Notre chère Barbara
Posté par francesca7 le 28 septembre 2013
Née dans le 17e arrondissement de Paris au 6, rue Brochant, Monique Serf passe dans ce quartier des Batignolles les premières années de sa vie en compagnie de ses parents, Jacques Serf, juif alsacien, et Esther Brodsky, de sa grand-mère russe et de son frère Jean, de deux ans son aîné. Sa famille s’agrandit : une deuxième fille, Régine, naît à Roanne en 1938 et un deuxième garçon, Claude, voit le jour à Tarbes en 1942.
Bien avant que la guerre n’éclate, sa jeunesse est marquée par des déménagements successifs. De la rue Nollet à Paris en 1931 au 6, boulevard Gaston Crémieux à Marseille en 1937, ceux-ci redoubleront sous l’occupation nazie pour fuir la chasse faite aux Juifs par le gouvernement de Vichy. S’y ajouteront les séparations pour déjouer les dénonciations. À la fin de la guerre, les membres de la famille se retrouvent au Vésinet.
Barbara aura à supporter le comportement incestueux de son père pendant son enfance. Â l’âge de dix ans et demi, à Tarbes, son père abuse d’elle. Sa jeunesse bascule soudain « dans l’horreur » d’où personne, pas même sa mère, ne tentera de la sauver. Il recommence plusieurs fois, elle multiplie les fugues, en vain. Un jour, en Bretagne, n’en pouvant plus, elle se précipite à la gendarmerie, où son père vient la chercher et laisse entendre qu’elle affabule. L’affaire est classée. Elle refusera d’évoquer le drame en public, sauf dans ses Mémoires.
Le « bouche à oreille » aidant, le succès ne se fait pas attendre, le mariage (avec Claude Sluys) non plus (31 octobre 1953) ni l’occasion d’enregistrer deux chansons chez Decca au début de l’année 1955 : Mon pote le Gitan et L’Œillet blanc, diffusées en 78 tours et 45 tours.
En 1955, les époux se séparent. À la fin de cette année-là, Barbara retourne à Paris où elle chante dans de petits cabarets : « La Rose rouge », en 1956, « Chez Moineau », en 1957 puis à « L’Écluse » où elle a déjà chanté pour de courts engagements. En 1958, elle réussit à s’imposer, sous le surnom de « La Chanteuse de minuit », si bien que sa notoriété grandit et attire un public de fidèles, en particulier parmi les étudiants du Quartier latin. C’est cependant bien sous le nom de Barbara qu’elle effectue son premier passage à la télévision le 12 juillet 1958, sur l’unique chaîne de la RTF, dans l’émission Cabaret du Soir, où la présentatrice la compare à Yvette Guilbert et lui assure « qu’elle deviendra certainement une grande vedette ».
À cette époque, elle commence à écrire. Remarquée et engagée par Pathé Marconi, elle enregistre (sous le label « La Voix de son Maître ») son premier disque 45 tours 4 titres avec deux de ses propres chansons : J’ai troqué et J’ai tué l’amour et au printemps 1959, son premier 33 tours (Barbara à L’Écluse).
En décembre 1959, apprenant que son père, qui avait fui sur les routes pour noyer son crime dans le vagabondage et la déchéance, est mourant et la réclame auprès de lui à Nantes, elle se précipite à son chevet. Malheureusement, elle arrive trop tard pour recueillir son mea culpa et lui accorder son pardon. À la vue de son corps, à la morgue, ses sentiments oscillent entre fascination, panique, mépris, haîne d’une part et un immense désespoir d’autre part9. Au lendemain de l’enterrement, elle commence l’écriture de la chanson Nantes, qu’elle terminera quelques heures avant son passage au théâtre des Capucines le 5 novembre 1963 ; ce sera l’une de ses plus grandes chansons.
