Posté par francesca7 le 7 avril 2014
Au XI’ siècle, en Bigorre, les femmes sont appelées à discuter des contrats communaux lorsqu’elles sont propriétaires. On connaît l’exemple de la vicomtesse Ermengarde qui reste seigneur du fief de Narbonne, hérité de son père, pendant cinquante ans, à partir de 1134. Détenant le pouvoir effectif malgré des maris successifs, elle commence stratégiquement par s’affranchir de la tutelle du comte de Toulouse pour placer ses biens sous la protection du roi de France. Elle sait se faire obéir et suivre par ses sujets dans ses décisions de chef d’Etat, décidant la guerre et signant les traités.
Pendant la guerre de Cent Ans, alors que leur mari guerroie fièrement, certaines d’entre elles se révèlent de remarquables femmes d’affaires. Eustache de Beauçay, épouse du sire d’Olivet, et Jeanne de Chalon, noble bourguignonne, en sont les plus beaux exemples. A la tête d’un élevage, la première vers 1340, la seconde plus d’un siècle plus tard, elles réussissent toutes deux à négocier la vente et l’achat des bêtes, leur habileté commerciale permettant de faire prospérer leur entreprise et leur domaine. Toutefois, au fil du temps, les hommes se sentent menacés par le pouvoir grandissant des femmes; ils invoquent, lors de l’assemblée des états généraux de février 1317, la loi salique pour les écarter du pouvoir.
A l’instar d’Elisabeth de Thuringe, de nombreuses femmes font des dons ou lèguent à leur mort leurs biens et propriétés à l’Eglise, au détriment de leur lignée. Et cela, au grand dam des hommes de la famille qui s’appliquent de plus en plus au cours des siècles à faire intégrer dans la législation le renforcement des droits de tutelle et la limitation des droits de propriété et d’héritage accordés aux femmes.
Même s’il n’est pas commun au Moyen Age de choisir ou de refuser un époux, le cas d’Aliénor n’est pourtant pas isolé, cette possibilité de décider n’étant cependant que très rare et réservée à l’élite. C’est le cas pour Elisabeth de Thuringe, morte en 1231. Veuve à 20 ans et mère de trois enfants, elle souhaite alors mener sa vie comme elle l’entend et refuse de se remarier, malgré les nombreux prétendants et la pression de sa famille. Il en va de même pour Isabelle de France la Bienheureuse (1225-1270), arrière-petite-fille d’Aliénor par sa mère Blanche de Castille, et qui semble avoir hérité du caractère de son aïeule. Elle se tourne dès son plus jeune âge vers une vie pieuse et re fuse plusieurs prétendants dont Conrad, fils de l’empereur Frédéric II, et Hugues XI de Lusignan. Elle choisit de se tourner vers le couvent et fonde elle-même celui des clarisses de Longchamp en 1259, avant de s’y retirer en 1263.

La direction et le fonctionnement de la société n’est-elle pas plus une affaire d’hommes que les croisades. Et ce, contrairement aux récits qu’en ont fait les historiens. Une multitude de femmes se sont engagées dans les rangs des croisés, souvent aux côtés de leur chevalier de mari. Anne Comnène, fille de l’empereur Alexis, relate l’arrivée des premiers croisés à Byzance. Elle décrit un certain nombre de femmes nobles à cheval ou en litière et d’autres cheminant à pied avec les hommes. Loin d’être des épouses faibles et soumises entraînées malgré elles par leur mari, certaines vont au contraire jusqu’à combattre auprès des soldats, équipées comme eux. Ainsi les épouses des Normands de Sicile, ou Ida d’Autriche qui se joint à Guillaume le Troubadour pour la première croisade, ou encore Florine, fille du duc Eudes I » de Bourgogne qui aurait combattu et rendu l’âme aux côtés de son fiancé Suenon, fils du roi de Danemark. Anne Comnène est frappée en particulier par la Normande Sichelgaïte, épouse de Robert Guiscard, capable de combattre comme un soldat, allant même jusqu’à poursuivre les déserteurs pour les ramener sur le champ de bataille.
Lors du siège de Saint-Jean-d’Acre en 1191, le chroniqueur Jordan Fatosme raconte que les femmes «montèrent aux remparts et portèrent les munitions; il n’y avait aucune fille ni femme qui ne portât sa pierre jusqu’au rempart pour la jeter». Cela dit, la plupart d’entre elles assument plutôt un rôle actif de soutien et d’encouragement, participant aux travaux des hommes, leur apportant l’eau et les vivres et soignant les blessés. Mais elles ne sont pas plus épargnées qu’eux par les combats ou par les famines. Elles sont tuées ou faites prisonnières par centaines, voire réduites à l’esclavage lors de la chute des Etats de Terre sainte.
Cet article a été publié le Lundi 7 avril 2014 à 18 h 19 min et est catégorisé sous AUX SIECLES DERNIERS.
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