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    La France, je l'aime corps et biens, en amoureux transi, en amant comblé. Je la parcours, je l'étreins, elle m'émerveille. C'est physique. Pour l'heure, c'est le plus beau pays du Monde, le plus gracieux, le plus spirituel, le plus agréable à vivre. En dépit de ses défauts, le peuple français a des réserves inépuisables de vigueur, d'astuce et de générosité. j'écris cela en toute connaissance de la déprime qui périodiquement enténèbre nos compatriotes. Ils ont une pente à l'autodénigrement, une autre au nihilisme. Je suis français au naturel et j'en tire autant de fierté que de volupté. J'ai pour ce vieux pays l'amour du preux pour sa gente dame, du soudard pour la servante d'auberge, de l'érudit pour ses grimoires, du paysan pour son enclos, du bourgeois pour ses rentes, du croyant des hautes époques pour les reliques de son saint patron... J'ai la France facile, comme d'autres ont le vin gai ; je l'ai au coeur et sous la semelle de mes godasses. Je suis français, ça n'a pas dépendu de moi et ça n'a jamais été un souci. Ni une obsession. Toujours un bonheur...

    Dictionnaire amoureux de la France - Denis Tillinac.

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Saint Valentin à l’origine

Posté par francesca7 le 3 mars 2014

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Décapité le 14 février 268 en représailles des conversions au christianisme qu’il suscita suite à la guérison d’une jeune fille aveugle, saint Valentin doit à son nom, qui signifie santé et vigueur, le fait que les fiancés, les jeunes gens à marier, ceux qui craignent les atteintes de la peste, les personnes, enfin, qui sont sujettes à l’épilepsie et aux évanouissements se sont placés sous son patronage.

La vertu de saint Valentin, prêtre, était si éclatante, et sa réputation si grande dans la ville de Rome, qu’elle vint à la connaissance de l’empereur Claude II, qui le fit arrêter, et, après l’avoir tenu deux jours en prison, chargé de fers, le fit amener devant son tribunal pour l’interroger. D’abord il lui dit, d’un ton de voix assez obligeant : « Pourquoi, Valentin, ne veux-tu pas jouir de notre amitié, et pourquoi veux-tu être ami de nos ennemis ? » Mais Valentin répondit généreusement : « Seigneur, si vous saviez le don de Dieu, vous seriez heureux et votre empire aussi ; vous rejetteriez le culte que vous rendez aux esprits immondes et à leurs idoles que vous adorez, et vous sauriez qu’il n’y a qu’un Dieu, qui a créé le ciel et la terre, et que Jésus-Christ est son Fils unique ».

Un des juges, prenant la parole, demanda au Martyr ce qu’il pensait des dieux Jupiter et Mercure. « Qu’ils ont été des misérables » répliqua Valentin, « et qu’ils ont passé toute leur vie dans les voluptés et les plaisirs du corps ». Là-dessus, celui qui l’avait interrogé s’écria que Valentin avait blasphémé contre les dieux et contre les gouverneurs de la république. Cependant le Saint entretenait l’empereur, qui l’écoutait volontiers et qui semblait avoir envie de se faire instruire de la vraie religion ; et il l’exhortait à faire pénitence pour le sang des chrétiens qu’il avait répandu, lui disant de croire en Jésus-Christ et de se faire baptiser, parce que ce serait pour lui un moyen de se sauver, d’accroître son empire et d’obtenir de grandes victoires contre ses ennemis.

L’empereur, commençant déjà à se laisser persuader, dit à ceux qui l’entouraient : « Ecoutez la sainte doctrine que cet homme nous apprend ». Mais le préfet de la ville, nommé Calpurnius, s’écria aussitôt : « Voyez-vous comment il séduit notre prince ! Quitterons-nous la religion que nos pères nous ont enseignée ? »

Claude, craignant que ces paroles n’excitassent quelque trouble ou quelque sédition dans la ville, abandonna le Martyr au préfet, qui le mit à l’heure même entre les mains du juge Astérius, pour être examiné et châtié comme un sacrilège. Celui-ci fit d’abord conduire le prisonnier en sa maison. Lorsque Valentin y entra, il éleva son coeur au ciel, et pria Dieu qu’il lui plût d’éclairer ceux qui marchaient dans les ténèbres de la gentilité, en leur faisant connaître Jésus-Christ la vraie lumière du monde.

