, soit à son messager, soit à un sergent désigné, ou à l’un de ses notaires, voire, plus simplement, au geôlier de la prison inquisitoriale. Ou, au moins, que le pouvoir civil prête main-forte aux agents de l’inquisiteur. La requête est rédigée en termes comminatoires : l’inquisiteur se prévaut a de l’autorité du pape et de celle du roi ».
Voici l’homme devant l’inquisiteur. Celui-ci a la dénonciation sur la table. Il ne la montre point au suspect, car le dénonciateur peut être parfois un hérétique qui veut se faire passer pour un bon catholique. Ou bien un père qui dénonce son fils, un fils son père, un mari sa femme, une femme son mari. Grégoire IX a permis ces horribles entre-égorgements familiaux (lettre à Robert le Bougre du 19 avril 1233). Mais il a averti les inquisiteurs qu’il fallait prendre soin que « l’hérésie ne fût pas un faux prétexte pour condamner un adversaire ».
L’inquisiteur ou son substitut entame l’interrogatoire en présence de deux religieux « doués de discernement ». Point d’avocat. Un notaire ou deux personnes idoines pour transcrire les procès-verbaux. Les questions sont précises, établies à l’avance. Les réponses ne sont pas transcrites intégralement. Le notaire fera un analytique. Selon Bernard Gui, qui plus tard codifiera ces règles, on serre ainsi la vérité de plus près.
L’inquisiteur dispose d’un pouvoir discrétionnaire. Le point essentiel est de ne pas commettre d’irrégularité. Si l’inquisiteur en commet une alors qu’il s’agit de la vie d’un homme, de son honneur, de l’honneur et de la sécurité des siens, son assistant lui donne l’absolution, et tout est dit.
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