Cheminée sarrasine
Posté par francesca7 le 24 mai 2013
Particulièrement répandues dans la Bresse savoyarde, les cheminées sarrasines ont été construites sur l’ancien domaine des sires de Bâgé depuis le 13ème siècle. Une trentaine seulement d’origine du 17ème et 18ème siècle sont conservées aujourd’hui, elles se caractérisent à l’intérieur par un énorme foyer, non adossé au mur, surmonté d’une hotte sous laquelle ont peut se tenir debout et d’un conduit de fumée à pans de bois. A l’extérieur, une mitre assimilable à un petit clocher – ou plus rarement à un reliquaire – coiffe le conduit. De plan rond, carré (sur le modèle du clocher de St Philibert de Tournus) ou octogonal (celui de St André de Bâgé) et d’inspiration romaine, gothique ou parfois byzantine, ces mitres sont ajourées sur un ou plusieurs étages et se terminent par un cône, une pyramide ou un clocheton de style baroque. D’une hauteur inhabituelle (3 à 5 m) et surmontées d’une croix en fer forgé, elle sauraient abrité autrefois une cloche, utile à la vie quotidienne dans ces fermes traditionnellement isolées.
Leur appellation « sarrasine » ne traduit pas une origine géographique, mais une survivance du sens médiéval du mot, qui signifiait « appartenant à une civilisation étrangère, ancienne ou inconnue ».
La cheminée sarrasine ou cheminée sarrazine est un type de cheminée typique de la région naturelle de la Bresse, en particulier sur les toits des fermes bressanes. On peut la trouver, en moindre quantité, dans d’autres régions. À l’extérieur, cette cheminée typique a l’aspect d’un minaret ou d’un petit clocher. Généralement surmontée d’une croix, elle correspond avec un foyer placé au centre de la pièce, dont on pouvait faire complètement le tour. C’est une cheminée inspirée de celle de la hutte primitive, feu central et fumée s’échappant par un orifice au centre de la toiture. Cette ouverture devant être fort large, on dut parer à l’inconvénient qui pouvait résulter de la pénétration de la pluie et du vent, en la surmontant d’une cheminée très élevée, munie d’étages superposés, de baies latérales, tout comme les lanternes des clochers. On peut rapprocher les cheminées sarrasines des cheminées aragonaises traditionnelles en Haut Aragon, dans les Pyrénées espagnoles, assez semblables structurellement.
Au xviiie siècle, ces cheminées étaient déjà considérées d’un autre âge ; de là, certainement, l’appellation de « sarrasines », et non pas en vertu d’une origine mauresque.
Gabriel Jeanton, historien et président de l’Académie de Mâcon, recensa en 1923, plus de 400 cheminées de ce type. En 1977, il n’en restait plus guère qu’une trentaine, dans les secteurs de Pont-de-Veyle, Saint-Trivier-de-Courtes, Montrevel-en-Bresse, Bâgé-le-Châtel, Pont-de-Vaux, plusieurs à Romenay et en quelques autres endroits. En 2007, on en dénombrait exactement trente-quatre.
La « cheminée chauffant au large » – dispositif qui à l’origine est lié à l’existence sous un même toit d’une famille étendue ou d’une communauté – constitue un thème majeur de l’architecture vernaculaire en France, et les cheminées dites « sarrasines » ne sont que la partie émergée (au sens propre comme au sens figuré) d’un ensemble plus vaste qui reste en attente d’investigations étendues à l’ensemble de l’hexagone.
Cheminées dites « sarrasines » en basse Ardèche
L’Ardèche du Sud posséderait, elle aussi, des spécimens de ces dispositifs que des érudits bressans du XVIIIe siècle ont dénommé « cheminées sarrasines », à savoir des foyers disposés au centre d’une pièce pour « chauffer au large » et trahis extérieurement par une souche monumentale élaborée, en forme de tourelle, plantée au milieu d’un versant ou contre le faîtage . Plusieurs souches ont été répertoriées : quatre d’entre elles, construites en pierres de grès taillées et appareillées, sont en forme de fût élancé ajouré en partie haute et coiffé d’un cône surmonté d’une boule ; une cinquième a les trous d’évacuation de la fumée ménagés dans la mitre même. Il reste à préciser la nature des bâtis et des foyers sous-jacents (non visibles de l’extérieur) et à déterminer la classe sociale qui les a construits et à quelle époque.
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