Astérius, qui entendait tout cela, dit à Valentin :
« — J’admire beaucoup ta prudence ; mais comment peux-tu dire que Jésus-Christ est la vraie lumière ? »
« — Il n’est pas seulement », dit Valentin, « la vraie lumière, mais l’unique lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde »
« — Si cela est ainsi, dit Astérius, j’en ferai bientôt l’épreuve : j’ai ici une petite fille adoptive qui est aveugle depuis deux ans ; si tu peux la guérir et lui rendre la vue, je croirai que Jésus-Christ est la lumière et qu’il est Dieu, et je ferai tout ce que tu voudras ». La jeune fille fut donc amenée au Martyr, qui, lui mettant la main sur les yeux, fit cette prière : « Seigneur Jésus-Christ, qui êtes la vraie lumière, éclairez votre servante ».

A ces paroles, elle reçut aussitôt la vue, et Astérius et sa femme, se jetant aux pieds de leur bienfaiteur, le supplièrent, puisqu’ils avaient obtenu par sa faveur la connaissance de Jésus-Christ, de leur dire ce qu’ils devaient faire pour se sauver. Le Saint leur commanda de briser toutes les idoles qu’ils avaient, de jeûner trois jours, de pardonner à tous ceux qui les avaient offensés, et enfin de se faire baptiser, leur assurant que, par ce moyen, ils seraient sauvés. Astérius fit tout ce qui lui avait été commandé, délivra les chrétiens qu’il tenait prisonniers, et fut baptisé avec toute sa famille, qui était composée de quarante-six personnes.

L’empereur, averti de ce changement, craignit quelque sédition dans Rome, et, par raison d’Etat, il fit prendre Astérius et tous ceux qui avaient été baptisés, puis les fit mettre à mort par diverses sortes de tourments. Pour Valentin, le père et le maître de ces bienheureux enfants et disciples, après avoir été longtemps en une étroite prison, il fut battu et brisé avec des bâtons noueux ; enfin, l’an 268, le 14 février, il fut décapité sur la voie Flaminienne, où, depuis, le pape Jean Ier fit bâtir une église sous son invocation près du Ponte-Mole.

 

 Saint Valentine

 

Cette église ayant été ruinée, le pape Théodose en dédia une nouvelle, dont il ne reste plus de traces non plus. La porte appelée plus tard du Peuple portait anciennement le nom du saint Martyr. On garde la plus grande partie de ses reliques dans l’église de Sainte-Praxède. Les autres furent apportées en France, en l’église Saint-Pierre de Melun-sur-Seine, mais elles ne s’y trouvent plus aujourd’hui.

Saint Valentin est nommé, avec la qualité d’illustre Martyr, dans le Sacramentaire de saint Grégoire, dans le Missel romain de Tommasi, dans les divers martyrologes et calendriers : les Anglais l’ont conservé dans le leur.

Saint Valentin a été représenté : 1° tenant une épée et une palme, symboles de son martyre ; 2° guérissant la fille du juge Astérius. Cette circonstance de la guérison d’une jeune fille, et plus encore son nom de Valentin, qui signifie santé et vigueur, explique pourquoi les fiancés, les jeunes gens à marier, ceux qui craignent les atteintes de la peste, les personnes, enfin, qui sont sujettes à l’épilepsie et aux évanouissements se sont placés sous son patronage.

Plusieurs siècles après sa mort, Valentin fut canonisé en l’honneur de son sacrifice pour l’amour. La fête de la Saint-Valentin fut instituée pour contrer la Lupercalia, fête païenne donné le jour de la fertilité et dédiée à Lupercus, dieu des troupeaux et des bergers, et Junon, protectrice des femmes et du mariage romain. L’événement le plus marquant de ces réjouissances était la course des Luperques : des hommes mi-nus poursuivaient des femmes et les frappaient avec des lanières de peau de bouc, les coups reçus assurant fécondité et grossesse heureuse à celles-ci.

