Arbois, ville de Pasteur
Posté par francesca7 le 28 juin 2013
Au seuil d’une belle « reculée », à cheval sur la Cuisance, encadrée de vignes, Arbois est une petite ville pittoresque, un centre de tourisme attrayant. Certaines caves peuvent être visitées et les armateurs y dégusteront le fameux vin du pays ; depuis le sentier qui serpente sur la rive gauche de la Cuisance, une belle vue s’offre sur l’église St Just, le château Bontemps – ancien château d’Arbois qui fut résidence des comtes de Bourgogne – les vieux moulins et la ville.
Henri IV et les Arboisiens – en 1595, Henri IV prenant prétexte de l’appui donné par les Comtois aux ligueurs, envahit la province. « Je veux bien, dit-il, que la langue espagnole demeure à l’Espagnol, l’allemande aux Allemands, mais toute la française doit être à moi ». Le maréchal de Biron, qui mène la campagne, assiège Arbois, défendue par le capitaine Morel. Après trois jours d’assauts infructueux, le maréchal offre la vie sauve à la petite garnison et à son chef, s’il y a reddition immédiate. Les gens d’Arbois capitulent et, malgré la parole donnée, Morel est aussitôt saisi et pendu. Il faut toute la diplomatie gourmande d’Henri IV, grand amateur de vin d’Arbois, pour apaiser la rancune des Arboisiens.
Les Arboisiens sont restés célèbres dans toute la Comté pour leur ardeur à manifester un esprit volontiers frondeur et indépendant. Les vignerons d’Arbois ont toujours eu la tête près du bonnet ; leurs séditions ne se comptent plus. En 1834, lorsque Lyon se soulève, ils proclament la République. Mais il restent tout interdits quand ils s’aperçoivent que les limites du nouveau régime ne dépassent pas les murs de leur petite cité. Il leur faut revenir à Louis Philippe. C‘est lors de cette insurrection que les habitants d’Arbois, venus réclamer de la poudre à la sous préfecture de Poligny, et sommés de désigner ceux qui les avaient entraînés à la révolte, firent cette réponse demeurée célèbre : « Nos san toutchefs » (nous sommes tous chefs). De nos jours, la force explosive des vinerons ne se manifeste plus qu’à l’encontre de la Régie. En 1906, 1907, 1921, 1922, les bouilleurs de cru se lèvent, chantent pouilles à leur vieille ennemie et, soulagés, reprennent le collier.
La jeunesse de PASTEUR – Louis Pasteur est né à Dole, mais sa véritable petite patrie comtoise est Arbois. Il a passé là sa jeunesse, ses parents y sont morts et jusqu’à la fin de sa vie, il n’a jamais manqué d’y venir en vacances. Les Pasteur s’installent dans la ville en 1827, dans une tannerie que le savant transformera, plus tard, en maison bourgeoise. Le père exécute tous les travaux du cuir ; la mère tient le ménage, soigne les enfants et fait les comptes ; la vie familiale, étroite, d’une tenue morale exceptionnelle, marque le jeune Louis d’une empreinte indélébile.
Il fréquente d’abord l’école primaire, puis le collège (dans la cour, on peut voir encore un cadran solaire de sa fabrication). Réfléchi jusqu’à donner l’apparence de la lenteur, travailleur, consciencieux, il ne compte que parmi les bons élèves moyens ; son goût le plus accusé est le dessin. Il fait le portrait de ses parents, de ses amis, en des pastels et crayons qui ne manquent pas d’accent ; pour passer son baccalauréat, le jeune homme entre au lycée de Besançon comme répétiteur.
L’œuvre géniale – En 1843 commence, avec l’école normale, la carrière qui a fait de pasteur un des plus grands hommes que l’humanité ait produits. Il débute par la science pure ; ses études sur la géométrie des cristaux sont remarquées. Puis aborde les problèmes pratiques ; par ses recherches sur les fermentations, il réserve le vin, la bière, le vinaigre des maladies ruineuses ; par ses observations sur le ver à soie, il sauve la sériciculture. Par ses vaccins, il guérit la rage chez l’homme, le charbon chez les animaux. Ses théories microbiennes ont révolutionné la chirurgie et la médecine : l’antisepsie, l’asepsie, l’isolement des malades en découlent ; Pasteur a également ouvert la voie à la thérapeutique par les sérums.
Quand, chaque année, entouré de sa famille, le savant revient à Arbois, il continue son travail, sans lequel la vie pour lui, n’aurait plus de sens, mais alors qu’à Paris l’accès de son cabinet et de son laboratoire est condamné, son logis d’Arbois s’ouvre à tout le monde. Les gens s’empressent de venir solliciter son appui ou demander un conseil. Les vignerons le considèrent comme le sorcier des vins et, dès qu’une bouteille se pique, viennent frapper à sa porte ; la patience et l’obligeance de Pasteur sont inépuisables. On le croit aussi médecin et l’espoir d’une consultation gratuite conduit vers son cabinet les Arboisiens économes. A la procession du « Biou », il prend place dans le cortège et retrouve une âme d’enfant pour fêter la nouvelle vendange. En 1895, le grand savant, malade ne peut se rendre à Arbois, le 28 septembre, il n’est plus.
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