En 1960, elle change de maison de disques pour signer chez Odéon. Elle enregistre Barbara chante Brassens et Barbara chante Jacques Brel : le premier de ces albums est couronné par l’Académie Charles-Cros dans la catégorie « Meilleure interprète ».
Son album Seule est l’une des meilleures ventes de 1981. Son plus grand succès sur scène est celui qu’elle présente la même année à l’hippodrome de Pantin (emplacement actuel du Zénith de Paris). Elle offre là bien plus que de simples concerts, ses représentations sont de véritables messes dont les rappels ininterrompus se prolongent jusque tard dans la nuit. Elle interprétera notamment Regarde, chanson pleine d’émotions qu’elle composa et chanta pour la campagne présidentielle de François Mitterrand à partir du 8 avril 1981. C’est lors de ce spectacle phare que la voix de la chanteuse, pour la première fois, et irrémédiablement, se brise. Elle ne cherchera pas à le cacher mais saura au contraire s’en servir pour renforcer l’aspect dramatique et authentique de son interprétation.
Se renouvelant sans cesse, la chanteuse continue d’attirer un public très jeune. L’année suivante, on lui décerne le Grand Prix National de la Chanson en reconnaissance de sa contribution à la culture française. Par ailleurs, elle développe une relation de travail et d’amitié avec la vedette cinématographique montante Gérard Depardieu et son épouse Élisabeth. En 1985, elle coécrit la musique et le texte de la pièce Lily Passion avec Luc Plamondon, dans laquelle elle joue et chante avec Depardieu. Sorte d’autobiographie romancée, c’est l’histoire d’une chanteuse qui voua toute sa vie à son public. La première représentation a lieu au Zénith de Paris, le 21 janvier 1986. L’été venu, elle est invitée sur la scène du Metropolitan Opera de New York pour un Gala Performance, donné le 8 juillet. Elle accompagne au piano le danseur étoile Mikhaïl Barychnikov qui danse sur deux de ses chansons (Pierre et Le Mal de vivre).
À cette période elle devient active dans la collecte de financements pour le traitement du sida. Elle rend visite aux malades dans les hôpitaux et dans les prisons. Lors de ses concerts, elle met des corbeilles de préservatifs à la disposition des personnes venues l’écouter ; engagement dont témoignera artistiquement le titre Si d’amour à mort.
En 1988, elle est faite chevalier de la Légion d’honneur par le Président François Mitterrand.
En 1991, elle enregistre Lettres à un jeune poète de Rainer Maria Rilke pour les Éditions Claudine Ducaté. Elle dédicacera cet enregistrement dans une librairie parisienne, la même année.
En novembre/décembre 1993, Barbara est à nouveau sur la scène parisienne du théâtre du Châtelet. C’est alors que des problèmes de santé la contraignent à interrompre les représentations. Après quelques jours de repos, elle retrouve son public, le temps d’enregistrer le spectacle, puis renonce à poursuivre et annule les dernières représentations. Suit une tournée. Son ultime apparition sur scène aura lieu le soir du samedi 26 mars 1994 au Centre de congrès Vinci de la ville de Tours.
Après 16 années passées loin des studios, elle enregistre douze nouvelles chansons durant l’été 1996. Pour ce disque, Jean-Louis Aubert signe le texte Vivant poème et Guillaume Depardieu celui de À force de. Sorti le 6 novembre, cet album sobrement intitulé Barbara, sera son chant du cygne.
Monique Andrée Serf, dite Barbara (ou Barbara Brodi à ses débuts), est une auteur-compositeur-interprète française, née le 9 juin 1930 à Pariset morte le 24 novembre 1997 à Neuilly-sur-Seine dans les Hauts-de-Seine, âgée de 67 ans et inhumée dans la 4e division du Cimetière parisien de Bagneux.
Sa poésie engagée, la beauté mélodique de ses compositions et la profondeur de l’émotion que dégageait sa voix lui assurèrent un public qui la suivit pendant quarante ans.
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