Une autre origine est attribuée aux festivités de la Saint-Valentin. On prétendait en effet que, sous certains climats, les oiseaux s’appariaient pour la belle saison prochaine, à la Saint-Valentin, comme il est reçu qu’en d’autres pays plus froids ils s’apparient à la Saint-Joseph. Prenant exemple sur eux, les hommes auraient trouvé ce jour propice à la déclaration amoureuse. Dans les anciens calendriers, à une époque où les devoirs de la vie civile se confondaient avec ceux de la vie religieuse, chaque jour y était marqué par un signe qui parlait immédiatement aux yeux des initiés.

C’est ainsi que la Saint-Valentin était marquée par un soleil dans la main du saint, ou par un gaufrier : un soleil, parce qu’il était censé reprendre sa force à cette époque, qui est à peu près celle des Quatre-Temps du printemps, et que les fleurs les plus précoces (amandiers, noisetiers, etc.) commencent à se montrer dans une partie de l’Europe ; un gaufrier, pour annoncer les réjouissances de Carnaval.

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Mythologie et Réincarnation

Posté par francesca7 le 3 mars 2014

 

 

par Isabel de la Cruz
Toutes les civilisations ont créé des mythes décrivant la création du monde et retraçant l’origine de leur existence. Dans ces récits, la plupart du temps, “l’humain” se confronte à une situation insoluble ou à une épreuve surhumaine qui lui demande de faire appel à quelque chose de plus élevé en lui, à une identité supérieure qui lui permettra de trouver une réponse au-delà des limites de ce monde. Les mythes reflètent des moments essentiels de notre évolution personnelle et décrivent les moments clés de l’évolution d’une civilisation. Ils nous invitent à une vision plus large de l’histoire de l’humanité.

170px-Herakles_and_Telephos_Louvre_MR219La mythologie est considérée de nos jours comme un ensemble de récits fabuleux et de contes, ou tout au mieux comme des textes renfermant une symbolique universelle. Plus la distance est grande – dans l’espace et le temps – avec une civilisation, plus l’ensemble des récits mythiques qui lui sont propres parait perdre le lien avec une quelconque réalité. Ce phénomène est surtout une caractéristique du monde occidental. Pourtant, l’Occident, ou plus précisément le système de croyances dans lequel l’homme occidental baigne, est en lien direct avec certaines mythologies, dont les plus importantes sont : la mythologie égyptienne (puis son héritière, la gréco-romaine), la mythologie celtique, et la plus récente, la mythologie hébraïque. 

Et si tous ces récits mythiques étaient la chronique de véritables évènements historiques ?

 Chaque culture et chaque peuple de la Terre possède sa propre mythologie. Nous pouvons ainsi dire qu’une mythologie définit une civilisation au même titre que son organisation sociale, son activité artistique, le savoir scientifique et technologique qu’elle développe. Seulement, en parcourant les différentes mythologies de la planète, il est possible de remarquer certaines similitudes entre les récits issus de toutes les grandes civilisations, même éloignées géographiquement et surtout dans le temps. Il est en effet très intéressant d’observer une récurrence infaillible dans toutes les traditions, aussi bien anciennes et élaborées que plus récentes. Toutes coïncident à retracer l’origine d’une culture et son évolution première grâce à l’aide “d’êtres venus du ciel”, apportant un savoir essentiel à son développement : l’agriculture, la construction, le tissage, la musique, l’écriture. Chaque civilisation naissante cherche ainsi, à travers sa mythologie, à perpétuer une vision du monde, de ses origines, de son vécu. En fait, elle apporte une réponse aux grandes questions existentielles. 

D’où venons-nous ? Pourquoi sommes-nous ici ? Vers où allons-nous ?

