Mobilité des populations de France au 15ème siècle
Posté par francesca7 le 27 mars 2013
La mobilité de la population a été encore plus grande dans les ports et les grandes villes rendus cosmopolites par leur activité commerciale. Certaines régions d’accueil, comme le Périgord et le Quercy, ont été aussi des foyers de départ. Pendant que des Quercinois recevaient des immigrants du massif Central, d’autres s’installaient à Bordeaux, à Toulouse et à Montauban, voire à Montpellier, à Nîmes ou à Lyon.
Des migrations se font aussi entre les villes proches, de la plus petite vers les plus grandes, par exemple, de Chartres vers paris, Orléans, Tours, Poitiers, Bourges, ou encore entre des villes similaires comme entre Avignon, Montpellier, Toulouse, Narbonne, et Barcelone. La région parisienne, à la fois très bien située, très riche, célèbre et très éprouvée par la guerre, attirait depuis longtemps des Normands, des Angevins, des Berrichons, des Limousins et surtout des bretons et des Auvergnats ; mais après 1450, elle accueille aussi des familles originaires du Perche, du Vendômois, du Blésois, de l’Orléanais, du Poitou et de la Bourgogne, et surtout du Nord : Picards, Valoisiens, Liégeois et Flamands, sans oublier, à Paris, la plus forte concentration d’Italiens du royaume, banquiers, changeurs, marchands certes, mais aussi armuriers, maquignons, cordonniers, épiciers, taverniers ou hôteliers.
Nombreux sont les vrais étrangers attirés par le royaume de France, ses richesses potentielles et ses souverains avisés. Pour contrebalancer l’installation temporaire des Anglais dans le sports Normands, Charles II, après les avoir chassés, attire de nombreux mercenaires écossais qui, une fois la guerre de Cent Ans terminée, s’installent dans toute la France jusqu’à la fin du 16ème siècle. Originaires de Glasgow, d’Aberdeen et d’Édimbourg, ils fondent des familles à Dieppe, au Tréport, à Eu, à Arques, à Chartres et à Tours. On en repère même en Berry et en Aquitaine. Tous ont obtenu facilement leur naturalisation.
Le séjour de la papauté à Avignon entre 1309 et 1376 en a fait une place marchande internationale dominée par les banquiers italiens. Dès 1427, Nantes comptait des Italiens, des Hollandais, des Hanséates et surtout des Espagnols. Très cosmopolite aussi Rouen qui, dès la fin de la guerre de Cent Ans, voit revenir en masse, des marchands grecs, italiens comme ces Rucellai (francisé en Rousseley), déjà présents à Nantes et à Lyon, e t surtout des Espagnols installés aussi à Bordeaux, à Nantes, à Bruges, à Anvers et à Londres. En 1525, Rouen comptait environ 80 Espagnols. Venues du Pays basque, de Vieille Castille, ces familles espagnoles se sont vite assimilées, grâce à des mariages mixtes, dès le début du 15ème siècle, et à la francisation de leurs noms. Des artisans, des muletiers et des étudiants catalans étaient nombreux à Toulouse.
Des techniciens allemands émigrent en France dès la deuxième moitié du 15ème siècle ; appelés par le grand argentier de Charles VII, Jacques Cœur, des mineurs remettent en état les mines de la région lyonnaise vers 1444. Trente ans après, des métallurgistes allemands relancent les forges de Bourgogne, du Nivernais, du Berry et du Beaujolais. Le premier livre français est tiré en 1470 à Paris par des imprimeurs allemands, qui dès 1473, font de Lyon la capitale de l’imprimerie française. Hélas, impossible de mesurer l’ampleur et la durée de ces migrations allemandes, du reste assez localisées et spécialisées. Les implantations des Italiens sont plus nombreuses et plus durables. Ils se sont installés partout, on l’a vu, mais beaucoup plus encore dans le Sud Est, y compris dans les petites villes comme Apt, Orange, Avignon ou Sisteron. Les émigrés sont da la région d’Asti, de Cuneo (Piémont) ou de Florence. Vers 1470, 70 chefs de famille originaires d’une vallée alpestre déshéritée se sont installées à Marseille et dans toute la Provence intérieure. Dans les mêmes années, 500 familles de la Riviera di Ponente (à l’est de Gênes) ont repeuplé les régions de Cannes, de Grasse et de Biot. Des Génois colonisent des villages comme Saint Tropez. Reprenant les mesures du roi René pour attirer les Italiens (exemptions de taillé, autorisation de porter le titre de bourgeois), Louis XI, qui les appréciait au point de confier sa santé à l’un d’entre eux, fait de Lyon la première ville italienne de son royaume.
Originaires de Milan, de Gênes, de Florence et de Lucques, ils sont maîtres du commerce des soies ; ils s’installent même dans d’autres viles, francisent leurs noms et épousent des Françaises ; on en retrouve ainsi à Avignon, à Nîmes, à Montpellier, à Narbonne, à Toulouse, à Bordeaux, à Troyes, à Metz, à Saint Omer, et on l’a vu, à Nantes, à Rouen et surtout à Paris. On trouve même des évêques italiens en Aquitaine, par exemple à Agen. Après les guerres d’Italie, aux banquiers, aux agriculteurs et aux marchands, s’ajoutent les artistes, dont Le Primatice et Le Rosso qui créent l’école de peinture de Fontainebleau, Benvenuto Cellini et surtout Léornard de Vinci. Mais ces célébrités ne font pas souche en France.
Un nouveau peuple entre en France en 1419 : errant et d’origine alors inconnue, il attire d’abord la curiosité, la charité, mais provoque vite la méfiance et la peur. Les Tsiganes sont appelés Egyptiens jusqu’au 18ème siècle, mais aussi Caraques en Provence, Cocarons en Languedoc, Carcarots en Pays basque, Camps volants en Bourgogne, Beudindins en Saintonge. Cette population pré-Aryenne quitte le Sind Pakistanais au 11ème siècle et arrive en France en 1419, à Sisteron, puis à Châtillon en Dombes, et à Mâcon, dirigée par le « duc » André de petite Égypte. Leurs bandes passent à Bruxelles, à Bruges, à Arras et à Tournai, partent en 1422 pour un mystérieux voyage à Rome, d’où il s rapportent une recommandation du pape Martin V, dont ils font plusieurs copies, afin de mieux se faire accepter par les populations sédentaires qui leur fournissent de quoi manger, boire et se chauffer pendant quelques jours, le temps de s’étonner e leur adresse de cavaliers et de leurs capacités à prévoir l’avenir ; mais peu à peu, il sont rejetés, sur l’incitation des évêques. Le « duc de la Petite Egypte », arrive à Paris le dimanche 17 août 1427, après avoir traversé le Rouergue et l’Auvergne. Chassés dès le 8 septembre, les Tsiganes vont à Amiens et sillonnent la France en tous sens, atteignant la Bretagne et la Normandie à la fin du siècle. Ils adoptent des prénoms chrétiens souvent d’origine orientale (André, Michel, Nicolas…) et des patronymes français, qui sont d’anciens prénoms (Antoine, Clément, Saint Germain…) ou qui indiquent une provenance locale (de la Combe, de la Fontaine, de la Garenne) ou régionale (Saintonge, Champagne, Le Basque, Languevin) et parfois des surnoms militaires (La Rose, La Fleur, la Douceur…)
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