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    La France, je l'aime corps et biens, en amoureux transi, en amant comblé. Je la parcours, je l'étreins, elle m'émerveille. C'est physique. Pour l'heure, c'est le plus beau pays du Monde, le plus gracieux, le plus spirituel, le plus agréable à vivre. En dépit de ses défauts, le peuple français a des réserves inépuisables de vigueur, d'astuce et de générosité. j'écris cela en toute connaissance de la déprime qui périodiquement enténèbre nos compatriotes. Ils ont une pente à l'autodénigrement, une autre au nihilisme. Je suis français au naturel et j'en tire autant de fierté que de volupté. J'ai pour ce vieux pays l'amour du preux pour sa gente dame, du soudard pour la servante d'auberge, de l'érudit pour ses grimoires, du paysan pour son enclos, du bourgeois pour ses rentes, du croyant des hautes époques pour les reliques de son saint patron... J'ai la France facile, comme d'autres ont le vin gai ; je l'ai au coeur et sous la semelle de mes godasses. Je suis français, ça n'a pas dépendu de moi et ça n'a jamais été un souci. Ni une obsession. Toujours un bonheur...

    Dictionnaire amoureux de la France - Denis Tillinac.

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Le Paon était un met au Moyen Age

Posté par francesca7 le 26 décembre 2013

 

 
220px-Peacock_served_in_full_plumage_(detail_of_BRUEGHEL_Taste,_Hearing_and_Touch)Chez nos vieux romanciers, le paon est qualifié du titre de noble oiseau, et sa chair y est regardée comme la nourriture des amants, et comme la viande des preux. Il y avait très peu de mets alors qui fussent aussi estimés.

Le paon eut tous les honneurs dans les jours brillants de la Chevalerie. Plusieurs grandes familles, parmi lesquelles celle des Montmorency, avaient placé son effigie, en cimier, sur leur heaume. Aux cours d’amour de nos provinces méridionales, la récompense que recevaient les poètes ayant remporté le prix était une couronne faite de plumes de paon, qu’une dame du tribunal portait elle-même sur leur tête.

Un de nos poètes du XIIIe siècle, voulant peindre les fripons, dit qu’ils ont autant de goût pour le mensonge, qu’un affamé en a pour la chair de paon. Enfin les rois, les princes et grands seigneurs, donnaient très peu de festins d’appareil où le paon ne parût comme le plat distingué. La coutume, dans ces sortes d’occasions d’éclat, était de le servir rôti ; mais on le servait entier avec tous ses membres, et même avec ses plumes.

Selon Platine de Crémone, auteur qui énonça les mêmes principes que ceux que Brillat-Savarin publiera deux siècles plus tard, « au lieu de plumer l’oiseau, il faut l’écorcher proprement, de manière que les plumes s’enlèvent avec la peau ; il faut lui couper les pattes, le farcir d’épices et d’herbes aromatiques, lui envelopper la tête d’un linge, et le mettre à la broche. Pendant qu’il rôtit, vous arroserez continuellement le linge avec de l’eau fraîche, pour conserver son aigrette. Enfin, quand il sera cuit, rattachez les pattes, ôtez le linge, arrangez l’aigrette, rappliquez la peau, étalez la queue, et servez ».

« Il y a des gens, ajoute Platine, qui, au lieu de rendre à l’animal, lorsqu’il est rôti, sa robe naturelle, poussent l’ostentation de magnificence jusqu’à le faire couvrir de feuilles d’or. D’autres emploient, pour réjouir les convives, un moyen plaisant. Avant que le paon soit rôti, ils lui emplissent le bec de laine imprégnée de camphre. En le plaçant sur la table, on met le feu à la laine, et l’oiseau alors semble un petit volcan qui vomit des flammes ». Au reste, ce n’étaient point les écuyers-servants qui avaient l’honneur de poser le paon sur la table. Cette cérémonie glorieuse regardait les dames ; ordinairement elle était déférée à celle d’entre elles que distinguait le plus sa naissance, son rang, ou sa beauté. Suivie d’un certain nombre d’autres femmes, accompagnée d’instruments de musique, cette reine de la fête entrait ainsi en pompe dans la salle du festin, portant en main le plat d’or ou d’argent dans lequel était l’oiseau. Le paon

Là, au bruit des fanfares, elle le portait devant le maître du logis, si ce maître était d’un rang à exiger un pareil hommage ; ou devant celui des convives qui était le plus renommé pour sa courtoisie et sa valeur. Quand le banquet se donnait après un tournoi, et que le chevalier ayant remporté le prix du combat se trouvait à la table, c’était à lui, de droit, qu’on déférait l’honneur du paon. Son talent alors consistait à dépecer l’animal avec assez d’adresse pour que toute l’assemblée pût y goûter. Le Roman de Lancelot, dans un repas qu’il suppose donné par le roi Arthus aux chevaliers de la Table-Ronde, représente le monarque découpant lui-même le paon ; et il le loue d’avoir fait si habilement ses distributions que cent cinquante convives, qui assistaient au festin, apprécièrent.

Le Paon était un met au Moyen Age dans AUX SIECLES DERNIERS 262px-Peacock_courting_peahenSouvent l’enthousiasme qu’excitait tant de gloire dans le chevalier tranchant, enflammait tout à coup son courage. Il se levait ; et, la main étendue sur l’oiseau, faisait à haute voix un vœu d’audace ou d’amour, capable d’augmenter encore l’estime qu’avait inspirée pour lui ses hauts faits. Par exemple, il jurait de porter, dans la plus prochaine bataille, le premier coup de lance aux ennemis ; de planter le premier, en l’honneur de sa mie, son étendard sur le mur d’une ville assiégée. Quant à la formule du serment, elle était conçue en ces termes : « Je voue à Dieu, à la Vierge Marie, aux dames, et au paon, de… »

Le vœu du premier preux étant achevé, on présentait successivement le plat aux autres convives, qui tous, chacun à leur tour, faisaient un serment du même genre. Mais, comme en pareille circonstance, les têtes s’échauffent aisément, et qu’alors on se pique toujours d’outrepasser ceux qui parlent avant nous, il devait résulter, de ce moment d’effervescence, les promesses les plus téméraires, et souvent les plus extravagantes. Les romanciers et les historiens en offrent des exemples nombreux. Cette cérémonie portait le nom de Vœu du paon.

Quant à cette sorte d’aliment, on y a renoncé peu à peu. En 1560, Champier marque beaucoup de surprise d’en avoir vu en Normandie, près de Lisieux, des troupeaux considérables : « On les y engraisse avec du marc de pommes, dit-il, et on les vend aux marchands de poulaillers, qui vont les vendre dans les grandes villes pour la table des gens riches ». Champier était Lyonnais, avait étudié à Orléans, et était attaché au service de François Ier. La manière dont il parle des paons, l’étonnement que lui causèrent ceux de Normandie, donnent à penser qu’on n’en mangeait déjà plus dans le Lyonnais, dans l’Orléanais, ni à la Cour. Cependant de Serres écrivait encore en 1600 que « plus exquise chair on ne peut manger ». Mais rien n’indique où de Serres avait mangé du paon.

(D’après « Histoire de la vie privée des Français depuis l’origine de la nation jusqu’à nos jours », paru en 1782)

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