 La culture occidentale a toujours porté un intérêt, qui devient de plus en plus important actuellement, aux recherches archéologiques, et pour cause : le lien avec sa tradition mythique et son vrai sens a été perdu. Par ce geste de découvrir, de dévoiler le passé, l’homme occidental cherche à retrouver ses origines. Tout comme un orphelin chercherait à découvrir qui sont ses vrais parents. D’autre part, lorsqu’à un niveau individuel nous nous sentons appelés à chercher des réponses à ces mêmes questions essentielles sur nos origines, nous arrivons assez vite à l’idée de la réincarnation. En introduisant cette nouvelle variable, celle de la possibilité pour l’âme d’évoluer grâce à de multiples expériences, il est alors possible de commencer à percevoir la vie et le monde de manière non linéaire, mais plutôt multidimensionnelle, de la même manière que la physique actuelle (théorie des cordes, théorie quantique) commence à décrire l’Univers : un système de synchronicités parfaitement orchestrées à différents niveaux et en interaction constante. 

Dieux, anges, et êtres venus du ciel. C’est ainsi que toute une civilisation, vue comme une famille d’âmes, naît dans ce monde, grandit, mûrit et quitte ce plan terrestre en laissant le fruit de son expérience pour les civilisations héritières à venir. Si ce point de vue est exact, alors ces “dieux”, “êtres venus du ciel”, “anges” dont parlent les mythes sont probablement différents noms donnés aux mêmes personnes. Des êtres que nous pourrions appeler aujourd’hui frères de l’espace, êtres de lumière, ou encore maîtres ascensionnés. Tous des noms différents pour appeler ceux qui, faisant partie d’une civilisation ancienne, sont partis de cette réalité pour vivre sur d’autres espaces des multiples dimensions planétaires, afin de continuer leur évolution. Les mêmes qui non seulement ont laissé leur savoir inscrit avant de partir (Guizeh, Chichen-Itza, …), mais aussi maintiennent un lien de fraternité et d’aide envers leurs cadets (sauf quelques-uns qui ont commis des erreurs d’évolution par superbe : mythe d’Hercules/Héraclès ou autres), et qui parfois reviennent achever des expériences propres à notre dimension (acquisition d’une conscience de la réalité sensible), comme les “anges déchus”. Petit à petit, nous observons que les différents mythes, au-delà de leur symbolique certaine et de l’idée religieuse qu’ils véhiculent, correspondent avant tout à une chronique d’évènements historiques clés, riches en enseignements initiatiques. Ils contiennent la mémoire de l’évolution de l’humanité, à travers des civilisations qui se succèdent et se chevauchent, parfois violemment (génocides, cataclysmes, …), pour donner toujours une nouvelle opportunité d’apprendre aux nouvelles et aux anciennes âmes. Par exemple, celui qui a participé à l’extermination de groupes indiens pourrait bien aujourd’hui être l’un d’eux, et vivre dans sa propre chair une situation qu’il a lui-même aidé à mettre en place. 

Les mythes, témoignages de l’invisible et du monde spirituel.<Pensons par exemple à l’échelle de Jacob : ce mythe sur la création et le fonctionnement du monde dans l’Ancien Testament, qui parle des anges, explique que celui qui est plus proche du Ciel aide celui qui est immédiatement en dessous à monter, à s’élever, à ascensionner sur le chemin vers le Ciel. Cette description pourrait bien nous donner de bonnes raisons de concevoir l’existence d’une aide apportée par des êtres plus évolués technologiquement et spirituellement, et qui seraient en réalité des “anciens”, des “grands frères” qui nous montreraient l’exemple de la tolérance et de la solidarité comme moyen de vivre. Cette vision de la diversité et de la multiplicité de la réalité, intégrée à notre vie quotidienne, en commençant par nous-mêmes, est un des cadeaux que nous apportent les mythes.

 Isabel de la Cruz organise et anime des stages et des formations basés sur une approche quantique de la santé et une vision multidimensionnelle de l’Être humain.www.etoileduberger.com  

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La Folle de Tréhoudy

Posté par francesca7 le 3 mars 2014

près de la Mettrie (Mayenne)

(D’après « La Tradition », paru en 1904)

 
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Près de Mayenne, au delà du village de la Mettrie, il existait sur les bords de l’Aron, un moulin appelé « Tréhoudy », qui a été détruit depuis des siècles. Ce nom serait même perdu, s’il n’était resté attaché à une planche, qui permet de franchir la rivière en cet endroit et à la légende mettant en scène deux enfants du même village amoureux depuis leur plus jeune âge.

Jardiau et Blouette étaient enfants du même village, de la monnerie de Tréhoudy et s’aimaient depuis le berceau, pour avoir, ensemble, joué, ri et pleuré, cherché des nids, cueilli des mûres, mordu tour à tour aux mêmes fruits. Il était grand, aussi fort qu’un bâton de mêlier ; elle, petite et mincette. Quand, pour lire dans « la Croi de Dieu », ils allaient au bourg d’Aron, par le chemin de la Mettrie, il la passait sur son dos aux mauvais pas, ou bien avançait son sabot pour qu’elle y posât le pied. Tous deux se regardaient : Jardiau était fier, Blouette souriait.

Jardiau eut dix-huit ans, Blouette seize, et ils continuaient de s’aimer : l’amour avait, à leur insu, cheminé du cœur de l’un au cœur de l’autre. Elle était brune et jolie, mais le regard qui jaillissait de ses prunelles un peu fauves, avait parfois des langueurs troublantes, qu’il fut perdu dans le bleu du ciel ou abaissé sur les bouleaux, dont le reflet grêle trempait dans le bief du moulin.

D’ordinaire, pensive, Blouette parlait peu et n’avait que des éclairs de gaieté. D’aucuns l’appelaient : « la belle qui dort » ; d’autres : la belle qui soupire », et personne ne la recherchait, quoiqu’elle fût bonne et douce. On n’aime chez nous que les filles qui ont le sang aux joues et le rire aux dents. Elle ne levait pas les yeux quand Jardiau l’abordait. Quelquefois, lorsqu’elle revenait de la fontaine, à la chute du jour, il la rejoignait à la dérobée et se chargeait de sa buire, qu’il portait jusqu’à l’entrée du village. Ils n’échangeaient que quelques paroles rapides, indifférentes, et se quittaient par un « bonsoir Blouette, bonsoir Jardiau », sans plus, mais leurs cœurs, un instant rapprochés, avaient battu plus près l’un de l’autre et c’était assez pour leur joie d’un ou deux jours.

Cet amour de jouvenceau qui n’ose, de jouvencelle pudique, dura plusieurs années. Un dimanche pourtant que Blouette cueillait des brindilles de genêts pour s’en faire un balai, et que, près de là, Jardiau, par passe-temps cherchait des noisettes, il vint à elle et lui dit : « Quand nous marierons-nous ? » Elle répondit : « Quand nous pourrons ! » et devint plus rouge qu’un coquelicot.

Les voisins plaisantaient de cette affection discrète et silencieuse. Qu’attendaient nos amoureux pour s’épouser ? Qu’ils eussent gagné cinquante écus, afin de se mettre en ménage. L’argent était rare autrefois et Blouette ne gagnait que quelques deniers par jour : pourtant elle filait du lever au coucher du soleil. Ils souffraient dans l’espoir d’un bonheur à venir, sans se douter qu’ils caressaient une chimère.

L’espérance est une molle berceuse, qui endort l’homme dans la quiétude et le réveille souvent dans les tourments. Jardiau reçut l’ordre de se rendre à l’armée du roi, et il lui fallut en trois jours dire adieu à père, à mère, à frères, à sœurs, à l’âtre de sa chaumière, aux grands arbres de la fontelaie, aux ajoncs et aux bruyères de la lande, et le vin que lui versa le sergent du roi ne le consola point.

La veille de son départ, il vint, sur le soir, trouver Blouette à la fontaine. En s’abordant, leurs yeux roulèrent des larmes. Ils allèrent l’un près de l’autre, le long du bief, sans parler, lui tremblant, elle frissonnante.

— M’attendras-tu, lui dit Jardiau ?

— Oui, reprit-elle.

Et leurs regards se marièrent un instant, ce qu’ils n’avaient pas fait depuis qu’ils étaient petits. Il ajouta en avançant les lèvres : « Veux-tu ? » et avant qu’elle n’eût répondu, il la serra dans ses bras et lui donna un long baiser sur la joue. Elle, prit la main de son fiancé et y déposa deux pièces d’argent et une médaille de la Vierge qu’elle portait à son cou : c’était tout ce qu’elle possédait. Puis, ils se quittèrent en se disant : Nous nous aimerons toujours !

Le lendemain, Jardiau s’en alla à Mayne (forme ancienne du nom de Mayenne), accompagné de ses frères, et Blouette qui le guettait, blottie derrière une haie du chemin, le vit passer. Il chantait, le soldat du roi, puis s’arrêtait par instant pour étouffer un sanglot et s’essuyer les yens du revers de la main.

Après le départ de son promis, Blouette devint plus blanche que les liserons des bois, mais, chose étrange, la joue sur laquelle avait été déposé le baiser de Jardiau, resta empourprée comme d’une fleur de pommier. Les jours et les semaines passèrent et cette efflorescence demeura : l’empreinte avait été frappée au feu brûlant des lèvres de son ami.

Les commères des alentours la plaisantèrent, et l’une d’elle avança qu’elle avait une marque du diable. A ces moqueries, Blouette ne répondait rien, joyeuse en son âme de porter cette fleur de baiser, qui était un souvenir toujours vivant de la tendresse de son bien-aimé.

Jardiau et Blouette ne devaient plus se revoir. Lui fut tué à l’armée du roi et la nouvelle en arriva au pays. Blouette l’apprit et ses yeux s’ouvrant démesurément, elle regarda fixement devant elle et ne ne pleura pas. Elle ne pleura jamais, mais n’eut plus pour personne le moindre sourire. La douleur figea ses joues, tarit ses larmes et peu après elle perdit la raison.

La Folle de Tréhoudy dans LEGENDES-SUPERSTITIONS 220px-Dauborn_BrunnenTous les soirs, en allant à la fontaine, elle s’arrêtait longtemps à l’endroit où Jardiau lui avait dit son dernier adieu, et là elle écoutait. Son oreille troublée s’emplissait confusément de plaintes, de soupirs, de bruits de baisers, alors que dans le calme de la fin du jour, on n’entendait que les pleurs du gâtoir du moulin et le cri des orfraies.

Pendant le jour, elle errait çà et là, la tête penchée et dolente, fuyant le monde, cueillant des fleurs, ou se faisant des colliers et des couronnes de torsades de houblons et de clématites sauvages. Dans les ombres du crépuscule, elle découvrait, disait-elle, le visage de Jardiau, le mirodait au clair de lune, jusque dans les ondes moirées d’argent des remous de la rivière. Sa figure s’empourprait alors un instant, puis s’éteignait dans une pâleur livide.

Un soir, l’infortunée crut l’apercevoir mouvant et voltigeant dans un feu follet. Elle se précipita vers l’apparition, sans songer au danger qui l’environnait et poussa tout à coup un grand cri. Elle était tombée dans le bief. On l’en retira, mais quelques jours après, la vie s’échappait de ses lèvres au moment où elle venait de prononcer le nom de son fiancé et celui de la Vierge Marie.

C’est ainsi que Blouette mourut de mal d’amour, disait la vieille paysanne, qui nous contait cette légende. Elle ajoutait : « On laisse trop les petits enfants s’amignonner, et l’on en rit. En grandissant, il arrive que leurs cœurs se prennent, se serrent et s’unissent à ne pouvoir les séparer. Ce sont des branches nouées ; lorsqu’on coupe l’une d’elles, l’autre périt. »

Depuis ce temps-là, quand une fille d’Aron est garçonnière ou a des tendresses trop tôt écloses, sa mère ne manque pas de lui dire : « Malheureuse, tu me fais honte, tu finiras comme la folle de Tréhoudy ! »

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